Pour bon nombre de pêcheurs de carnassiers la saison hivernale est très attendue. En effet, les brochets, sandres et perches se reproduisent de la fin de l’hiver jusqu’au début du printemps selon les espèces. Ils ont donc besoin d’emmagasiner des graisses pour le bon développement des ovocytes. Lorsque les températures extérieures descendent en dessous de 0°c, généralement à partir de mi-novembre, la température de l’eau chute relativement vite et descend sous les 10°c. A cette période, l’oxygène dissout se retrouve de façon homogène sur toute la couche d’eau. Les carnassiers vont alors changer de comportement et se positionner dans les zones plus profondes où ils trouveront leur optimum thermique. En parallèle le poisson fourrage va se regrouper en formant des boules entre deux eaux. Les carnassiers ne sont jamais très loin !
Qui dit eau froide dit forcément moins d’activité. Malgré leur besoin en nourriture, les carnassiers ne se nourrissent pas en permanence. Plus l’eau est froide, plus la digestion est lente. Il va donc y avoir de cours moments très actifs et des moments de repos pouvant atteindre plusieurs jours. On peut tomber sur une période de frénésie avec 10 ou 20 touches sur des créneaux de 2 ou 3 heures aux moments les plus chauds de la journée (11h00 – 15h00) et revenir le lendemain sans voir le moindre poisson.
Lorsque l’on arrive sur un lac avec des conditions hivernales difficiles la pêche n’est jamais gagnée d’avance. Je vais vous expliquer comment j’aborde une journée de pêche du sandre sur un lac de plateau de type Vassivière, Neuvic ou Marcillac la Croisille que je pratique régulièrement.
En arrivant sur les lieux, il faut prendre un maximum d’informations : la couleur de l’eau, la luminosité, la température de l’air et la force du vent. Ces éléments vont nous donner une idée des techniques que l’on va pouvoir utiliser. Par exemple, si le vent est fort ou si la température de l’air est de -5°c il est évident que la pêche en linéaire sera beaucoup plus compliquée. Dans le 1er cas on distinguera les touches difficilement et dans l’autre la tresse gèlera dans les anneaux de la canne, une pêche en verticale sera plus adaptée.
Ensuite, une fois sur l’eau, il faut prendre en compte les informations du sondeur. Personnellement je regarde la température de l’eau et surtout la profondeur des différents échos qui apparaissent sur l’écran. Pour cela, je navigue sur différents post pour avoir une idée globale de la position des poissons fourrages et des échos plus gros s’il y en a. Cela prend quelques minutes mais c’est très important. En fonction des indices sur sondeur, je peux sortir quelques leurres qui me permettront de prospecter les zones intéressantes de différentes manières. Je prépare des shad de 5 et 6’’ (l’hiver les sandres attaquent facilement des shad un peu plus gros), une lame vibrante, un lipless et un leurre à jigger.
Généralement, je commence au leurre souple en linéaire. J’utilise principalement le spoon tail shad ou le spoon tail live roll en 6’’ de chez Nories monté en 7 ou 10g. J’emploie une tête plombée texan dans les zones encombrées ou une tête classique en rajoutant un triple voleur dans les zones de plage.
Le but est de trouver la bonne profondeur. Je positionne le bateau en fonction des informations que m’a donné le sondeur lors de ma prospection rapide. Si les boules de fourrages évoluent entre 6 et 10 mètres de profondeur je suppose que les sandres peuvent se trouver juste en dessous. Ma profondeur de pêche variera alors entre 10 et 12 mètres. Je positionne alors le bateau dans 14 ou 15 mètres et lance en direction de la rive en effectuant des animations lentes en dents de scie. J’anime mon leurre uniquement avec mon moulinet, je fais 2 ou 3 tours de manivelle et le laisse retomber au fond tout en gardant contact avec mon shad. C’est très important car les touches interviennent 9 fois sur 10 à la descente. Cependant, il est conseillé d’alterner la vitesse de récupération. La canne, positionnée à 45° ne doit quasiment pas bouger afin d’optimiser le ferrage. Ainsi je prospecte une zone assez large de 6 à 12 mètres (schéma vue de dessus).
