Dans ce magnifique département tout est prétexte pour rejoindre le bord de l’eau. Le Doubs s’étale depuis la frontière franco-suisse et traverse le nord du département. Plus au centre le nom de rivières et de villes chantent agréablement à nos oreilles : la Loue, Goumois, Ornans, Morteau…Venez voir !
La Loue, la plus belle fille du Doubs
Après un voyage souterrain, la Loue s’assagit dans la traversée de Mouthier Haute Pierre. C’est là que j’ai rendez-vous avec Philippe Batlogg, guide de pêche amoureux de cette rivière qui reprend de belles couleurs. Ici la mouche est reine et les truites nous attendent. Il est vrai que cette rivière vit une période difficile notamment en 2010 avec un étiage très bas, mais depuis, la Loue se refait une santé. J’avoue pour avoir traîné les cuissardes dans de nombreux cours d’eau de l’hexagone qu’il s’agit très certainement, et sans superlatif exagéré, de la plus belle rivière de France.
Une eau vive si bien dépeinte par Léonce de Boisset dans ses écrits voici bientôt un siècle :
« Les gravières à ombres du Doubs sont uniques. Sur la Loue, elles se succèdent, tantôt sur une rive tantôt sur l’autre, immenses étendues de graviers fins où l’eau court uniforme, à peine agitée, de-ci de-là, de vaguelettes produites par une souche ou une pierre du fond. » Rien n’a changé. Ce parcours de rêve est une perle rare déposée dans l’écrin de la Franche Comté. Elle offre aux pêcheurs une excellente densité de truites et d’ombres communs de belles tailles.
Respirer
L’air est pur, vivifiant. Nous sommes en septembre, à 350 mètres d’altitude, sous les falaises de Haute-Pierre à Mouthier et il fait un temps magnifique. Les eaux calcaires et cristallines sont fraîches et bien oxygénées à 15 minutes de la source de la Loue. C’est bien d’une résurgence dont il s’agit puisqu’une grande partie de son alimentation provient de la rivière Doubs. La Loue est sa fille chante-t-on près du feu. Le soleil joue avec les reflets de l’eau qui glisse en cette fin d’été. Nos indispensables lunettes polarisantes nous facilitent la vue et nous distinguons parfaitement les truites qui filent à notre approche et quelques ombres qui se déplacent avec une majestueuse lenteur.
J’observe quelques éclosions de trichoptères et un premier gobage nous alerte. Philippe monte son fouet et prépare ses mouches fétiches. D’abord un sedge bien fourni qui flotte haut sur l’eau dans les courants. Il prévoit aussi une émergente d’un beau corps olive pour peigner les bordures. Enfin une nymphe, un ver d’eau au dos vert bronze et ventre rouge orangé. Un aimant à truites dans les calmes. L’eau est claire et nous pourrons attaquer les poissons à vue…
Pêcher
Pendant que nous pénétrons dans l’eau, Philippe me confie que la pêche ici est fabuleuse en raison de la basse température de l’eau. Le parcours se distingue par plusieurs pôles comme cet endroit calme et ensoleillé, pas très profond et plus bas, des parcours à fond de graviers bien exposés au soleil ou au contraire fortement encaissés. Les coups du soir sont exceptionnels quand les conditions sont réunies comme aujourd’hui. Le niveau est bas et Philippe pêchera en nymphe à vue, à la roulette. J’avoue préférer une sèche, bien présentée sur le museau de « Dame Fario ».
Je laisse Philippe mener notre pêche déambulatoire et effectivement les prises sont nombreuses, maillées entre 30 et 35 centimètres, dont quelques truites de 40… Mon guide est fier de me prouver que la Loue a retrouvé sa légende d’antan. La rivière est superbe, très accessible.
Chaque prise est remise méticuleusement à l’eau : « N’oubliez jamais, lorsque vous remettez un poisson à l’eau, que c’est l’avenir que vous préparez. »
Nous pêchons deux heures sur ce parcours de rêve puis Philippe m’invite à se déplacer avant la tombée de la nuit, plus en aval, vers Lods et Ornans. Voici encore un secteur réputé et les eaux bien oxygénées nous attirent. C’est certain, il y a des truites en pagaille. Sous le village, les deux déversoirs bouillonnent et nous apercevons quelques poissons sauter dans la mousse. Assis sur une pierre nous observons ce décor, un régal pour les yeux. Tous nos sens sont en alerte et nous en oublions de pêcher tant le spectacle est sublime.
La pêche en no-kill se poursuit tard le soir et nous terminons notre journée dans la traversée d’Ornans sous les yeux intéressés des badauds qui sortent du musée Gustave Courbet à quelques mètres de là. Le soir tombe et je dépose mes valises à l’hôtel de la Cascade.
Manger et dormir
Le célèbre Hôtel de la Cascade de Mouthier-Haute-Pierre est bien connu des pêcheurs. Cet établissement dispose de chambres permettant de profiter d’une magnifique vue plongeante sur les gorges de Nouailles. De votre balcon vous entendrez chanter la Loue. Le matin les nuages bas vous entourent et lorsque le soleil lentement perce le ciel cotonneux c’est alors que la montagne se révèle.
