En cette année 2022, beaucoup de personnes cherchant exclusivement les gros poissons auront en tête un lac de barrage français qui dévoile une population exceptionnelle de grosses carpes. Je ne fais pas exception, alors que donneront ces 11 journées de mi-novembre au bord de l’une des meilleures eaux à grosses carpes qui ai existé ?
Ce lac de barrage d’une centaine d’hectares a reçu des alevinages il y a une 20aine d’année, et les conditions se sont alignées, je ne pense pas vraiment que quelqu’une sache pourquoi mais beaucoup de ces poissons sont montés à + de 25, voire + de 30 kg, pour faire en cette année sans doute l’endroit avec le plus de gros poissons dans le domaine public, je n’ai pas tenu les comptes mais on peut raisonnablement penser à plus d’une dizaine. Bien sûr il est possible de dire a posteriori qu’il y a beaucoup à manger, dont des bouillettes, des herbiers aussi qui semblent jouer un rôle, mais tellement d’autres eaux réunissent les mêmes conditions sans avoir une telle population que c’est pour ça que j’écris que certaines raisons restent inconnues, peut-être tout simplement le hasard joue t’il aussi un rôle ?
Ma seule expérience ici remonte à juin 2021 pour une semaine de pêche soldée par zéro carpe et 4 petits silures, pas fameux. Cela m’avait permis d’appréhender le lac pour la première fois, qui ressemblait à un vrai barrage avec des pentes et des pierres, ce qui m’avait surpris, étant plus habitué à connaitre des eaux à spécimens dans des gravières. Il y avait beaucoup d’herbes, mais ça restait pêchant, et surtout très peu de pêcheurs j’étais même le seul durant la semaine puis quelques locaux le week-end, très étonnant quand on connait la population.
De toutes autres conditions de pêche
Pour novembre 2022 quelques informations me disaient qu’il était très bas, toujours plein d’herbes et avec énormément de pêcheurs… pas très encourageant, mais comme j’ai appris durant mes années de pêche à ne pas trop se fier aux infos et qu’il fallait aller voir soi-même de ses propres yeux, me voilà tout de même parti pour 11 jours de session pour toucher un ou plusieurs très gros poissons du lieu. Alors je débarque un jeudi, et la première vision est en effet surprenante, tout l’amont du lac est un pré plein d’herbes à vaches, il n’y a pas d’eau du tout sur quasi 1 km ! Puis vient un peu d’eau et des arbres noyés en longeant le lac, et enfin je me gare en voyant des carpistes au bord de la route. Ce sont des hollandais, qui m’apprennent qu’il y a un enduro de 3 jours qui commence le lendemain ! Ça commence bien… Je ne me vois pas pêcher en même temps et je préfère les laisser tranquille après m’être renseigné sur une éventuelle place, non tout est complet, tant pis. J’avais entendu parlé d’une gravière à 2 h de route connue aussi pour des beaux poissons, je ne comptais pas y aller, mais on va dire que c’est plutôt le bon moment, allons-y !
Le faux départ
A l’arrivée sur cet endroit imprévu, je ne vois personne, sans connaitre je me mets sur une pointe, c’est la solution de facilité pour pouvoir explorer un peu partout. Bon pour résumer, l’eau était à 9 degrés car j’étais monté en altitude, il gelait les nuits, je connaissais assez mal les postes et même en sondant j’évitais au maximum les herbiers mais sans bateau difficile d’être sûr et certain de pêcher correctement, bref, zéro touche ! Et donc 3 jours plus tard je me retrouve à nouveau sur le lac initial.
