La vidange du lac de Guerlédan

Depuis le 1er mars 2015 le lac de Guerlédan a baissé jusqu’à atteindre son niveau le plus bas depuis 30 ans, et il faudra en profiter car cette vidange sera la dernière occasion de voir le fond du lac. Au delà du côté spectaculaire de cet événement il y a aussi des enjeux majeurs liés à la sécurité, la gestion de la ressource en eau, l’environnement et la biodiversité.

Quand on évoque la vidange d’un barrage ou tout autre plan d’eau, la première question qui vient en tête est « mais que va-t-il se passer pour les poissons ? », en tant que pêcheur c’est normal mais il y a aussi d’autres enjeux tout aussi importants à prendre en considération.

Vidange du lac de Guerlédan
Le lac dévoile ses secrets

Une vidange oui, mais pourquoi faire ?

Un peu d’histoire et quelques chiffres pour commencer. Construit sur le lit du Blavet, le lac de Guerlédan a été créé en 1930 après les 7 ans de travaux nécessaires pour construire ce barrage haut de 45m (plus de 54m si l’on compte les fondations) et long de 206m. Large de 1.5m à son sommet et de 34 m à sa base, il ne retient pas moins de 55 millions de m3 répartis sur plus de 300ha, soit la plus grande retenue d’eau en Bretagne. La production de ce barrage hydroélectrique représente l’équivalent de la consommation d’une ville de 15000 habitants.

Alors pourquoi cette vidange ? Tout simplement pour des raisons de sécurité. En 1985, 10 mois de travaux dont 2 mois d’assec avaient permis un examen technique complet et des travaux sur la vanne de vue. En 2015 ce sera 8 mois de travaux et 6 mois d’assec afin de permettre la rénovation des vannes de fond et des travaux sur le parement habituellement immergé (côté lac). Il est également prévu la pose d’un batardeau immergé afin de permettre des interventions futures sur les vannes de fond sans devoir faire une vidange.

Dès le 1er mars le niveau d’eau va commencer à baisser grâce aux turbines qui pourront continuer à produire de l’électricité. Jusqu’en avril cet abaissement devrait être de l’ordre de 10cm par heure en moyenne. Puis, une fois le niveau des turbines dépassé, les vannes seront ouvertes et la vidange, à raison d’un maximum de 10cm par heure, se poursuivra durant 20 à 30 jours jusqu’à retrouver le débit historique du Blavet. Ces chiffres sont susceptibles de varier en fonction des aléas climatiques.

Vidange du lac de Guerlédan
Quelques vestiges de la vallée
Vidange du lac de Guerlédan
Une bouche de mine et atelier de taille

Une préparation de longue haleine

Il va de soi qu’un projet comme celui-ci ne se prépare pas du jour au lendemain. Depuis plus de 18  mois ce sont plus d’une centaine de réunions ayant rassemblé plus de 20 entités, aussi bien des administrations publiques que des organisations  privées. Tous ces temps avaient une thématique commune : les 4 enjeux majeurs liés à cet événement, la sécurité, la communication, l’alimentation en eau et la protection de l’environnement et de la biodiversité. Quelques 350 personnes se sont d’ailleurs rendues à l’ultime réunion publique qui s’est tenue le 30 janvier dernier à Mur-de-Bretagne pour avoir les dernières informations.

La sécurité sur site pendant et après la baisse du niveau est une préoccupation majeure. EDF investi plus de 4 millions d’Euros et des moyens humains considérables pour les travaux et une équipe sera présente en permanence sur site afin de veiller à tout problème éventuel. La qualité de l’eau aussi bien en amont qu’en aval du barrage sera surveillée 24h/24h par 6 stations de prélèvement dont 2 automatisées. Au-delà des questions de protection de l’environnement, le cours du Blavet dessert le département en eau potable et de nombreux acteurs économiques (industries, agriculteurs…) en sont dépendants. De multiples mesures ont donc été prises afin que tout se passe dans les meilleures conditions grâce à un réaménagement du réseau du transport d’eau potable, et le lancement d’une nouvelle station de traitement des eaux spécialisée dans les eaux chargées en matière organique…Reste que, si l’été s’avère particulièrement sec combiné au fait que le débit minimum garanti n’étant plus assuré, d’éventuels problèmes d’approvisionnement en eau potable pourraient apparaître. Dans ce cas, un dispositif « sècheresse renforcée » serait déclenché. Le système habituel d’alerte a été renforcé et au moindre problème EDF, la Direction Départemental de la Protection des Populations, la Direction Départementale des territoires  et de la mer, Le Syndicat de l’eau, les Fédérations de Pêche…seront immédiatement prévenus afin de décider des mesures à prendre en termes de communication, d’intervention et de régulation.

Vidange du lac de Guerlédan
Préparation de la réunion publique du 30 janvier
Vidange du lac de Guerlédan
Carte des aménagements de circulation

Mais les poissons dans tout ça ?

Lors de la vidange de 1985, 18 tonnes de poissons on été récupérés, 9t de brèmes, 5t de carpes et autres poissons blancs et 3t de carnassiers. Les estimations font état des mêmes quantités et proportions pour 2015, mais entre les estimations et la réalité… Dès le 1er mars et jusqu’à avril-mai, des pêches de décompression seront réalisées par un pêcheur professionnel et serviront à rempoissonner les plans d’eau et cours d’eaux limitrophes. Cette opération vise à réaliser une pêche à l’aide de filets maillants pour capturer des spécimens vivants de grande taille. En fin de vidage aura lieu une pêche de récupération grâce à une pêcherie permettant de récupérer, trier et vendre les individus arrivant en masse sur le dispositif. Lors de cette étape, une partie du poisson pourra être récupérée et relâchée au sein des parcours de pêche situés à proximité du lac. De plus, la Fédération de Pêche souhaite profiter de la période d’assec pour aménager de nouvelles zones de reproduction de façon à favoriser une recolonisation rapide du milieu par la faune piscicole.