Amateurs de bonne chère, vous dégusterez au restaurant panoramique une cuisine inventive aux saveurs nouvelles, dont les produits régionaux. L’assiette est copieuse et le personnel aux petits soins. Au matin le petit déjeuner très riche est servi de bonne heure pour les pêcheurs qui font le coup du matin.
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Hôtel de la Cascade
4 Route des Gorges de Nouailles
25920 Mouthier-Haute-Pierre
Tel :.03 81 60 95 30
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Sortir
Le musée Gustave Courbet est situé sur la berge gauche de la Loue à Ornans. Ce célèbre peintre est né ici le 10 juin 1819 et la ville lui rend un hommage mérité qui vaut bien une visite. Les guides des lieux sont érudits et vous passerez un excellent moment en leur compagnie. Comptez environ deux heures pour découvrir toutes les facettes de ce site incontournable rénové récemment. Une surface quadruplée, une scénographie résolument moderne, une ouverture sur les paysages qui ont tant inspirés le maître du Réalisme. A voir absolument
Les corégones du lac de Remoray
La pêche du corégone est un savoir-faire et une histoire de patience, mais quelle pêche bizarre … « Le poisson que vous remettez à l’eau est un cadeau que vous faites à un autre pêcheur, tout comme il s’agit peut-être d’un cadeau qu’un autre pêcheur vous aura fait. » Ici cette phrase de Lee Wulff prend tout son sens.
Réveil aux aurores. Philippe m’a rejoint à Labergement-Sainte-Marie pour une pêche hors de l’ordinaire, celle du corégone au lac de Remoray, le frère siamois du lac de Saint-Point. C’est ici que l’on pêche les plus gros corégones et le lac détient le record de France (2.6 kg pour 60 cm).
Il est de bonne heure mais nous devons être en place assez tôt pour atteindre le milieu du lac, là où se trouvent les poissons, à près de 20 mètres de profondeur. Il est temps de se mettre en place. Très vite nous détachons la barque et à force de rames nous rejoignons le poste de pêche que connait très bien Philippe. Une petite inquiétude le perturbe néanmoins, un autre pêcheur a déjà loué une barque chez le détaillant, cela veut dire qu’il y a peut-être déjà quelqu’un sur son poste…Il peste en son fort intérieur, mais le lac est si grand. Nous atteignons le site et le soleil commence enfin à poindre. Vraiment il ne fait pas chaud sur l’eau et la polaire est bienvenue. J’apprécie la compagnie de Philippe et sa science de l’eau. Il me semble d’ailleurs que l’écho sondeur est là plus pour le fun que pour une réelle efficacité, puisque le corégone est souvent envasé, indétectable. Le matériel est assez simple, rudimentaire, mais reste néanmoins très spécifique. La canne (canin) mesure environ un mètre et est équipée d’un scion souple plein de 3 /10 gr. Deux autres brins plus rigides sont prêts à être emmanchés en cas de besoin.
Le blank de la canne est en carbone haut module et possède une superbe résonance permettant d’obtenir une détection optimale des touches. Ces cannes particulièrement légères, sont à la fois rapides et sensibles. Elles permettent une parfaite tenue du poisson dans toutes les conditions pour le ramener du fond vers la surface sans le décrocher ou lui arracher la bouche. Le moulinet est léger mais le ratio rapide et le nylon en 16/100 est équipée de 5 gambes portant des nymphes de chironomes.
Les imitations de larves pour pêcher le corégones au lac de Remoray sont rouges à têtes noires au printemps, en juin et juillet des chiros jaunes ou olives, et rouges ou noires en fin de saison. Au bout de la ligne, un plomb de 5 grammes qui doit s’enfouir dans la vase et former un léger nuage au moment où, par geste lent du scion, le pêcheur effectue une remontée de 20 à 30 centimètres pour simuler une éclosion. C’est généralement à ce moment précis que le poisson prendra l’une des nymphes noyées dans le nuage. Souvent la dernière, en bout de ligne. Il faut être rapide sans être brusque. La difficulté est de sentir la touche, très subtile, à moins 18 mètres. Ceci n’empêche pas des bancs de passer sous la barque à des différentes hauteurs. Dans ce cas, Philippe utilise un flotteur qui indiquera la touche en se couchant sur l’eau. Le corégone, au lieu de fuir au large, remonte vers la surface lorsqu’il est ferré. C’est pour cette raison que l’on en perd plus que l’on en prend… Bon à savoir ! Nous pêchons sous le scion, et après l’excitation de la mise en place, l’attente est longue, ponctuée de réflexions sur la pêche dans le secteur. J’ai repéré quelques postes en bordure qui mériteraient un coup de canne pour prendre les poissons blancs, mais le parking, trop éloigné nécessite l’utilisation d’un chariot que je n’ai pas ici. Dommage ! Par contre, pour une pêche légère à l’anglaise je suis certain qu’il y a ici le record de France de la tanche. J’ai vu des spécimens qui ne font pas rire… trois à quatre kilos, sinon plus, c’est certain. A envisager un jour prochain. Après trois heures de patience, la pêche se résume à une seule belle prise, mais le temps n’est pas vraiment favorable à cette pêche bien particulière.
