Pour beaucoup de pêcheurs de carpes, la traque des gros poissons rime avec temps et chance. Globalement, cela est effectivement vrai. Mais il est également possible de faire mouche en seulement quelques heures. Pour ce faire, il y a quelques conditions à réunir et c’est ce que nous allons voir dans cet article.
Tout d’abord et avant tout, il nous semble inutile de vous rappeler qu’il est nécessaire de pêcher dans des eaux qui contiennent de gros poissons si vous comptez en capturer un. Cela peut faire sourire plus d’un pêcheur, mais combien de carpistes espèrent prendre la prise de leur vie dans des secteurs qui n’en contiennent pas ?
Pour également augmenter ses chances de succès, il faut même choisir des lieux qui en abritent une densité convenable. C’est un fait ! Plus il y aura de gros poissons, plus vous aurez de chances d’en capturer ! Ne choisissez pas de pièces d’eau trop grandes rendant le choix d’un poste productif plus aléatoire. Des pièces d’eau de moins de 100 hectares sont ainsi plutôt conseillées. Il est donc important de sélectionner son ou ses sites de pêche. La chasse aux infos est ainsi ouverte. Elle vous permet de gagner un temps précieux. Ceci étant dit, il ne s’agit pas de « craber » des postes régulièrement fréquentés par d’autres pêcheurs mais plutôt de connaître les gros poissons présents et de savoir quels sont les secteurs qu’ils affectionnent le plus régulièrement.
Etude comportementale de nos chers cyprins
Avant d’aller plus loin, il est important de connaître le fonctionnement des spécimens. En effet, en fonction de l’âge et du poids le comportement des poissons va évoluer. Dans le comportement, nous trouvons aussi bien les zones de tenue, les déplacements et les habitudes alimentaires.
Lorsqu’ils sont jeunes, les carpeaux évoluent en bancs, ceci afin d’échapper à la prédation due aux brochets et silures. Au fur et à mesure de leur croissance, ces bancs comportent de moins en moins d’individus jusqu’à devenir quasi solitaire une fois la taille maximale atteinte.
Les déplacements des petits poissons sont également assez importants à leur plus jeune âge. Ceci leur permet de trouver facilement la nourriture dont ils ont besoin pour leur croissance et en abondance. En revanche, un vieux poisson possède ses « quartiers » en fonction des saisons et ne se déplace que pour les rejoindre. Ainsi ils peuvent rester plusieurs mois dans un secteur de quelques dizaines de mètres carrés sans éprouver le besoin d’aller ailleurs.
Le comportement alimentaire évolue également : il faut savoir que cette phase demande beaucoup d’énergie, tant pour la recherche que pour la digestion. Nos chères carpes adaptent et optimisent leur alimentation en fonction de leurs besoins. Juvéniles, ce sont les vers de vase et autres microfaunes et particules qu’elles privilégient alors qu’adultes, ce sont des macro-invertébrés tels que mollusques, gros gastéropodes, crustacés et grosses particules. Une grosse carpe ne peut pas se nourrir exclusivement de vers de vase. Vous l’aurez compris, il n’est pas très rentable de rechercher les gros poissons avec de petits appâts bien qu’il soit tout à fait possible d’en capturer avec. Privilégiez des bouchées de bonne taille, cela pour 2 raisons : la première évoquée juste ci-dessus ; la seconde tout simplement pour des raisons sélectives, qui intéressent ainsi moins les petits poissons. Votre esche reste ainsi plus longtemps pêchante et du coup aura plus de chance d’intéresser un poisson de bonne taille.
La qualité des aliments ingérés a également son importance, elle dépend directement des besoins alimentaires des poissons en fonction des saisons : gavage en automne pour des réserves lipidiques et glycogène pour l’hiver, protéines, acides aminées, vitamines et minéraux au printemps afin de préparer à la fois la fraie mais aussi la croissance, etc. Là encore, il va vous falloir sélectionner des appâts correspondants à la saison afin de favoriser leur consommation. N’oubliez pas les graines avec une mention spéciale pour la tiger qui permet de tirer son épingle du jeu, notamment en eau chaude et sur des pêches rapides.