En prévision de la vidange du lac les Fédérations de Pêche du Morbihan et des Côtes d’Armor ont aménagé (encours ou terminé) des cales de mise à l’eau, postes et parcours de pêche sur le Blavet, les plans d’eau de Glomel, Lanrivain et Allineuc afin de palier à Guerlédan.

La qualité d’eau en aval du barrage sera particulièrement surveillée afin de détecter tout risque de pollution (chimique, organique…) ainsi que le taux d’oxygène dissout et prémunir tout problème éventuel. Les équipes sur place seront en mesure d’intervenir 24h/24h à la moindre alerte.

Le rempoissonnement va s’effectuer en 2 temps, une première phase fin septembre 2015, puis une autre début 2016. 13 tonnes de poissons, 80% de poissons blancs et carpes et 20% de carnassiers, seront réintroduits. Si tout se passe bien et si un premier cycle de reproduction est constaté, la pêche sera de nouveau autorisée en septembre 2017, sinon il faudra attendre l’ouverture en 2018.

Mais comment va se comporter le milieu après la remise en eau ?

La vidange va permettre une minéralisation du fond de lac (favorable ensuite à la vie piscicole) et un arrêt des cycles parasitaires. De plus la repousse des herbiers va créer des zones très favorables à la reproduction des poissons qui seront réintroduits et la décomposition des parties profondes immergées va contribuer à enrichir le milieu. Il faudra attendre fin 2018 voir 2019 pour que les 1ers cycles de reproduction portent leurs fruits et que les parties de pêche deviennent vraiment intéressantes !

Que faire en attendant de pouvoir repêcher Guerlédan ?

Et bien pourquoi ne pas partir à la découverte d’autres plans et cours d’eau, vous pouvez retrouver tous les aménagements réalisés par les différentes Fédérations de Pêche Bretonnes en vous rendant sur leurs site web (cf. fin d’article).

Vous avez aussi la possibilité, le temps de l’assec, de visiter le lac de Guerlédan comme personne ne l’a fait depuis 30 ans ! Plus de 30 guides ont été recrutés afin de vous faire découvrir les restes des villages, écluses et bois engloutis. Le coût de la visite guidée sera de 2€, il est évident qu’après 3 décennies sous l’eau les vestiges, le fond et les berges seront instables et qu’il sera fortement déconseillé de s’aventurer hors des chemins balisés.

Répartis sur les départements du 22 et du 56 plus de 47ha de parkings gratuits vont être aménagés, un système de circulation spécifique sera mis en place tout autour du lac et  le réseau de couverture de téléphonie mobile va être renforcé. Autant dire que tout sera prévu pour que cet évènement se passe dans les meilleures conditions. De nombreuses animations sont prévues, allant du son et lumière de l’Abbaye de Bon Repos au passage du Tour de France ! Par contre, il sera conseillé d’éviter les longs weekends ou jours fériés car plusieurs millions de visiteurs sont attendus !

Les routes en rouge sont réservées aux services prioritaires et riverains, de nombreux contrôles seront effectués afin de permettre une circulation la plus fluide possible. Il sera demandé aux visiteurs de faire preuve de civisme car le milieu qu’ils vont visiter est fragile et ou instable. Les parkings sont des terrains agricoles qui devront retrouver leur usage d’origine dès la remise en eau du lac, les bois qui bordent le lac sont un milieu propice aux départs de feu et le fond du lac est potentiellement accidentogène et rend compliqué l’accès par les secours.

Vous l’avez compris, que vous soyez pêcheur ou simplement curieux s’il y a bien un endroit que vous devez visiter en 2015 c’est le fond du lac de Guerlédan ! Voici quelques liens afin de vous aider à faire un saut dans le temps, là où la montée des eaux a arrêté les pendules en 1923.

Quelques photos d’archives

Vidange du lac de Guerlédan
Un ancien langoustier coulé par la RAF
Vidange du lac de Guerlédan
Un ancien langoustier coulé par la RAF

Vidange du lac de Guerlédan Vidange du lac de Guerlédan Vidange du lac de Guerlédan

Le site d’information du lac : www.lacdeguerledan.fr

Office du tourisme de Mur-de-Bretagne : www.guerledan.fr

Le site de morbihan.gouv: http://www.morbihan.gouv.fr/Politiques-publiques/Amenagement-du-territoire-construction-logement/Grands-projets/Guerledan-2015

Le site de Jean-Luc Chevé (photos lac vide): www.vidangelacguerledan.fr et www.jeanluccheve.fr

Fédération de Pêche du Morbihan : http://morbihan.federationpeche.fr/

Fédération de Pêche des Côtes d’Armor : www.federationpeche.fr/22

Chiffres clés :

  • Un barrage de 206m de long, haut de 45m, une réserve d’eau de 55 millions de m3, un lac de plus de 300ha, une production électrique équivalant à la consommation d’une ville de 15000 habitants.

Dates clés :

  • 1923 : début de la construction du barrage.
  • 1931 : début de la production d’électricité.
  • 1951 : 1ère vidange, puis tous les 10 ans jusqu’en 1985.
  • 2015 : le 1er mars, début de la 1ère vidange depuis 30 ans.

Infos poissons :

  • En 1985 : 18 tonnes de poissons pêchés dont 13t de poissons blancs et carpes et 5t de carnassiers.
  • Fin 2015 et début 2016 : 13 tonnes de poissons seront réintroduites dont 10.5t de poissons blancs et carpes et 2.5t de carnassiers.

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