J’insiste un petit peu sur la zone en effectuant une dérive lente face au vent en attente d’une touche. Si elle n’arrive pas je change la couleur du shad puis de leurre si toujours pas de résultat. Dans ce cas, ne pas hésiter à passer sur un vibration. Une lame vibrante ou un lipless (non bruiteur) peut déclencher l’attaque d’un sandre inactif.
Lorsque la touche intervient, il est important de se rappeler à quel moment elle a eu lieux. Si c’est pendant une phase rapide ou lente, si c’est pendant une phase descendante ou montante ou même parfois lorsque le leurre est posé au fond. Ça c’était la première chose importante, la deuxième est de bien visualiser la façon dont est piqué le poisson. Si l’hameçon est planté juste au bord de la mâchoire ou même à l’extérieur c’est que le sandre n’y est pas allé franco. Il a pu attaquer simplement par agressivité ou alors le leurre ne lui plaisait pas totalement. Si en revanche il est bien planté dans la gueule du sandre c’est qu’il avait bien l’intention de s’en nourrir.
Dans ce cas je pense avoir trouvé une solution et essaie de répéter au maximum mon animation avec le leurre payant. Lorsque les carnassiers sont en chassent on peut avoir un festival de touches !
La prospection en linéaire est selon moi la méthode la plus rapide et la plus efficace. Néanmoins, certains jours, cette technique ne rapporte rien où quelques « micro-touches » inferrables. De plus, comme cité auparavant, les conditions météorologiques ne permettent pas toujours de pratiquer ainsi.
Dans ce cas, je change de stratégie et passe sur une technique plus lente : la verticale. L’objectif est de déclencher un poisson apathique en lui proposant un leurre à portée de gueule. L’usage du sondeur va une fois de plus être important voire indispensable. En effet, il va falloir trouver ces satanés sandres ! Pour cela je vais chercher des zones propices aux percidés. Tout ce que je trouve de différent de la morphologie générale du lac peut être un poste : un haut-fond, une pointe rocheuse ou sableuse, un lit de cours d’eau, des bois morts, des murets,… Toutes les structures sont susceptibles d’accueillir des poissons, encore faut-il qu’elles soient habitées. La technologie actuelle des sondeurs permet de repérer rapidement ce que l’on cherche notamment grâce au structure scan compléter du down scan et de la vue primaire. Le GPS permettra ensuite de matérialiser les structures sous forme de WayPoint. Cela permet de bien prospecter la zone et de pouvoir y revenir plus tard.
La dérive va être complètement différente. Il va falloir zigzaguer au milieu des structures pour trouver la profondeur des poissons.
Ma vitesse de dérive oscille entre 0,3 et 1 km/h. Après avoir eu la première touche je resserre ma dérive au niveau de la profondeur trouvée. Les shad, les finess et les slug sont parfaits pour cette technique. Les animations consistent à décoller le leurre du fond de 20 à 40 cm de le bloquer en haut quelques secondes puis de le laisser redescendre très lentement en reprenant contact avec le fond. Comme en linéaire, les touches interviennent sur la phase descendante ou parfois posé au fond. Petite astuce, je laisse régulièrement mon leurre quelques secondes sur le fond toujours tresse tendue, au moindre ressenti dans la canne il faut ferrer. Il est indispensable d’être en contact permanent avec son leurre. J’utilise des têtes plombées légèrement plus lourde (10 à 14g). Lorsque j’effectue des dérives plus rapides (autour de 1 km/h) mon montage n’est plus à l’aplomb du bateau mais se retrouve à l’arrière on parle alors de pêche en diagonale. Cette pratique permet une nage un peu plus planante du leurre, elle est parfois redoutable.
La pêche du sandre est vraiment celle que j’affectionne le plus, les touches à « m’arracher la canne des mains » sont un pur bonheur ! Ces poissons sont tellement lunatiques qu’ils nous remettent en question à chaque sortie. En Corrèze la pêche du sandre ferme le deuxième dimanche de mars, je m’y consacre donc exclusivement après la fermeture du brochet. J’espère que cet article vous a plu et qu’il vous aidera à traquer ces poissons aussi fantastiques que mystérieux.
[author title= »Charlie Touche » image= »https://1max2peche.fr/wp-content/uploads/2017/02/Charlie-Touche.jpg »]Guide de pêche – Vice champion de France Challenger bateau – Corrèze (19) [/author]