Vous comprenez ainsi avec ces quelques notions que les gros poissons ont des comportements différents des poissons plus modestes. Il faut à présent se mettre dans la peau d’une carpe lourde et massive et imaginer son fonctionnement pour pouvoir lui proposer un piège correctement esché et au bon endroit.
L’approche en speedfishing
Concernant les secteurs de pêche et les informations sur les zones de tenues des grosses mémères, il n’y a pas « 36 » solutions ! Soit vous connaissez le site comme le fond de vos poches, soit il va falloir trouver ces renseignements. Les réseaux sociaux tels que Facebook sont d’excellents terrains de chasse car de nombreux pêcheurs partagent leurs photos de prises. Les indices y circulent à une vitesse effrénée, et d’ailleurs, de nombreux pêcheurs l’ont rapidement compris. Les profiteurs y sont également légion et sévissent sans vergogne… Les blogs et les forums sont aussi intéressants et permettent des échanges constructifs. Vous allez rentrer en contact avec des gens qui fréquentent les lieux et qui vous donneront aussi des indications intéressantes. Avec tout cela, il ne vous reste plus qu’à réaliser une extrapolation et à déterminer le secteur sur lequel vous allez jeter votre dévolu.
Repérage
Pour se donner un maximum de chance de réussir votre hold-up, il est tout de même conseillé de préparer le terrain avant vos pêches éclair. Un repérage des postes pour optimiser le placement de vos montages est de mise : sondage, échosondage, voire mêmes apnée vont vous aider à analyser la topographie du terrain, ou même observer le ou les poissons visés et leur zone d’alimentation. Il est intéressant de constater que les poissons sédentaires se nourrissent régulièrement sur des « tablées » précises. Si vous avez la chance de les découvrir, vos chances d’obtenir des résultats rapidement sont optimales.
Les cassants en bordure de plateaux ou les grands herbiers poussant dans une baie se trouvant proche d’une autoroute à poisson sont des secteurs qui ont toutes les chances d’abriter une ou plusieurs de ces belles mémères que vous recherchez. En observant la surface de l’eau, vous obtiendrez de nombreux indices : manifestations des poissons en surface tels que bains de soleil ou encore marsouinages. Les petites bulles crevant la surface trahissent les fouilles et ainsi les zones d’alimentation. Il vous faut précisément noter l’emplacement, mais également l’heure et le déplacement. Beaucoup de pêcheurs ont constaté que certains spots produisent régulièrement aux mêmes heures.
L’amorçage
Il est temps de réaliser un amorçage préparatoire qui sera la touche finale avant de pêcher. Il n’est pas nécessaire de réaliser un ALT même si cela reste le must. Un amorçage correct 2 jours à l’avance va permettre de captiver l’attention mais également de stimuler l’appétit. A noter que les grosses carpes sont des poissons assez gourmands et goulus qui peuvent par moment s’alimenter sans méfiance. Soit lorsque d’autres poissons fréquentent la même tablée, soit en période de frénésie alimentaire. Il est même intéressant de constater que ce sont souvent les premiers à mordre ! Il vous faut donc impérativement pêcher dans ces périodes pour optimiser vos chances. La sortie de période hivernale ou la fin d’automne sont des moments clés. Mais egalement lorsque les petits poissons sont en déplacement et rentrent dans le territoire de la « belle », voire, tout simplement en période orageuse. Faites en sorte que la distribution des appâts se fasse avant le début de l’activité alimentaire que vous auriez décelé lors du repérage. Ceci est très important. Ne pas oublier, un gros poisson a ses habitudes et ne les change pas comme cela.