J’arrive assez tôt pour discuter et apprendre que l’enduro s’est gagné dans un fond de baie sans carpe miracle, mais quelques-unes allant jusqu’à 24 kg quand même. Malgré cela étant un peu têtu et me sentant plus malin, je m’installe sur une pointe près du lit de l’ancienne rivière, je me dis que ce sera un lieu de passage plus logique qu’un fond de baie. J’essaie de couvrir un maximum de terrain, une canne dans mes pieds, une le plus près de la berge en face, et certaines sur les côtés, que je changerais tous les jours. Et bien après 3 jours, le bilan est facile à cerner = bredouille ! Ça fait tout de même 3 jours sur un autre lac + 3 ici sans aucune touche, ça commence à sentir la semaine de perdant… Après avoir discuté avec un visiteur qui est très surpris que le poste de fond de baie soit encore libre, car il trouve cela hallucinant comme ce poste a gagné l’enduro de la semaine dernière, je trouve que c’est tout à fait vrai, et je déménage ! Je n’ai pas vraiment de spots à chercher, c’est un plateau et je mets mes lignes un peu étalées en face de moi, avec un amorçage léger car ça ne sent quand même pas le carton durant cette semaine.
Après 6 jours bredouilles, le déménagement redonne espoir
Je crois avoir bien fait de ne pas avoir beaucoup amorcé, car après une journée encore zéro touche, j’aperçois des sauts mais c’est assez lointain, enfin bref, rien de bien sympathique, et encore une 7e journée de bredouille. De toute façon le vent tape un peu sur ma baie donc ça donne un peu confiance, et comme ma pêche sur un autre poste n’a pas donnée plus de résultats, tant pis je vais rester ici en fond de baie pour les 4 dernières nuits, des fois j’abandonne la stratégie, la réflexion et je reste juste obstiné, et de toute façon je ne vois rien de mieux à faire. Durant cette nuit le vent se met à beaucoup souffler, ce que je note car cela reste assez rare en pleine obscurité où le vent a plus tendance à se calmer, et moi qui ai l’habitude de dormir biwy ouvert, je dois le fermer car la porte claquant au vent est très désagréable ! Le vent est de face, et forcément je le prends pour un signe que les touches vont venir, de toute façon après 7 jours de bredouilles le pêcheur a tendance à prendre n’importe quoi comme bon signe ! Mais là c’était vrai, et enfin un départ sur ma canne de droite. La plupart des touches font plaisir, mais celle-ci je dois avouer qu’elle passe directement dans le top 10 ! Le combat est honnête, c’est à dire que le poisson a l’air puissant, mais ramener du bord de 80 mètres environ, au milieu des herbes, cela laisse peu de place aux sensations fortes. Par contre une fois au bord, la carpe se révèle vraiment puissante et une fois dans l’épuisette une carpe commune impressionnante se dévoile ! Un dos plat, pas trop de ventre et pourtant l’aiguille monte à 24 kg, un magnifique missile ! Puis quelques heures plus tard une autre touche, une autre commune, un peu plus modeste mais intéressante pour 18.5 kg ! Et bien cela valait le coup de persister.
La réussite allait elle durer ?
Ensuite durant la journée je regarde la bobine d’un de mes moulinets, et ma tresse avait changé de couleur ! Sensation très bizarre quand on croit vivre quelque chose d’impossible. En fait il y a avait eu plus de 100 mètres qui avait été déroulé, j’étais sur le backing, le détecteur n’avait pas sonné et maintenant plus rien ne bougeait. Le poisson devait être loin, sans doute coincé dans les herbiers car plus aucun mouvement. Je prends la canne en main et m’apprête à vivre 20 minutes très pénibles en tirant fort mètre par mètre. Il y a encore des mouvements donc le poisson est toujours au bout, mais que c’est lent ! Largement le temps que l’espoir monte en moi, serait-ce une des géantes ? Et malheureusement tous ces efforts ne furent pas récompensés par une belle photo, puisque ce sera un silure d’environ 150 cm qui se révèlera, vite décroché dans l’eau. En tout cas cela fait vraiment de l’activité, je relance et cette fois j’espère bien que ça continue. Et ce sera le cas vers 16h en fin de journée, car la nuit tombe vite. Beau départ, je prends la canne et les mouvements un peu saccadés me donnent à penser que cela est encore un silure. Je tire assez fort pour expédier le combat au plus vite et relancer tranquillement tant que la lumière est là. Mais à 20 mètres du bord je vois une énorme nageoire dorsale de carpe sortir de l’eau ! Je finis donc le combat plus doucement, et met à l’épuisette une carpe miroir impressionnante, d’une couleur cuivrée magnifique ! Première miroir, et quelle miroir ! La pesée donnera 27.2 kg, et la photo révèlera un poisson admirable de mon point de vue !
