S’il est un poisson fabuleux à suivre dans son évolution de tenue, en profondeurs et en postes selon les saisons, c’est bien le brochet. Poisson doté d’un sens inné pour se placer exactement à l’endroit où il fera « ripaille » sans être détectable et se mettre en danger vis à vis de ses prédateurs.
Depuis que nous le traquons, nous sommes toujours étonnés par sa capacité à nous surprendre. Il faut dire que sur le lac Léman où nous pratiquons assidûment depuis plus de 30 ans, il a le don pour se faire discret plusieurs mois puis il apparaît comme abondant pendant certaines périodes. C’est à rendre fou de nombreux pêcheurs même les plus chevronnés ! En fait, l’explication est simple, c’est sa localisation « profondeur / poste » qui est la clé des pêches « régulières » si nous pouvons nous exprimer ainsi.
La localisation
Selon les saisons, c’est la zone qui est définie par les critères suivants : morphologie, profondeur, encombrement, nourriture, courant, vent, exposition, oxygène, température. Tous ces paramètres doivent être étudiés pour comprendre sa position exacte et ainsi tenter de le capturer dans ses temps d’activité alimentaire.
La morphologie
C’est l’aspect global du poste qui compte le plus dans cette démarche car c’est lui qui retiendra les poissons quel que soit la saison. Il doit rassembler une zone peu profonde avec une cassure présentant une structuration différente sur sa longueur, une zone « refuge » matérialisée par un abri qui peut être un bloc, une branche, une souche, un herbier, une anfractuosité sur la cassure, en clair une structure naturelle ou artificielle comme une bouée, un ponton, un bateau… Il est à proximité d’une arrivée d’eau ou d’un courant formé, source importante de régulation thermique et d’oxygène au gré des saisons et qui permet de maintenir sur place des poissons de fourrage.
La cassure est vraiment l’élément primordial du poste car un pourcentage élevé de sa pente est un atout non négligeable pour que le poisson puisse rester dans l’ombre certaines heures des journées chaudes et à l’inverse, un faible pourcentage peut lui offrir un moment de chaleur intéressant durant les périodes froides de la journée. A nous de choisir la bonne zone sur les différentes saisons en tenant compte de ce que nous venons d’expliquer précédemment.
Les profondeurs
Capitales pour le poisson suivant sa période de présence sur un poste donné, elles sont l’un des facteurs les plus importants à comprendre pour le localiser. Faibles au printemps et au début de l’automne, importantes en été comme au début de l’hiver, elles sont le moyen de régulation de la thermie pour le brochet mais aussi d’un maintien du taux d’oxygène nécessaire à sa vie de tous les jours sur des cycles de repos comme d’activités de chasse.
La profondeur est, dans le cas des grands lacs, une source de protection contre la lumière et de confort thermique pour le brochet durant l’été pour ne citer que cette saison. Il en va de même pour de nombreux étangs et fleuves où il nous faut trouver la profondeur de confort estival du brochet. Dans ces derniers milieux, ce sont les fosses que nous chercherons en premier.
L’encombrement
L’encombrement ou plutôt nous parlerons de la présence de structures qui peuvent fixer un temps le brochet sur la zone, pour son repos ou pour son garde-manger. Contrairement aux idées reçues, nul besoin d’une abondance de structures naturelles comme des champs d’herbiers ou encore de souches ; juste un rocher de 50cm de haut peut suffire au milieu d’un plateau de 5000m2. Celui-ci sera un atout pour se dissimuler aux yeux de ses proies comme de ses prédateurs mais aussi de se protéger des forts ensoleillements en périodes estivales ou hivernales.
La nourriture
Paramètre indispensable à la localisation du brochet, elle est souvent mal exploitée par les pêcheurs. Avoir d’énormes ou à l’inverse de petits bancs de proies n’expliquent pas à eux seuls sa présence ou son absence. Il n’est pas rare de remarquer sur l’année que le brochet se fixe plus facilement sur une seule espèce de proie voire deux, le tout est de pouvoir identifier la taille et la variété – gardons, perches, brèmes, carpeaux, ablettes, corégones… Dès lors, il ne suffit plus qu’à adapter la forme, la taille et la couleur du leurre pour pêcher !
