La pêche du loup est beaucoup pratiquée en automne et au début de l’hiver en Méditerranée. Beaucoup moins en été, alors que de très belles pêches peuvent y être réalisées. A condition de s’adapter…
Après un printemps qui est souvent irrégulier, la saison du loup commence réellement pour moi avec l’été. Les eaux sont chaudes, et les poissons souvent très actifs. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le loup s’alimente beaucoup à cette période. Le seul frein à son activité sera la présence de malaïgue (chute du taux d’oxygène) suite à une canicule sans vent. Si un épisode de malaïgue n’intervient pas, alors on peut partir pêcher assez serein. On touchera très certainement du poisson. Cette période estivale est en plus un moment de l’année où il est possible de toucher un lunker. De quoi se motiver sérieusement !
Le monde de la nuit
La pratique de la pêche de nuit a toujours été très populaire en mer, bien plus qu’en eau douce où cette dernière est souvent interdite pour des raisons qui restent très « obscures ». Le crépuscule, puis la nuit noire sont souvent des périodes très favorables pour pêcher aux leurres : les carnassiers de tout poil se réveillent et se mettent régulièrement en appétit entre chien et loup. A nous de savoir en profiter, mais pas n’importe comment ! Ce serait une grave erreur de considérer que la nuit nous sommes invisibles pour les poissons. Ces derniers même s’ils nous repèrent moins facilement qu’en pleine journée, sont tout à fait capables de déceler notre présence si l’on ne prend pas quelques précautions : se déplacer avec parcimonie, éviter les gestes brusques, se vêtir en accord avec le milieu, en résumé : se fondre dans la nuit. Si un animal quelconque passe à proximité de vous sans vous repérer, vous êtes dans le vrai. Je suis toujours extrêmement surpris de voir certains pêcheurs de loups utiliser une lampe sans vergogne pour refaire un nœud ou pour se déplacer. J’en ai même croisé un très récemment pêchant aux leurres avec la lampe frontale allumée en action de pêche ! Autant pêcher avec un gyrophare sur la tête en branchant la sirène tant qu’on y est ! Une précaution élémentaire est par exemple pour faire un nœud de mettre la lampe et le leurre dans un sac à dos pour éviter une diffusion de la lumière. On peut aussi s’accroupir en tournant le dos à l’eau et diriger sa lampe en direction du sol. Ce qu’il faut surtout éviter c’est de pointer son faisceau en direction de l’eau. Une lumière rouge est préférable, vous aurez ensuite moins de mal à vous réadapter à la lumière ambiante. Une autre astuce bien pratique de nuit est d’utiliser une agrafe afin de changer facilement de leurre, et pour se faire, utiliser l’anneau du leurre pour l’ouvrir et la refermer. Vous gagnerez ainsi un temps précieux et éviterez bien des tourments à vos doigts. En fait, la pêche de nuit, c’est un peu comme la pêche par grand vent : il faut tirer parti d’un phénomène naturel qui au départ semble plutôt handicapant pour le pêcheur. Les vrais pêcheurs de loups ne s’y trompent pas ! La nuit s’apprivoise aussi, décuple vos sensations, vous emmène dans une autre dimension, c’est une de mes pêches favorites personnellement, notamment à la fin du printemps où arrivent les odeurs de l’été, les insectes, les oiseaux les chassant, mais aussi le menu fretin et les poissons les chassant… Et n’ayez pas peur des nuits sans lune, la période de la nouvelle lune est très souvent celle où je fais mes plus belles pêches de loups de nuit. Dans la pénombre, l’emploi d’une épuisette n’est pas accessoire : elle permet de sortir le poisson de l’eau sans faire trop de bruit, ce qui pourrait faire fuir ses congénères. De même durant un combat, il faut éviter que le poisson ne fasse du bruit en surface et donc il faut le ramener doucement sans trop le pomper canne haute. Si le poisson perce en surface, il suffit de mettre sa canne en position basse, lui rendre un peu la main pour le faire replonger.
