C’est dans les tumultes d’un fleuve argentin que nagent ces gros suceurs de roches nommés « plécostomos ». Et là-bas, personne ne les pêche… Le défi était irrésistible.
Les poissons de fond, à moustache m’ont toujours fait vibrer. Celui-ci peut atteindre 70cm et arborer des robes foncées uniques. Traverser la planète pour échouer si près de ce bijou à nageoires était impensable ! Notre destination était le fleuve Parana qui s’écoule des hauts plateaux brésiliens. Il déboule impétueusement sur 4000 kilomètres jusqu’au grandes plaines d’Argentine. A l’occasion de ce voyage de pêche en Amérique du Sud, je partais avec 2 autres personnes. Chacun devait tenir son rôle. J’étais caméraman. Ryu était « the fishing machine ». La logistique et la connexion des vols étaient une préoccupation majeure gérée par Numa qui assurait aussi le rôle de pêcheur journaliste. Après 1 TGV vers Paris, puis un vol vers les USA, deux jours se sont déjà écoulés. Le voyage s’annonce long. Nous transitons par Washington, puis Buenos Aires. Et enfin il faudra prendre un troisième vol, la gorge serrée dans une avioneta locale. Frayeurs garanties. On souffle enfin une fois arrivés dans la province de Resitencia…
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Les pléco sont des poissons quasi pas pêchés car un peu comme les hotus en France, les techniques d’approche ne sont pas évidentes. Un voyage en Amérique du sud sur la Rivière Parana doit forcément vous conduire à cibler les Dorados. Une espèce d’énorme truite au dents acérées et aux combats virevoltants. Dans toutes les grandes anses reliées au fleuve, vous trouverez différentes espèces de Pirana. Enfin, pour les amateurs de sensations fortes, au posé sur esche carnée, les Surubi constitueront le choix idéal. Attention, quand il plaque ses 40 kilos dans les profondeurs du fleuve impétueux, c’est vraiment une pêche exotique !
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Un challenge de pêche à vue
Une nuit fera du bien aux organismes avant d’attaquer 5 jours de rêve halieutique. Lors de la première journée, nous sommes déboussolés. Ce que nous devinons comme « la berge d’en face » n’est souvent qu’un ilot ou une série d’îles ! La berge d’en face, elle, se situe à 3 km ! Plus en aval, vers l’estuaire, le fleuve s’étend sur 60 km de large d’une immense plaine inondable. C’est le troisième réseau hydrographique du monde. Là c’est sûr, nous allons avoir besoin d’un guide de pêche ! Dans la région que nous avons pu arpenter non loin d’Itati, notre équipe a pris environ 100 dorados assez rapidement… Chemin faisant, en arpentant le fleuve, j’avais pu observer le petit manège d’énorme pléco le long des rochers. Mais le guide m’avait assez vite calmé : « On les voit, je les connais, mais je n’en ai jamais pris de toute ma vie de guide car ça ne se pêche pas ». Il ne m’en fallait pas plus pour avoir encore plus envie. A la faveur d’un jour ou nous étions tous un peu « carbo », j’en profitais. Mes collègues faisaient une sieste réparatrice sur une plage. Je lâchais un peu la caméra et allais franchement pêcher.
Poste clef : des rochers battus par le courant
Focalisé sur le balai de ces suceurs de roche, je méditais une approche. Je connais les pléco pour en avoir toujours eu en aquarium. Mais là on parle d’un Plecostomus sauvage qui peuple un fleuve surpuissant. Après plusieurs tentatives et diverses techniques infructueuses, je décide de piquer du matos dans la boite de pêche des collègues. Vu la montagne de matos, c’est sûr, on sent bien qu’ils ont du économiser sur des slips et des chaussettes ! Il n’y a pas d’autres possibilité ! Le salut vient finalement d’un petit jig de 20 grammes. Les pleco font des aller et venue en plein courant sur de gros cailloux qui affleurent en surface. A l’occasion le pleco ne rechigne pas à attaquer une petite proie car il est omnivore. Insistant en surplomb d’un rocher, je fais nager le jig a raz les rochers. Au 3 ème lancer le Jig effleure le lichen de la roche. Et au milimètre près le pleco l’aspire ! Le timing est parfait. Le combat a bien des inconnues. Je ne connais pas la canne qui me semble vraiment ultra light. C’est tendu mais ça ne casse pas ! Je l’attrape par la queue. La pêche est faite. Ryu dont le métier est photographe professionnel va immortaliser ce moment de voyage magique et un peu surréaliste. Parfois, les planètes sont alignées et il est écrit que la pêche sera rapide et facile.