Les appâts
Donc, amorcer. Oui, mais avec quoi ? En période de forte chaleur, la tiger ne doit pas être négligée ! Certes, elle n’est que peu sélective, mais si votre amorçage est copieux, les petits poissons seront vite gavés et se retireront vite de l’amorçage.
Les bouillettes restent l’appât roi pour capturer une grosse prise. Il vous faut privilégier des diamètres de taille importante : 20mm en hiver, mais surtout 25 à 30 en période estivale. Et si vous préparez vous-même vos billes, n’hésitez pas à en rouler à la main en 40 voir 50mm. Cela peut paraître démesuré, mais face aux hordes de poissons blancs et aux carpes modestes qui pourraient s’inviter, cela reste la solution ultime pour que votre piège ne soit pas désarçonné trop rapidement. Une grosse carpe n’hésite pas à s’attaquer aux grosses anodontes, alors une bouillette de 50mm ne lui pose aucun problème. L’usage d’appâts de haute visibilité ne se justifie pas nécessairement du fait que l’objectif est de toucher un gros poisson et non du tout-venant. S’il y a compétitivité alimentaire sur vos spots, n’utilisez que de gros appâts. Dans le cas contraire, effectivement, une pop-up fluo peut déclencher une touche.
La composition de celle-ci doit correspondre aux besoins du moment. Lorsque les eaux sont très chaudes ou inversement très froides, limitez la présence de farines carnées qui ne se digèrent pas de façon optimale. En revanche, les ingrédients carnés de type hydrolysés ou protéolysés sont à privilégier de par leur CUD élevé (Coefficient d’Utilité Digestive). En période de gavage post hivernal, vos bouillettes seront plutôt riches en éléments nutritifs, à la fraye, le foie s’avère un précieux allié (bien qu’il reste intéressant à utiliser toute l’année). N’importe quelle bille est capable de faire du gros poisson, mais utiliser des appâts qualitatifs et surtout adaptés aux besoins des poissons va vous permettre d’augmenter significativement vos résultats.
L’action de pêche
Vous ne disposez que de quelques heures de pêche devant vous, essayez de faire en sorte que celles-ci correspondent aux périodes d’alimentation des gros poissons. Il est intéressant de savoir qu’à certaines périodes de l’année, les gros poissons s’alimentent plutôt en journée. Si lors de vos repérages, vous avez pu observer de l’activité, débutez votre pêche avant le début de la tablée. Mettez-vous en place avant l’arrivée des poissons afin de ne pas les effrayer. Disposez vos lignes de manière la plus discrète possible afin de ne pas éveiller de soupçons. Par ailleurs, moins il y aura de fils dans l’eau, moins le poisson sera apeuré. Par exemple, si vous n’avez découvert que 2 spots, n’utilisez que 2 cannes. Limitez le nombre de lancers, faites mouche du premier coup. Limitez également l’usage du bateau. Le poisson va rapidement faire le rapprochement entre votre embarcation et le danger. Les techniques d’amorçage par spod/spomb ne sont pas discrètes et peuvent verrouiller l’appétit du poisson, faites en un usage modéré voire ne l’utilisez pas du tout. Un bateau amorceur fera le même travail en limitant le dérangement. Ne faites de rappel que si nécessaire. Dans ce genre de pêche rapide, il est rare d’effectuer un rappel en dehors d’une capture. Celui-ci doit être le plus léger possible à contrario de l’amorçage préparatoire. En effet, bien souvent, votre montage n’est pris que lorsque l’amorçage est consommé. Pour gagner du temps, il faut donc amorcer peu le jour de la pêche.
Le maître mot est la discrétion. Si toutes les conditions sont réunies, il y a de fortes chances qu’un beau poisson finisse sur votre tapis de réception en seulement une poignée d’heures. Cela demande un peu de préparation mais vous pourriez être surpris des résultats. Il ne vous reste plus qu’à tenter l’expérience.