Les eaux françaises regorgent de poissons intéressants à pêcher. Mais si il y a une espèce qui se démarque, c’est bien le thon rouge. Un poisson passionnant qui n’est pas toujours évident à capturer, de par sa méfiance, mais surtout par sa puissance. Celui-ci n’a rien à envier aux espèces tropicales, et est même considéré comme l’un des adversaires les plus puissants.
Il existe 3 sortes de thons rouges : le thon rouge du pacifique (Thunnus orientalis), le thon rouge du sud (Thunnus maccoyii) et le thon rouge d’atlantique (Thunnus thynnus). C’est ce dernier qui vit proche de nos côtes et qui se reproduit en méditerranée. https://fr.wikipedia.org/wiki/Thunnus_thynnus
Sa croissance est rapide, il devient mature à l’âge de 4 ans en méditerranée et 8 ans en atlantique. Mais sa surpêche commerciale le rend vulnérable et il est classé en espèce en danger. Il fait l’objet de mesures de protection assez strictes dont il est impératif de tenir compte. Ceci étant dit, depuis 2 ans, nous assistons à un retour de ces poissons sur les côtes méditerranéennes, ce qui est encourageant pour l’avenir. Mais il ne faut pas crier victoire trop rapidement. Les gros géniteurs sont encore rares et ce sont les petits individus qui sont de retour.
Il s’agit donc d’un poisson prédateur dit pélagique. Bien que poïkilotherme (a sang-froid), il a pour particularité de générer sa propre chaleur grâce à sa mobilité permanente ce qui lui permet de se mouvoir rapidement, y compris en eau froide.
Il peut dépasser 3m de long pour un poids supérieur à 600kg, mais les individus les plus communs se trouvent plutôt dans la fourchette des 15/30kg et il n’est pas rare de croiser des poissons de 50/60kg. Ce sont donc de jeunes poissons qui vont rapidement grandir.
Le thon rouge, un chasseur hors pair
Le thon rouge vit en banc de plusieurs dizaines à plusieurs milliers d’individus. Comme dans toutes les « meutes », il y a toujours un animal pilote qui va guider ses congénères ; que ce soit dans les déplacements mais également dans l’alimentation. Comme vous l’aurez compris, ce formidable poisson chasse en banc. Les techniques de chasses sont similaires à tous les poissons prédateurs : le fourrage est encerclé et concentré soit contre le fond, soit en surface et la curée peut ainsi avoir lieu. Il s’agit du mode de chasse le plus efficace. En revanche, il faut savoir que les plus gros individus ne vivent qu’en petits groupes et le mode de chasse devient différent : il s’agit d’une chasse opportuniste. Bien souvent, ces poissons se nourrissent de petits thonidés en activité alimentaire également. Ils profitent du manque de vigilance que provoque l’euphorie alimentaire pour attaquer soit le fourrage, soit les prédateurs. Ainsi, il peut arriver lorsque l’on traque la bonite de se faire happer une capture en plein combat.
Ce sont bien sûr les chasses qui ont lieu en surface qui vont nous intéresser. Tout simplement parce qu’elles sont facilement repérables et accessibles. Ceci dit, ces chasses n’ont pas lieu n’ importe où. Il faut d’abord qu’il y ai présence de fourrage. Celui-ci peut être constitué de petites crevettes (krill) qui évoluent par bancs très importants et au gré du courant ; ou bien de poissons de type anchois, sardinelles voire maquereaux.
L’action de pêche sera la suivante : se placer à proximité de la chasse, lancer les leurres dedans en espérant provoquer la touche. A première vue, cela semble extrêmement simpliste. Mais lorsque vous serez en action de pêche vous saisirez qu’il n’en est rien. Pour vous aider à mieux comprendre, nous allons vous donner quelques indications.
Commençons par le matériel
Ici, point de finesse. Le thon rouge est un redoutable combattant qui possède une puissance et une endurance hallucinante. Bien entendu, il n’est pas question de pêcher avec du matériel prévu pour le marlin, mais adapté à la fois à la propulsion des leurres ainsi qu’à la puissance de traction sur des durées pouvant aller de 10min a parfois plusieurs heures sur de très gros poissons. Dans l’intérêt de la survie de la capture, puisqu’elle devra être remise à l’eau après combat, il est important que le combat ne soit pas trop long. La durée idéale doit être inférieure à une ½ heure. Au-delà, les muscles du poisson vont créer de l’acide lactique qui peuvent provoquer crampes et une mauvaise oxygénation des muscles pouvant conduire le poisson vers la mort.
