Le brochet aime quand ça secoue, mais n’aime pas les intrus. Bref, il n’aime pas laisser tranquille les jerkbaits… Un « jerkbait » oui, mais c’est quoi ? Quand on regarde les différents étals des magasins, une chose saute aux yeux : sous l’appellation « jerkbait », deux types de leurres totalement différents apparaissent.
D’un côté ceux ayant une bavette et ressemblant à un « minnow » et donc à un classique poisson nageur, et ceux qui nous intéressent ici, sans bavette et qu’il faut secouer pour les faire -bien- pêcher. Car, faut-il le préciser, « secouer » ou « tirer brusquement » en anglais c’est « to jerk »… Et vous verrez plus loin, un jerkbait au sens où nous l’entendons, n’a pas de bavette.
Vous me direz on peut très bien secouer ou tirer sur tous les leurres pour les faire se secouer et énerver les carnassiers (Le fameux « twitching »). Vous aurez raison mais autant un poisson nageur peut nager seul (il suffit de mouliner), autant avec un jerkbait c’est totalement inefficace… Et le jerkbait, question efficacité, c’est un missile !
Le jerkbait un leurre qui (se) secoue
Une secousse non, mais une grande tirée, oui ! Faite le comparatif au bord de l’eau : animez devant vous un jerkbait par petits coups de scion et comparez après lui avoir donnez une ample tirée. Vous verrez tout de suite quelle animation vous choisirez… Un jerkbait c’est ça : une grande tirée pour lui faire battre l’eau puis s’arrêter net au nez et à la barbe d’un brochet. Autant de choses qu’il aime. En effet, « fortes vibrations » + « arrêt » = « énervement » + « laps de temps pour attaquer ». Comme avec un concurrent sur son territoire. Et c’est pour cette raison que le jerkbait est aussi efficace : il combine agressivité et arrêts, soit les ingrédients principaux pour se faire rentrer dedans. Il vous faudra donc aussi veiller à votre ligne pendant ce temps d’arrêt et bien observer votre leurre, car les attaques ont principalement lieu à ce moment. Emotions garanties !
Cette capacité à se secouer autant est due à ses flancs totalement droits. On croirait une planche taillée en forme de poisson avec les arêtes ébavurées… Ces flancs permettent en effet à l’eau de comprimer le leurre pour lui donner cette nage agressive si plaisante aux yeux des brochets. Son lestage quant à lui est placé au plus bas, près de l’attache ventrale. Ainsi il coule également bien droit et est donc immédiatement prêt à partir à la moindre tirée : aucune perte de temps. Et en plus, un bon jerkbait bien équilibré file droit au lancer, un truc de plus dans son efficacité. Vous pouvez ainsi viser au plus juste sur chaque poste. Et en peignant un maximum de postes en un minimum de temps, (en « power fishing ») la précision, c’est primordial.
Stratégie d’attaque…
Le must pour ce type de leurre sont les plans d’eau et les rivières calmes, canaux compris. Ces derniers sont parfaits pour eux car peu profonds, d’un très faible courant et les carnassiers peuvent être partout. Pour commencer, c’est parfait.
Ainsi, descendre une rivière depuis une embarcation ou arpenter une gravière ou autre plan d’eau, c’est son boulot. Les queues de courants sont possibles également, mais avec un peu plus de maîtrise. Dans ce cas, sachez lui imprimer des tirées moins amples et, plus proches d’un « twitching », pour mieux contrôler votre bannière.
Vous pouvez trouver ce leurre dans de nombreuses versions et chez de nombreux fabricants. Certains flottent, d’autres coulent et d’autres encore sont « suspending »… Quant aux versions tropicalisées, c’est possible aussi ! D’ailleurs certaines versions sont vraiment coulantes, les fosses profondes sont alors accessibles avec ce leurre.
Comment et avec quoi l’utiliser ?