La nuit reverra venir ce vent fort de face, et redonnera 2 touches de carpes, encore des communes de 19.4 et 13 kg, et un petit silure en plus ! Mais plus rien la journée suivante, je replace un tapis de bouillettes au tube lance bouillette, pas énormément mais environ 2 kg bien étalés, car vu mes touches j’imagine que c’est vite nettoyé. Cela donnera ni plus ni moins que précédemment, avec une belle commune de 18.8kg, une miroir de 15kg et un silure, puis rien la journée suivante.
Enfin arrive ma toute dernière nuit, donc la tradition veut que l’on amorce plus du tout pour qu’éventuellement les gros poissons n’aient plus le choix que de se jeter sur les montages pour manger des bouillettes, et bien ce sera finalement deux carpes, dont encore une belle commune de 18 kg, j’en ferais donc 4 de ce gabarit à 1 kg près, hasard plutôt savoureux ! La dernière sera ma petite de la session, une commune de moins de 10 kg.
Pourquoi une telle bonne pêche ?
Déjà, la question est posée de savoir si cela est une belle pêche ? En effet sur ce genre d’eau avec une telle population certains pêcheurs ont réussi des sessions bien plus énormes que la mienne en termes de nombre de grosses carpes. Mais même si l’objectif ultime du très gros poisson ne fut pas atteint, je peux dire que pour moi cela reste une session exceptionnelle, je pense aussi pour la grande majorité des carpistes français, et de toute façon sur les 15 jours entourant ma session ce fut la meilleure pêche à ma connaissance. Vous avez du vous en rendre compte, mais finalement la seule raison pour laquelle j’ai eu ces très bons résultats, se fut que je décidais de déménager en fond de baie, ainsi j’étais au bon poste et au bon moment car mon entourage ne semblait pas prendre grande chose ailleurs. Même mes amorçages plus ou moins importants n’ont pas eu l’air de bien changer le cours des choses, les poissons sortaient des herbiers, tombaient sur mes montages et mordaient, tout simplement. Sans doute un point important qui venait par contre vraiment de ma technique fut que je ne perdis aucun poisson dans les herbiers, mes montages en 0.70 mm rigides avec hameçon de 2 prenaient et ne lâchaient pas. Ainsi ce n’est pas un montage plus piquant ou plus alambiqué changé en cours de route, encore moins un appât ou une stratégie spécifique qu’il faut rendre responsable de ces prises je pense. Pour tout avouer d’ailleurs, je ne sais même pas avec quelle bouillette j’ai pêché, c’est juste des paquets prototypes non validés qu’un ami avait pu dégoter pour moi auprès de la marque pour laquelle il travaille, ça sentait la fraise, ça faisait 20 mm et ça tenait bien à l’amorçage et à l’hameçon, critères suffisants pour moi. Petite parenthèse, j’étais le seul sur le plan d’eau à ne pas disposer de bateau amorceur, loin de moi la pensée que ce genre d’engin effraie les carpes et que j’en ai profité, mais à l’inverse c’est la preuve que ce n’est pas indispensable pour prendre de belles carpes, de même le fait de ne pas pouvoir amorcer avec des particules car je ne spodais pas non plus, je préfère amorcer 100 % avec des bouillettes. Aussi dernier point par contre celui-ci indispensable, je pêchais dans une eau qui abritait beaucoup de très grosses carpes, et ça, on va dire que c’est la raison déterminante à tout carton ou toute belle prise, et c’est là où peut se jouer la vraie différence entre les pêcheurs car tout le monde n’est pas prêt à faire 6 ou 10 h de route pour passer 10 jours au bord de l’eau en novembre sans être assuré déjà de pouvoir pêcher, ensuite d’avoir un bon poste, enfin d’être là durant un moment d’activité. Mais ceux qui le font plusieurs fois par an seront récompensés par de superbes spécimens à force, c’est presque assuré ; et cette fois ci ce fut mon cas, et plein d’autres sessions précédentes ce ne fut pas le cas, tant pis, j’ai bien fait de persévérer pour une fois, après tant de sessions soldées par un échec.