Pour des poissons inferieurs à 20kg, un matériel à partir de 40lbs est conseillé, 60/70lbs convient pour des poissons inferieurs à 50/60kg, au-dessus, il faudra envisager des lignes plus résistantes. Le problème viendra au niveau du lancer des leurres qui ne sont pas très lourds : 20 à 40gr.
La canne ne doit pas dépasser 2,4m sous peine d’avoir un bras de levier trop important pendant le combat, et doit être capable de propulser à bonne distance des leurres de 20gr jusqu’à 50/60gr, sachant que la plupart du temps, les leurres feront environ 30gr. L’action sera donc plutôt souple en pointe et progressive au combat avec une très forte réserve de puissance. Il existe aujourd’hui un bon nombre de cannes développées pour cette technique et qui sont relativement efficaces.
Le moulinet de type spinning doit être très robuste. Les modèles utilisés dans les pêches tropicales sont les plus adaptés : bâti rigide, mécanique résistante à toute épreuve, et freins surpuissants dont les disques sont en carbone. L’utilisation de moulinets de légende tels que Stella ou Saltiga prend tout son sens.
Il sera garni de tresse adaptée à la puissance de la canne. Les versions en 8 brins de type super PE sont vivement conseillées. Elles offrent une glisse incomparable et un rapport diamètre/résistance le plus intéressant. La « PE4 » est la plus utilisée. Sa résistance se situe entre 60 et 70lbs pour un diamètre d’environ 33%. Elle permet de se mesurer efficacement à des poissons de moins de 60kg. Les pêcheurs les plus habiles arrivent à mener les combats à terme avec de tels individus en moins d’une ½ heure ce qui est fort honorable. Ceci dit, la majorité de vos captures se situera en dessous de 30kg, ce qui reste déjà très intéressant compte tenu de la puissance de ces poissons.
La partie terminale de votre ligne sera constituée d’un brin de fluorocarbone de 60 à 90% en fonction de la résistance de votre corps de ligne ; et sa longueur n’excèdera pas 90cm. En effet, le nœud de raccord doit toujours être sorti des anneaux au moment des lancers afin d’éviter toute friction susceptible à la fois d’abîmer le nœud mais également de retenir la ligne. Le fluoro possède la capacité d’être invisible mais également de résister aux frottements. De ce fait, il est le matériau idéal.
Pour fixer vos leurres, utilisez des agrafes ultra robustes : 150 lbs minimum. Elles seront mises à rude épreuve. Mais il est toutefois recommandé d’utiliser plutôt des anneaux brisés voire de faire directement un nœud sur le leurre.
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La pêche du thon est réglementée :
En effet, ce poisson fait l’objet d’une protection du fait de la fragilité de son cheptel. Cette pêche se fait donc en nokill, à la belle saison, avec une autorisation qui est accordée gratuitement mais il est impératif d’en faire la demande. Dans certains cas, il est possible d’obtenir une bague vous autorisant à conserver un poisson, mais sous conditions spécifiques. Pour plus d’informations, il convient de consulter les affaires maritimes qui seront à même de vous renseigner efficacement.
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Les leurres pour pêcher le thon
Les leurres utilisés seront de 3 familles : leurres durs flottants, leurres durs coulants et leurres souples.
Les leurres flottants sont surtout constitués de poppers et de sticks-baits. Ils offrent la possibilité d’assister visuellement à l’attaque qui est bien souvent spectaculaire. En outre, il s’agit de leurres efficaces dans les gros bouillons. Les poppers, par leur action de nage spécifique, simulent à la fois une chasse et un poisson fourrage qui est pris en chasse. Ceci a pour effet de stimuler le réflexe d’attaque des poissons.
Les stick-baits ont une action de nage de type « walking the dog », c’est-à-dire qu’ils effectuent des écarts alternatifs d’un côté et de l’autre, imitant la nage erratique d’un poisson en fuite.
