La pêche en rivière abrite des trésors écaillés aux allures de « dinosaure » qui ne laisseront aucun carpiste de marbre. Pour tant c’est probablement l’une des pêches en eau douce les plus éprouvantes.
Et les raisons en sont multiples : nuisibles, courants, marnages, débris… Rien n’est plus démoralisant qu’un tronc d’arbre ou un herbier à la dérive entrainant les trois ou quatre cannes soigneusement placées sur ses zones de pêche. Je crois qu’un scénario du genre couplé à une bonne dizaine de touches de chevesnes et/ou barbeaux, à des heures tardives de la nuit, a dû faire craquer un grand nombre d’entre vous. Ces désagréments ont parfois découragé des débutants ou certains pêcheurs plus aguerris voulant s’attaquer aux torpilles d’eaux courantes. Et quel dommage ! Cependant, il existe des adaptations qui pourraient faire changer d’avis à bien des rebutés.
L’idée de la pêche au cassant
Une technique que j’utilise sans modération, et bien connu de nombreux pêcheurs de rivière, n’est autre que le cassant. Simple et économique, cette méthode consiste à faire passer vos bannières au-dessus de l’eau jusqu’à une branche, un tronc, un pic ou autre, pouvant accueillir un système de renvoi surplombant le spot sur lequel vous souhaitez déposer votre montage. Le principal avantage de cette adaptation réside dans le fait que seule la tête de ligne trempe dans l’eau. On limite, par conséquent, les galères induites par les herbiers, les troncs d’arbres, et le courant qui, par les sédiments qu’il charrie, finit par créer des bannières aux « ventres bien remplis ». Un autre point positif est le respect des usagers nautiques de la rivière dans la limite des canoës, barques, float tube… Bien entendu la méthode reste inutilisable lorsque que la navigation de plus gros gabarit exploite le cours d’eau. De plus, si tout est bien réalisé, elle offre l’assurance d’un montage pêchant sur le long terme.
La partie technique du cassant
Mais revenons sur l’aspect technique du système, car j’entends déjà dire : « De quoi me parle t’il avec ses renvois, ses bannières au-dessus de l’eau, je ne comprends RIEN ! Et puis comment ça fonctionne ?». Que de questions sur lesquelles nous allons faire un bref passage en revue.
Le matériel (liste non exhaustive et adaptable selon les situations de pêche) :
- Votre canne habituelle.
- Un pic avant d’1m60 environ (sur lequel sera installé votre détecteur. Petit plus : si vous possédez un adaptateur orientable, ce sera encore mieux, j’expliquerai plus loin pourquoi.
- Un pic arrière d’environ 50cm.
- Une sardine avec cordage ou autre système d’attache (et oui, les cannes étant orientées de manière quasi verticale, un départ de l’une de nos sauvageonnes ne fera pas de détail).
- Un système de renvoi ou cassant: une pince à linge robuste avec un ressort à force de rappel suffisante.
- La majeure partie du temps : une embarcation.
Maintenant que la partie matériel est plus claire, passons à l’aspect installation. J’ai pour coutume d’installer mes pics avant de déposer le montage. En effet, une fois la dépose réalisée il sera difficile d’aller chercher dans un sac les pics, détecteurs, swingers… pendant que la canne est posée sur le sol et la bannière dans l’eau prenant le courant.
Le pic avant est positionné soit droit si j’ai un adaptateur de détecteur inclinable soit avec un angle d’environ 60° avec le sol. Pourquoi ? Car la canne sera positionnée de manière quasi « verticale » (une soixantaine de degrés par rapport au sol) et parfois, selon la marque de vos détecteurs, le fait d’incliner autant les cannes empêche le nylon ou la tresse de passer correctement dans la roulette de détection ce qui pourrait entraîner une touche silencieuse et souvent ratée. Je rappelle que ce système est censé apporter du confort. Le pic arrière se place à une quarantaine de centimètres en arrière de son homologue, avec un support si possible anti dérapant.
OK, on est prêt sur la berge, la canne est eschée, le petit seau qui contient l’amorçage est prêt, alors GO ! Et non, il reste encore notre cassant à préparer avant de l’emmener au-dessus du spot. Il existe une multitude de manières pour réaliser la clef de voûte de notre système. Personnellement, j’ai opté pour la plus simple et rapide à mettre en place selon moi, l’épingle à linge. A celle-ci, j’adapte un « cordage » avec de la ficelle, ou du nylon que je passe dans le centre de l’œillet du ressort de la pince avec un nœud solide. Je me retrouve donc avec une pince à linge munie d’un cordage quelconque, que je mets en attente dans ma poche. Cette fois on est prêt à partir sur l’eau, direction : le spot.