Repérages, précision, perception
Il est crucial de bien connaître sa zone de pêche avant de s’embarquer pour une session de pêche nocturne. Si l’on recherche le loup, il convient d’éviter les zones les plus escarpées des côtes rocheuses, elles représentent un vrai danger sans lumière et les risques encourus sont bien trop importants pour la capture aléatoire d’un poisson. Personnellement, je ne pratique cette pêche qu’en plage, le long des canaux, et sur les plages de galets des côtes rocheuses. Repérez bien les différentes profondeurs des postes que vous avez l’intention de pratiquer. Ensuite, intéressez-vous aux éventuels obstacles présents sous l’eau, de façon à perdre un minimum de leurres, car de nuit, vous ne verrez plus sous l’eau. Enfin, et surtout, vérifiez la présence de courant, de postes sensés abriter un poisson à la nuit tombée : en effet, ce n’est pas en lançant un maximum de fois « au hasard » que vous prendrez du poisson, mais en pêchant précis, à la bonne profondeur, et à la bonne vitesse. De nuit, j’ai plutôt tendance à pêcher lentement, sans trop animer le leurre, mais ce n’est pas une règle à appliquer forcément tout le temps. Des repérages de jour vous permettront aussi d’identifier les proies susceptibles d’intéresser un loup de passage : présence de crabes, de crevettes, de fretin, de mulets ? Ces petits détails observés vous permettront de choisir un leurre et un maniement adéquats. Comme indiqué plus haut, la précision des lancers n’est pas une galéjade de nuit : votre leurre doit passer où se poste le loup. Pour se faire, il convient de bien « mémoriser » sa zone de pêche de jour, savoir à quelle distance lancer, prendre des repères sur le bord éventuellement. La perception des touches de nuit est parfois plus délicate que dans la journée : on perd un repère en ne voyant pas la ligne. Ce n’est donc qu’avec les sensations ressenties dans la canne que l’on va distinguer les touches. Inutile de dire qu’il est préférable d’utiliser une canne dotée d’une excellente résonance, pas trop raide, avec une vraie action du scion sur le maniement des leurres souples. Fuyez comme la peste les « triques » à la mode ces derniers temps ! Vous y gagnerez en plus en décrochant moins de poissons. Rester concentré de nuit, n’est pas toujours si facile, notamment avec la fatigue qui s’installe les minutes passant. C’est pourtant une des qualités requise pour prendre du poisson : être capable de ferrer dans l’instant après une heure ou deux sans « tapes » par exemple requiert certaines aptitudes qui permettent de passer la frontière ténue qui existe entre l’échec et la réussite, entre la prise et le poisson raté. Il arrive fréquemment qu’un loup fasse des touches très discrètes, notamment en pêchant au leurre souple et sans une attention de tous les instants on passe facilement à côté, ayant l’impression d’avoir caressé une algue sous l’eau. Précision, perception et concentration devront donc être vos alliés indéfectibles durant la nuit.