Si vous commencez avec eux, utilisez des jerkbait d’environ 30 à 50gr et augmentez progressivement. Les plus lourds sont bien entendu les plus délicats et fatigants à manier. Personnellement je ne les utilise pas très souvent mais à certains moments bien précis. Dans le cas de fosses profondes bien entendu, mais aussi quand je veux vraiment créer le plus d’ondes possibles (postes connus pour les belles pièces par exemple ou peu pêchés). J’utilise le plus souvent l’ancien Sébile Stick Shadd 155 SU en 65gr dont j’ai fait tout un stock en attendant que Patrick le commercialise de nouveau ! Parfait pour charger correctement une canne sans la faire plier excessivement. Il est légèrement coulant à l’animation et pêche correctement la grande majorité des postes en rivière. Vous pouvez le remplacer par son successeur en 114mm et 39gr qui, lui est coulant ou en 28gr suspending. Les plus grands modèles de jerkbait quant à eux, créent forcément plus de signaux par-rapport aux autres mais sont aussi assez délicats à lancer. A vous de choisir. Regardez du côté des Américains, vous verrez avec quoi ils pêchent le musky !… Plus proche de nous, vous pouvez regarder du côté de ces leurres :
Sébile Stick Shad 155 Salt and Sun, Savagear Deviator 16cm/68gr (coloris brochet), CWC X Buster 17cm/90gr, Zalt, Quantum Specialist Spooky Jerk, Salmo Fatso Sinking…
Ces leurres aiment être secoués, donc allez y ! Pour agréablement le faire, pensez aux golfeurs : de bons appuis, une canne pointée vers le bas et un geste sûr. Pointez votre canne à environ 45° en direction de la surface de l’eau et du leurre et prenez contact progressivement. L’idée est d’accélérer progressivement ce geste sur un bon mètre, comme si vous vouliez balancer votre leurre de l’autre côté. C’est cette accélération qui va donner toute sa puissance aux ondes que renverra le jerkbait. Vous allez sentir votre canne vibrer de plus en plus fort sous les coups de queue de votre leurre. Très bon signe ! Ne tirez pas trop loin non plus, car en cas d’attaque, vous n’aurez plus d’amplitude pour ferrer, pensez y. L’idéal étant de s’arrêter devant soi. Pour une bonne tenue de la canne, calez votre poignée de canne le long de votre avant bras, canne empoignée au dessus du moulinet. Vous avez ainsi toute la force nécessaire pour animer correctement votre petit sous-marin.
Parfois après ça ils continuent de nager seuls quelques instants. C’est assez impressionnant la première fois mais c’est la preuve que vous avez un bon modèle dans les mains… et que vous savez aussi l’animer correctement ! Sans faire de publicité, dirigez vous vers les modèles avec une face biseautée ou ayant vraiment une ressemblance flagrante avec une silhouette de poisson. Ils percent mieux l’eau et effectuent plus facilement ce petit mouvement.
Bien entendu vous pouvez lui donner de petits coups secs sur place également. J’utilise cette animation sur des postes bien marqués par contre, comme les souches, pontons et bateaux amarrés. Ceci dans l’unique but de les narguer les plus longtemps pour mieux les énerver. Au nez et à la barbe d’un bestiau muni de 700 dents… ça peut faire mal !
Le matériel pour pêcher le brochet au jerkbait
Question matos, pas de concession, il faut du costaud et du raide. Pas question de prendre une canne à lancer classique qui dilapidera l’énergie nécessaire à l’animation de tels leurres. Les cannes casting en 6 pieds environ par exemple sont tout à fait adaptées, notamment depuis une embarcation. Et quel confort ! Au dessus, 7 à 9 pieds, elles vous permettront de balancer votre leurre assez loin depuis la berge mais seront un peu plus délicates à utiliser. Une puissance d’environ 40 à 120 gr vous permettra d’utiliser toute la gamme en vente dans le commerce. Si l’achat d’un ensemble casting vous rebute, vous pouvez utiliser une canne mer/bateau pour la dandine de cuiller lourde par exemple. C’est moins confortable mais cela fait le boulot. Prêtez attention à prendre progressivement contact avec votre jerkbait à chaque tirée par contre, car le galet de pick-up d’un moulinet classique ne résistera pas longtemps aux grandes tirées.
Ne passez pas sur la tresse cependant, car sinon, c’est le seul moyen de dilapider votre énergie pendant l’animation. Une 50lbs n’est pas de trop, car les lancers répétés de tels leurres avec des animations aussi musclées auront raison d’une tresse trop fine. Je vous conseille la Power Pro en 32°/°° couleur rouge (53lbs/24kg). Dès qu’elle a un point de faiblesse la zone incriminée passe au blanc, signe de fatigue. Elle n’est franchement pas si chère que ça par rapport à ses concurrentes et fait très bien le travail ! Elle est bien ronde et ne perruque pas, un point extrêmement important ! Car à la vitesse à laquelle part ce leurre au lancer et avec l’énergie qu’il y emmagasine, peu de cannes résisteront au choc si une perruque est lancée à pleine vitesse dans vos anneaux…
Question bas de ligne, il faut aussi du raide. Vous avez le choix : gros fluorocarbone, titanium ou même corde à piano comme je l’ai déjà vu. De toute manière, vu la vitesse d’exécution pendant l’animation, le brochet n’a pas le temps de se poser de questions, il attaque par reflexe, 30cm suffisent.
Pour conclure, ces leurres sont véritablement destinés aux carnassiers et notamment au brochet. Ils répondent aux stimuli auxquels ils sont sensibles : fortes vibrations et nage agressive. Et si je n’avais que quelques leurres à prendre sur une île déserte, ils feraient forcément partie du voyage sans aucune hésitation… un signe !