On voit fleurir en ce moment de multiples demandes et volontés d’un débat public entre des pêcheurs et les associations animalistes – et non écologistes – dont émanent les récentes propositions (actuellement non mises en place, rappelons-le) d’interdiction de pêche au vif et d’utilisation d’hameçon avec ardillon.
Le débat est essentiel dans une démocratie et la pêche n’a aucune raison d’échapper aux questionnements récents de la société. Cependant, il nous semble important de rappeler les méthodes employées jusque ici par les associations animalistes pour faire « avancer la cause animale », appliquée au monde halieutique. Vous trouverez à la fin de cette publication l’ensemble des sources utilisées dans le texte, numérotées.
Premières bandrilles plantées en 2018
Le lancement d’une campagne d’affichage dans le métro parisien et sur les réseaux sociaux, par l’association « Paris Animaux Zoopolis », demandant l’interdiction de la pêche à Paris. Aucune structure (AAPPMA/Fédération) n’a préalablement été contactée par l’association, jusqu’alors méconnue. Le principal argument étant que la consommation du poisson étant interdite à Paris, la pêche est alors « inutile ».
Sur ces affiches (sur lesquelles on voit pêle-mêle des truites, des ides mélanotes, des poissons marins, etc…), on peut voir plusieurs références scientifiques arguant le traumatisme important causé par la pêche, et que l’existence d’une souffrance consciente (concept déjà flou) chez les poissons est un consensus scientifique. Or, il s’avère que non seulement certains de ces travaux n’ont rien à voir avec le sujet évoqué, mais qu’une rapide vérification de la bibliographie montre que le sujet ne fait pas consensus et le débat reste ouvert actuellement.
Exemple de déformations de travaux scientifiques
Aspect non consensuel de la nociception chez les poissons
Voir ce thread de discussion entre scientifiques : https://www.wellbeingintlstudiesrepository.org/animsent/vol1/iss3/1/
Et quelques références sur le sujet :
- https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/faf.12010
- https://link.springer.com/article/10.1007/s11098-018-1133-4
Exemple de travaux des principaux auteurs défendant l’existence d’une douleur consciente chez les poissons :
- https://academic.oup.com/ilarjournal/article/50/4/338/868660?login=true
- https://eeb.tamu.edu/files/2018/11/Braithwaite_2004.pdf
Réflexion générale sur la douleur consciente : https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=2748209768750386&id=100006841682653&__cft__[0]=AZV7SlSIaEr5Z5atDpiYSnTB5MauQWUcrxWgxa1XdZDA6iM-njWOWRLo4Q97L4ZhYJ9U4qIPwXMWE61GXqUz_O7OvrmKl-Cs2qzF1oVqAUT2rX8WWfY53ikj8WnPwoqRS-0&__tn__=%2CO%2CP-R
Cette campagne est d’ailleurs accompagnée d’un vœu porté à la mairie de Paris par la voix de Danielle Simonnet, députée « Parti de Gauche », et qui fut la cible de nombreuses insultes de la part de pêcheurs.
Lors des délibérations du conseil de Paris (qui aboutira au rejet de cette demande), Mme Simonnet évoquera que même s’il elle fut à l’écoute des « défenseurs de la pêche no-kill », elle maintenait sa position car « nombre de poissons meurent quelques jours après avoir été pêchés ». Notons aussi que la moitié de son temps de parole fut consacré à décrire les insultes qu’elle avait reçu dans cette vidéo.
Aucune source n’est donnée pour la mortalité après remise à l’eau. La review la plus complète à ce jour (Bartholomew & Bonshack, 2005) mentionne une valeur « médiane » de mortalité à 11% (rang : 0-95%), incluant 274 cas d’études. Notons que cette review a déjà 15 ans, se base sur des travaux plus anciens et qu’elle inclut des techniques n’ayant pas pour vocation la remise à l’eau du poisson (dispositifs passifs, pêche en grande profondeur, etc).
Votre serviteur avait par ailleurs essayé « d’argumenter » sous la vidéo de la campagne en question. La photo de cette publication est une capture d’écran de la « réponse » reçue. J’ai par ailleurs été banni de la page de Zoopolis.
Le coup de bambou de 2021 !
Des vœux sont formulés et retenus par les mairies de Paris et Grenoble, demandant l’interdiction de la pêche au vif et de l’utilisation d’hameçon avec ardillon. Un élu animaliste de Montpellier, Mr Eddine Ariztegui, a récemment déclaré qu’il formulerait un vœu similaire en mars prochain au conseil de ladite ville. À Bordeaux, la mairie a brutalement conditionné le renouvellement du droit de pêche sur le lac de la commune (interdiction de la pêche au vif, des empoissonnements, et exclusion définitive des possibilités de pratiquer en float-tube).
Ces vœux ont été formulés, encore une fois, sans aucune concertation avec les structures représentatives des pêcheurs, qui n’en ont eu vent qu’à la lecture des programmes des conseils municipaux concernés (soit moins d’une semaine avant leur délibération). Notons cependant que Mr Ariztegui dit travailler « avec une association de pêche qui est constructive pour interdire cette pratique à Montpellier. » en se gardant bien de dire laquelle… https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/herault/montpellier/montpellier-apres-l-arret-de-la-chasse-vers-une-interdiction-de-la-peche-au-vif-1960726.html
Un fois ces vœux adoptés par les Mairies concernées, Paris Animaux Zoopolis s’est empressé de communiquer sur les réseaux sociaux que les interdictions évoquées étaient effectives , relayé par certains journaux (le titre de l’article du Parisien a été changé depuis). L’Association 30 millions d’amis associe même la pêche au vif à l’utilisation de « grenouilles, canetons, rats » . Enfin, Mr, élu de Montpellier, explique bien que « l’activité de pêche même dite de No-Kill génère de grandes souffrances, donc nous ne sommes pas favorables à la pêche en générale. » .
On passera rapidement sur le fait que convaincre les animalistes via des arguments techniques est vain, étant donné que leur démarche est uniquement basée sur un ressenti subjectif et consiste à généraliser un rapport au vivant qui leur est propre.
Mais au regard de tous ces faits, est il vraisemblable, pour vous, qu’il existe la moindre bienveillance de cette mouvance politique à l’égard du monde halieutique ?
Pensez vous réellement sincères les demandes de débats publics formulées auprès d’inconnus que l’on souhaiterait donner comme « représentatifs des pêcheurs de France » ? Quand on voit la diversité d’avis et de pratique parmi les 1,4 millions de pêcheurs que nous sommes, comment un ou deux d’entre nous pourrions représenter fidèlement tous les praticiens de notre pays ?
Pourquoi ces questionnements de société sur la pêche de loisir n’ont pas pris la forme d’un débat public avec les instances officielles que sont les Fédérations Départementales et la Fédération Nationale ? En effet, « quel dommage ! »