Techniques et conseils
Je connais quelques pêcheurs languedociens hors pairs qui sévissent régulièrement de nuit entre étangs et bord de mer. Je ne pouvais faire un sujet sur la pêche de nuit sans parler de ce que j’ai pu observer à leurs côtés. Je ne connais personne qui ait la même connaissance du poisson, du milieu et de la pêche de nuit que ces pêcheurs. La première chose qui m’a frappée à mes débuts, est que les postes bons de jour et ceux bons de nuit n’ont souvent rien à voir, et sont généralement à l’opposé. Il est préférable de loin d’avoir une soirée sans vent, avec un lever ou un coucher de lune si possible… Je pense aussi qu’une des clés de cette pêche nocturne est la discrétion : pas de lumière, ni de vibrations sur le sol lors des déplacements, des lancers coulés avec un poser du leurre accompagné pour éviter un fort impact sur l’eau. Il m’arrive fréquemment de prendre des loups à deux ou trois mètres de moi seulement. Si je ne prenais pas toutes ces précautions en amont afin de ne pas les effrayer, ce sont des poissons que je n’aurais probablement jamais vus. Les lancers ne doivent pas non plus être trop fréquents, notamment en pêchant avec un compagnon de pêche, afin d’éviter de « caler » le poisson. Les poissons étant de plus en plus éduqués, il faut savoir laisser « reposer » un poste en faisant des pauses régulièrement, se restaurer, boire un café, cela nous permettra également d’éviter la fatigue. Ainsi on laissera le temps aux poissons méfiants de se « remettre à poste » ou bien de nouveaux individus auront pris leur place. Ensuite, pour le côté technique, sachez qu’ils utilisent une tresse 8 brins en 0.8 PE, un bas de ligne fluoro en 0.30mmou bien en 0.25mm selon l’encombrement de la zone de pêche. Pour ce qui concerne les leurres, ils vouent un véritable culte aux leurres souples, d’ailleurs c’est bien simple, ce sont les seuls leurres qu’ils utilisent de nuit pour la plupart d’entre eux ! Enfin presque, car nous avons fait l’expérience de pêcher radicalement à l’opposé certains soirs où la pêche était difficile, et bien, croyez-le ou pas, ce sont les jerk minnows qui nous ont sauvé (notamment le Jib 90 SP de Smith et le Trick Darter X80 de Megabass). La pêche de nuit est sans doute la meilleure école pour apprendre à pêcher au leurre souple car elle nous impose une certaine technicité qui nous sera par la suite très utile en toutes circonstances. Les shads en taille 3 » et 4 », les worms et finesse en 4 »et 5 » sont les favoris. Les marques Reins, Fish Arrow, Megabass, et Sawamura sont très utilisées. Les modèles en 4 » sont les plus polyvalents, cependant des 3 » sont parfois indispensables pour faire la différence sur des poissons chipoteurs certaines nuits, et il n’est pas idiot de descendre en 2 » parfois. Les têtes plombées utilisées vont de 2 à 10 g avec une préférence pour les modèles texans ou les têtes de type stand up, pour par exemple présenter un worm posé à la verticale sur le fond. Une grande importance doit être accordée à choisir la bonne tête en fonction du courant et de la profondeur : dans ces pêches très tactiles où l’on a que peu de repères, il est d’une importance cruciale d’utiliser la bonne plombée !
Leurres d’été
Il est aussi tout à fait envisageable de pêcher de jour. Dans ce cas, le principal écueil sera la présence de touristes en bord de mer. Il faudra choisir les créneaux où ils ne sont pas au bord de l’eau en fonction de la météo ou de l’heure de la journée. C’est une très bonne période pour sortir vos leurres de surface que ce soit en mer ou en étang. Il convient de disposer de leurres silencieux, mais aussi bruiteurs (une et deux fréquences). C’est souvent sur le son que la différence se fait à cette période, sans pouvoir réellement l’expliquer. Si le lieux de pêche est encombré d’herbiers, on passera sur une pêche en buzzing au leurre souple (taille 4 ou 5 pouces). On voit de plus en plus de pêcheurs utiliser systématiquement cette technique, c’est certainement une grossière erreur comme celle de garder toujours le même leurre au bout de la ligne. De gros loups sont pris chaque été en étang, alors vérifiez bien vos nœuds et votre bas de ligne avant de démarrer votre session. Ils seront plus facilement capturables qu’en mer où la présence accrue de tassergals semble un tant soit peu déranger les loups et nuit au pêcheur recherchant les labrax en raison de leur plus grande capturabilité notamment aux deux extrémités du jour.
Pour conclure, pensez à bien profiter de cet été qui arrive en espérant que les températures ne seront pas trop élevées. Ces pêches estivales sont un vrai bonheur, généralement au frais et loin des foules inutiles, sans compter les émotions que les escapades nocturnes peuvent générer chez le pêcheur tous les sens en éveil.