Il est d’ailleurs très fréquent de constater que trouver les bancs de fourrage permet de trouver les carnassiers mais le brochet n’est pas dans la même posture de prédation que les autres poissons. Lorsqu’il est dans les bancs, il est bien plus difficile à localiser et à prendre aux leurres alors que dès qu’il se situe sur l’extérieur voire même à plusieurs dizaines de mètres, celui-ci réagit bien mieux à nos leurres.
Le courant
Si dans les milieux « vivants » tels que les fleuves et rivières, le courant est plutôt un paramètre assez banal, il revêt en lac une importance si grande que ne pas en tenir compte serait une erreur terrible ; au point de rater la localisation des brochets et donc sa pêche. Le courant, en dehors du fait qu’il est un chemin pour l’oxygène et pour assurer un confort thermique, est l’élément qui permet au fourrage de se déplacer sans effort et donc potentiellement un axe nutritionnel sans pareil pour nos brochets. Ils l’ont bien compris, je vous l’assure et sont toujours à proximité de celui-ci pour « cueillir » au moment opportun un proie esseulée du groupe. Dans les lacs, la formation des courants se fait selon la morphologie des postes mais aussi de par la présence d’entrées d’eau. Trop peu de pêcheurs pensent aux vents et pourtant, ce sont eux qui en produisent le plus et c’est pourquoi l’exposition du poste aux vents est capitale.
Les vents
Leur impact est connu mais attention, dire que le vent est bon pour les pêches du brochet ce n’est pas toujours exact, bien au contraire. La force du vent et son orientation sont deux données à ne pas négliger. Regardons d’abord l’orientation ; si nous sommes sur des périodes froides, les vents du Sud et d’Ouest seront bons sur les eaux froides et à l’inverse si nous sommes en périodes chaudes, les vents du Nord et d’Est seront plus intéressants. Les zones de présence du brochet sont alors liées à cette orientation et c’est la donnée « force » qui va permettre de trancher pour choisir les zones. Nous pouvons facilement déduire que les vents supérieurs à 30km/h sont sans intérêt et qu’ils nous pénalisent trop dans l’approche du poste et les pêches à pratiquer. Le seul vrai avantage aux grands vents c’est d’augmenter l’oxygénation des zones sur les premiers mètres de profondeur et donc de ramener les poissons en bordure !
L’oxygène
C’est un critère à ne pas négliger dans notre prospection car son taux varie vraiment d’une zone à l’autre selon les heures de la journée et selon la présence ou non d’herbiers. Le brochet est un « gros » consommateur d’oxygène, il choisit où se positionner sur ses zones de chasse en fonction du taux d’oxygène. Si le taux est élevé, il aura la capacité de chasser longtemps et c’est un réel avantage pour nous.
Pour avoir une idée correcte de la présence d’oxygène sur une zone, il faut regarder si celle-ci présente une arrivée d’eau, de surface ou souterraine, ou encore un courant, un plateau d’herbiers ou bien entendu si le vent est fréquent sur cette partie-là du milieu. Si la zone regroupe les quatre, c’est l’idéal.
La température
C’est le confort ultime du poisson, si la température est trop basse, moins de 12°C, ou trop élevée, plus de 24°C, celui-ci se mettra en quête d’une température adéquate. La plus adaptée pour la nutrition du brochet est 19°C avec un écart type de ± 3°C. Nous devons alors trouver des zones de pêche qui possèdent des températures entre 16 à 22°C pour bien localiser nos poissons actifs.
En conclusion
Localiser le brochet est une démarche plus scientifique qu’il n’y paraît et bien connaître ce poisson, ses habitudes de vie, sa physiologie et son comportement comme expliqué ci-dessus permet de mieux le pêcher tout au long de l’année.