Longtemps resté au second plan dans l’esprit des pêcheurs plus intéressés par la question des appâts, le camouflage des montages a pris une telle importance qu’il devient impossible de lire un magazine sans plusieurs articles traitant du sujet. La carpe parvient-elle à détecter nos montages dans toutes les situations ? Voilà une question dont la réponse influence directement nos résultats.
La détection des montages, mythe ou réalité ?
Bien que tournées dans des conditions particulières et à des fins commerciales, les vidéos underwater ont mis en évidence un fait longtemps ignoré par les pêcheurs : nos montages ne sont pas infaillibles et les carpes apprennent à se méfier des pièges tendus, à tel point qu’il arrive de ne retrouver que la bouillette eschée sur un spot pourtant abondamment fourni en particules diverses… L’utilisation d’un aquascope ou une plongée sur le poste permet de confirmer que les carpes ont tout raflé pour ne laisser que la bouillette que l’on pensait fatale.
Diverses raisons peuvent expliquer un échec cuisant pour l’amour propre du pêcheur. Si l’approche générale et les stratégies d’amorçage doivent être repensées en absence de départ, le fait que la nourriture déversée ait disparu indique clairement que les poissons se sont nourris sur le poste. On peut dès lors s’interroger sur la présentation des appâts, sur la pertinence des montages utilisés, mais également sur leur discrétion dans certaines conditions.
Des vérités rétablies
Les campagnes publicitaires et les articles sponsorisés tentent de nous faire croire que la carpe est capable de détecter la plupart des montages proposés. Pourvus d’organes sensoriels adaptés à leur milieu de vie, les poissons perçoivent des messages chimiques et olfactifs, utilisent la vue pour dénicher des proies et utilisent leurs bouches pour tester les appâts. La forme d’intelligence développée avec la pression de pêche leur permet-elle cependant d’éventer tous les pièges ? J’aurais tendance à croire que certaines carpes réputées imprenables dans des eaux particulières ont des habitudes et des sources alimentaires dans lesquelles la bouillette n’a pas place.
Les vidéos évoquées ont été tournées dans des eaux cristallines et en pleine journée, quand la carpe peut utiliser la vue pour déjouer un piège… Rendre alors les montages invisibles prend tout son sens, en employant des plombs camouflés, des bas et des têtes de ligne en fluorocarbone, mais aussi un montage à la qualité mécanique éprouvée. On peut juger ces précautions superflues par luminosité réduite, la nuit, dans d’importantes profondeurs ou dans des eaux troubles. Dans ces cas précis, une absence de touche s’explique davantage par un mauvais positionnement des lignes ou par un repérage tactile de la ligne amenant les poissons à fuir la zone pêchée.
Des solutions pour éviter la détection tactile des montages
La carpe doit se sentir en sécurité pour accepter les offrandes qui lui sont faites, rien ne doit l’alerter sur la présence d’un appât piégé. La pêche fil détendu n’est pas toujours possible, mais pointer systématiquement ses cannes au ciel est peu judicieux quand on a dépensé une fortune pour acheter le matériel dernier cri en matière de camouflage !
Diverses solutions permettent de soustraire les fils à leur détection par les poissons. Pour cela, je cherche systématiquement à couler mes corps de ligne quand la typologie des fonds me le permet, en employant différents types de back leads à raison de plusieurs exemplaires par cannes. Les lignes lancées du bord vont être coulées avec un back lead captif après le scion couplé à un flying back lead qui se déposera plus près de l’esche. Une importance accrue doit être accordée aux derniers mètres précédant le montage. Dans la mesure du possible, tous les éléments de la ligne doivent parfaitement épouser les contours du fond, de la tête au bas de ligne. Un leadcore de densité supérieure à celle de l’eau, une tête de ligne agrémentée d’une olivette ou d’un flying back lead, une tresse alourdie avec de la pâte tungsten et d’autres matériaux encore ont des avantages certains et améliorent la discrétion des montages. Si le dicton dit de vivre caché pour être heureux, cacher les montages rendra heureux le carpiste.
Quand Lio nous donne une leçon
Je suis toujours ébahi quand je regarde la boîte de pêche de mon ami Lionel lors de nos sessions communes. Elle contient en tout et pour tout une seule bobine de fil ainsi qu’un ou deux types d’hameçons pour confectionner son montage charnière fétiche, montage que l’on peut juger assez efficace quand on connaît la série de beaux poissons qu’il a capturés à Saint Cassien ou ailleurs… Tout au plus se contente-t-il d’une courte tête de ligne en fluorocarbone dans les eaux claires et les carpes ne soupçonnent aucun piège, jusqu’à leur arrivée dans l’épuisette.