Une fois sur l’eau et au-dessus de mon spot, je cherche un arbre, une branche ou tout autre support surplombant la zone de pêche pour y attacher solidement le cordage de mon cassant (ou pince à linge), je ne saurais trop conseiller de la placer le plus haut possible pour des raisons évidentes. Dans la mesure du possible, j’essaie de trouver un point d’accroche un peu plus en amont du spot afin que ma tête de ligne soit alignée avec mon bas de ligne et qu’elle ne passe pas au-dessus de mon esche. Le cassant est maintenant posé, il reste donc de manière classique à déposer le montage. A la suite de la dépose, et c’est à cet instant que réside le réel intérêt de la méthode, il faut passer la tête de ligne dans l’épingle comme si l’on voulait accrocher son linge au détail près qu’il n’y a, ici, pas de linge. La tête de ligne pourra coulisser, malgré le fait qu’elle soit emprisonnée dans la pince. Le gros du travail est fait ! Il ne reste plus qu’à revenir sur son poste pour poser la canne sur ses supports préalablement installés pour l’occasion.
NB 1 : ne pas hésiter à serrer un peu le frein, pour qu’à la touche la tête de ligne se libère plus facilement de la pince à linge.
NB 2 : en revenant sur votre berge, si vous avez de la tresse en corps de ligne, pensez à bien garder la canne haute pour ne pas faire toucher la tresse dans l’eau. Cette dernière se gorgerait d’eau et il serait alors difficile de la garder au-dessus de la surface au moment d’installer votre canne sur les supports.
Le terme de cassant n’est pas totalement juste pour cette méthode, car la pince à linge reste sur son promontoire entre chaque touche. Mais la technique est applicable également avec un morceau de nylon de petit diamètre ou un élastique, remplaçant la pince à linge, qui casserait à chaque touche. Chacun peut et doit adapter sa technique selon les conditions.
Les imprévus
Au-delà de ses aspects avantageux, le cassant peut parfois vite se transformer en désagrément et pourrir nos espoirs. Le vent… Si les bannières ne sont pas dans l’eau, elles sont néanmoins soumises à un autre élément qui peut vite transformer le confort en cauchemar. En effet, nos « cordes à linge » une fois prises dans le vent entrainent bips intempestifs, majoration des bannières et autres joyeusetés. Les cassants sont généralement fixés sur les branches d’arbres elles-mêmes soumises au vent, le piège étant de retrouver son montage non pêchant entrainé par les branches ayant subi des bourrasques. Ma solution est d’utiliser des pierres pour faire office de plombs et je n’hésite pas à monter sur des pierres de 4 à 5kgs pour pallier au problème (les bas de ligne sont allongés pour l’occasion). Ces pierres apportent, en plus de tenir le fond, les bénéfices d’un coût mini et d’un auto ferrage plus qu’efficient.
Et si je n’ai pas d’arbre ou support au-dessus d’un spot qui m’intéresse ? Dans ce cas précis, il m’est arrivé de planter un pic de 2m avec une des fameuses pinces à linge au-dessus de mon spot. Tout revient à l’adaptation, même s’il est facilement concevable que tout n’est pas réalisable, il est souvent possible avec un peu de réflexion d’aller chercher des zones de pêche inexploitées.
Il arrive que les pinces à linge ne tiennent pas la tête de ligne suffisamment et que lors de votre retour sur la berge cette dernière se libère impliquant de réitérer l’opération. L’astuce permettant d’éviter ceci, m’a été donnée par un ami qui se reconnaitra sûrement à travers ces quelques lignes, elle consiste à enrouler un élastique autour de la pince pour augmenter la force de fermeture, ainsi il faut une force plus élevée pour décrocher la tête de ligne que nos furies favorites ne peineront pas à arracher.
Pour finir, il est possible qu’herbiers ou branches dérivant se prennent dans le si peu de bannière à l’eau. Dans ces situations, j’essaie de trouver des spots avec un élément protégeant ma bannière du courant et de ses débris. Essayez de trouver un arbre en amont, un haut fond ou une branche créant une zone de calme où les débris n’ont pas accès, ce qui confère une forme de protection à la bannière. Mais parfois, il n’y a pas le choix.
Pour conclure
Bien utilisée, une pince à linge dans votre boite de pêche peut vous éviter bien des arrachages de cheveux au bord de votre rivière favorite. Cette méthode n’est pas exhaustive mais reste une bonne base pour la pêche en eau courante souvent éprouvante. Elle n’est pas garante de la tranquillité ultime mais elle apporte ce petit confort en plus avec la quasi assurance d’un montage pêchant. Je vous invite à regarder une de mes réalisations vidéo, en lien sur cet article. Vous pourrez y visualiser les résultats apportés par cette technique puisque la totalité des poissons visibles sur ce clip ont été piégés avec le système décrit tout au long de ces quelques lignes. De plus, on y aperçoit brièvement sur certains plans un petit complément de mes explications, notamment sur le placement des cannes. Bon visionnage.