Les rivières de première catégorie comportent des faciès très différents. Le plus méconnu d’entre eux étant les grands trous profonds aux eaux noires car bien souvent inaccessibles ou très compliqués à pêcher. Attirant inéluctablement les amateurs de dame fario, ces failles sombres sont des sources de fantasmes et des réservoirs d’espoir de capture d’un gros poisson.
Beaucoup d’eau, beaucoup de poissons ?
Souvent encaissées dans des gorges profondes résultant du relief tumultueux de l’environnement, ou au pied des barrages et autres seuils naturels, les fosses de rivières froides peuvent receler des trésors de poissons. Ceci n’est possible qu’à beaucoup de conditions. Cela va de la morphologie propre de la fosse, de la géologie du site, de sa fréquentation par d’autres espèces dont l’homme (le non pêcheur), bien sûr de la qualité de l’eau, de la maille en vigueur et encore d’énormément d’autre facteurs.
Le volume d’eau ainsi que le débit et la température estivale sont les clefs mais il doit y avoir aussi de la profondeur. Beaucoup d’eau n’implique pas forcément beaucoup de poissons, c’est le nombre de caches dans le trou qui fera le nombre de poissons (si tout est ok et je le répète avec beaucoup de facteurs).
Une grande vasque de granit aux parois lisses et au fond de galets avec une chute d’eau est potentiellement moins « équipée » qu’un autre trou avec le même volume d’eau mais sur sol calcaire creusé de centaines de petites grottes et aux courants multiples circulant de façon très complexe dans le dédale.
Cannibale et fière
Lorsque toute les conditions sont réunies (et que toute les mauvaises sont écartées) le simple temps fait le reste. La vie explose, et pas besoin de vairons pour rassasier les truites qui peuvent alors faire du cannibalisme sans que la population de ses rangs n’en soit altérée. Voir dans un trou de 250m3 des centaines de truitelles, des dizaines de maillées 2 big et un parpaing n’est pas une hérésie mais juste la nature.
Ces grands volumes d’eau pour de petites rivières sont habités comme un HLM. Tout y est bien rangé, chaque poisson à sa place, pas tous actifs au même moment, parfois des groupes de dizaines d’individus nagent alors que pêcheurs se succèdent sans succès. Les plus grosses se tiennent dans l’obscurité de leurs caches secrètes. Les zones à bulles sont souvent réservées aux poissons à table en général mais ceci n’est pas une vérité absolue, la truite des profondeurs garde encore beaucoup de mystères pour nos petits cerveaux reptiliens.
Endroits stratégiques
Aux rares endroits où l’homme n’a pas trop ou pas pu mettre les pieds (sauf les pêcheurs sportifs …) la montagne et le relief sont des remparts naturels qui sauvent beaucoup de poissons. Ces endroits profonds plein de truites sont des réservoirs à poissons pour l’aval, créant un abri génétique (à condition que des truites d’une autre souche n’y aient pas été déversées). Les individus qui veulent quitter le trou au moment des grosses crues seront autant de reproducteurs gratis pour les secteurs avoisinants. Il me paraît important de protéger des grandes vasques souvent bien connues, ce sont des endroits stratégiques pour la survie de beaucoup de mètres linéaires de cours d’eaux. C’est logique me direz-vous mais pas si évident pour beaucoup et depuis longtemps.
Ces endroits existent encore, et il y en a plus que ce que l’on imagine, y compris dans des endroits très connus. A vous d’adapter vos montages et de comprendre la dynamique des courants pour assouvir votre passion, tout en no-kill (il y a des truites roses pour l’assiette).
Ces profondeurs sombres et riches n’ont pas toutes le même potentiel mais il faut essayer d’en profiter. Accéder à des densités de truite qui permettent de rêver de parties de pêche miraculeuses est un luxe dont il ne faut pas se priver. Alors soyez prudents en montagne ou sur des secteurs dangereux et tentez un petit coup dans les profondeurs !