Les leurres coulants peuvent être des casting-jigs, des lipless voir des poissons nageurs. Les casting-jigs offrent une densité très importante ce qui permet à des leurres de petite taille de pouvoir être propulsés à longue distance. Leur nage n’étant pas très flagrante, des petits mouvements de canne permettent de renforcer l’attraction. Leur efficacité est augmentée sur des animations rapides. Les lipless sont plutôt efficaces sur des animations par à-coup leur permettant de faire des « long slides » imitant des poissons en fuite de manière assez réaliste. Enfin, les P.N. sont toujours aussi intéressants mais il convient de privilégier les versions extrêmement dense sous peine d’être pénalisé au lancer.
Les leurres souples sont souvent combinés aux bombettes. Ces dernières ont la particularité de permettre de propulser à bonne distance des leurres assez légers. Il est ainsi possible d’utiliser de petits leurres souples imitant à merveille les petits poissons fourrages. Le « raglou » en tête de liste, mais la plupart des petits leurres imitant poissonnets et crevettes conviennent. Il est néanmoins nécessaire de les armer avec des hameçons ultra robustes car ceux qui sont armés à l’origine ne sont pas adaptés à la puissance du poisson.
A l’abordage !
Les oiseaux tournent autour d’un point précis à la surface de l’eau ? C’est le signe que quelque chose se passe sous la surface de l’eau. Des gerbes éclatent à la surface, la curée est lancé, c’est une chasse, il est temps de l’appréhender. Mais contrairement aux bateaux qui se trouvent probablement à vos cotés, il ne faut pas foncer à pleine vitesse sans réfléchir. Il y a effectivement des méthodes pour se rapprocher d’une chasse et surtout y pêcher efficacement. Le bruit des moteurs éveille la méfiance des poissons. Il ne faut donc pas « rentrer » dans la chasse mais se placer à coté et la laisser venir vers vous. Avant toute chose, il faut connaître la direction du courant et des vents afin de connaître précisément votre dérive. Vous devez analyser cela en arrivant sur la zone de pêche et avant de commencer à repérer les chasses.
Lorsque vous avez décelé une chasse, il vous faut déterminer la direction de son déplacement tout en cherchant à la rejoindre. Contournez la chasse à distance respectable (a plus de 100m) et placez-vous à la fois en amont et en tenant compte de votre dérive. Le moteur doit être coupé et votre bateau doit s’arrêter à environ 50m de la chasse, ce qui correspond à une distance suffisante pour ne pas « casser » celle-ci. Si vous avez bien calculé votre coup, les poissons vont se diriger vers vous et vous n’avez plus qu’à lancer vos leurres dans la masse compacte. Poursuivre une chasse en restant en aval de celle-ci n’est pas la meilleure solution : le temps que vous arriviez à lancer vos lignes dans celle-ci, elle aura tout simplement disparue, ou dans le meilleur des cas se sera éloignée et ne sera plus à votre portée. On observe encore trop souvent des pêcheurs qui se précipitent sans réfléchir sur les chasses : au final, ils ne prennent rien et font fuir les poissons.
Si par bonheur, un poisson se saisi de votre leurre, il faut impérativement le ferrer fermement quitte à réitérer le geste une à deux fois supplémentaire. Le combat doit se dérouler à la fois en force et en souplesse. Lors des rushs, inutile de vouloir le retenir. Contentez-vous de maitriser le défilement de la ligne avec un frein réglé de manière optimale. La canne doit être tenue de manière à ne pas former d’angle supérieur à 90° ce qui vous permet de profiter du maximum de la puissance du blank. Sur les sujets de bonne taille, il n’est pas rare de devoir suivre le poisson sous peine de voir son moulinet se vider de toute la tresse. En revanche, dès qu’il est possible de pomper le poisson, il ne faut pas hésiter à le faire autoritairement. Vous comprendrez que chaque longueur de ligne gagnée se fait au prix d’efforts parfois intenses et qu’elles peuvent être facilement perdues. Bien souvent, le combat se fait en 3 phases : la touche avec le « gros » rush, la phase de lutte où les rushs vont se succéder et le poisson reviendra plusieurs fois vers vous avant de repartir, et la phase finale où le poisson va évoluer sous le bateau en faisant des cercles. Combattre un thon peut s’avérer être un véritable sport !
Avec un peu de réflexion, il est possible d’approcher ces bancs de poissons en pleine effervescence qui mettent la surface de l’eau sens dessus-dessous. Un spectacle extraordinaire qui laisse sans voix les premières fois que l’on en observe de près.