Si j’en crois Philippe qui observe le ciel et le sommet de Métabief, cela devrait être meilleur après-demain matin. Je veux bien le croire, mes expériences préalables m’ont conforté dans la confiance qu’il faut donner aux pêcheurs du terroir. Ils savent. Nous rejoignons la rive et nous nous quittons, nous promettant de pêcher à nouveau ensemble dans un proche avenir. Je rejoins mon hôtel, l’auberge du Coude, car j’ai bien l’intention de visiter la maison de la réserve en début d’après-midi. Ensuite séance photos des environs. Les couleurs sont belles, le charme des reliefs vaut quelques clichés et le pittoresque des vieilles demeures me pousse à visiter le secteur pour immortaliser ces panoramas dans mon livre aux souvenirs et ainsi vous les faire partager.
Manger et dormir
L’auberge du Coude à Labergement-Sainte-Marie est une halte obligée. Qui n’a jamais mangé la célèbre fricassée de cuisses de grenouilles préparée par Michèle Letoublon n’a jamais connu l’extase de la bonne table. Quel que soit le plat, tout est dans le goût, le plaisir du palais, l’envolée des papilles. Il y a quantité et qualité ; alternatives culinaires rarement compatibles sauf ici. Les chambres sont sobres, apaisantes bien isolées du bruit. Les meubles cirés sont lourds, comme aimait menuiser autrefois l’artisan du village. Cela sent bon le propre, le sapin, le verbe d’antan. La nuit est réparatrice et le petit déjeuner a l’odeur du café maison, du pain frais, de la brioche, du miel et de la confiture de framboise. Tout un programme.
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L’auberge du Coude
1 Rue du Coude
25160 Labergement Sainte Marie
03 81 69 31 57
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S’organiser et découvrir
Hôtel de la Cascade
4 Route des Gorges de Nouailles
25920 Mouthier-Haute-Pierre
Tel :.03 81 60 95 30
Philippe Batlogg guide de pêche
Tel:. 06.71.66.36.99
Fédération de pêche du Doubs
4 Rue du Dr André Morel
25720 BEURE
Tél :03 81 41 19 09
www.federation-peche-doubs.org
Maison Nationale de l’Eau et de la Pêche
36, rue Saint-Laurent
25290 ORNANS
Tél:. 03 81 57 14 49
Musée Gustave Courbet
1 Place Robert Fernier, 25290 Ornans
Téléphone :03 81 86 22 88
Maison de la réserve
28 Rue de Mouthe,
25160 Labergement-Sainte-Marie
Tél :. 03 81 69 35 99
Location de barques, lac de Remoray
Tabac presse
1 Grande Rue
25160 LABERGEMENT SAINTE-MARIE
Tél. : 03 81 49 56 22
Office de Tourisme de Malbuisson les Lacs
69 Grande Rue
25160 MALBUISSON
Tél. : 03 81 69 31 21
Doubs Tourisme
18 rue de la Préfecture
25031 Besançon cedex
Tél. : (+33) 0 381 212 999
Email : cdt@doubs.com
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Le saviez-vous ?
- Si un Suisse vous parle de cochon au nez blanc, il s’agit de l’ombre commun qui « fouille du museau » le fond de la Loue. Ceci explique pourquoi il a le nez blanc.
- Le débit normal de la Loue est de 15 m² seconde au printemps, 4 m² en période d’étiage mais lors des crues, entre Noël et le Nouvel an, son débit peut atteindre 170m²…
- Autrefois la rivière s’appelait « la Louve » car indomptable comme cet animal sauvage. Puis au fil du temps elle s’assagit pour devenir la Loue.
- Truite record : Bruno Andreani et Laurent Descourvières ont tiré sur ce parcours en juillet 2015 une truite de 1,05 m, pour un poids de 14,5 kg et une circonférence de 60 cm !
- Le corégone se nomme différemment suivant les régions : il est appelé « palée » dans les lacs suisses, « lavaret » dans le lac du Bourget, « féra » dans le lac Léman.
- Le corégone vit en banc et lorsqu’il est adulte, il peut atteindre des poids de 2 à 3 kg pour une taille de 60 à 80 cm. Lorsque vient le moment de la reproduction, le corégone rejoint, entre décembre et janvier, ses frayères situées à proximité de la rive, pour pondre sur les fonds tapissés de graviers
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Remerciements
Nous tenons à remercier chaleureusement Sylviane Dornier de « Doubs Tourisme » ainsi que tous les acteurs, pêcheurs, guides et hôteliers qui ont savamment mis au point le programme ce séjour.
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