La pêche de l’aspe est ludique, notamment comme cette année début juin a été un mois catastrophique dans beaucoup de régions, un cumul de pluie trop important a conduit à des crues, des coulées de boue, des effondrements et des glissements de terrain occasionnant de nombreux sinistres. Peu à peu, les rivières et fleuves vont retrouver leur lit et un niveau normal, l’occasion pour les pêcheurs de retourner au bord de l’eau et de profiter de ces moments d’évasion intense. En cette période estivale, j’aime orienter ma pêche vers des techniques ludiques, rapides et les deux poissons qui collent le mieux à cette pêche sont le chevesne aux leurres de surface et l’Aspe.
L’Aspe est un poisson particulièrement explosif qui impressionne par la violence de ses chasses, difficile de ne pas le remarquer quand il est présent dans une rivière ou un fleuve. Initialement très bien implanté dans l’Est de la France, il colonise petit à petit les cours d’eau français. On le retrouve ainsi sur le Rhin et ses affluents, la Moselle, la Loire … Doucement mais surement sa pêche se démocratise et de nombreux pêcheurs tombent sous le charme de ce nouvel adversaire qui impressionne par sa vitesse et son explosivité. L’avantage de ce poisson de sport est de ne pas avoir de valeur dite culinaire, contrairement aux autres carnassiers que certains pêcheurs peinent à remettre à l’eau. L’Aspe retourne quasiment systématiquement dans son élément, ce qui permet de conserver les géniteurs et contribue au bon état de ses populations. A partir de l’été, même sur les sites où il est bien implanté, on peut parfois se retrouver face à des situations complexes, avec notamment des chasses au milieu des bancs d’alevins. Les Aspes font exploser les bancs d’alevins de l’année et se focalisent sur les petites proies. Il n’est plus question de leur présenter des leurres de taille normale, bien au contraire la finesse s’impose ! Mais là, attention avec un tel combattant il va clairement falloir s’appliquer à bien tout gérer de la touche à l’épuisette.
Quelques leurres pour pêcher l’aspe
Surface et sub-surface :
Storm Gomoku Pencil, Flutterstick 40 ; Lucky Craft Sammy 65, Bevy Pencil ; Sakura Naja 65S ; Strike Pro Lipstick 45.
Sous la surface :
La forme minnow ou ablette semble la plus productive, dans ma sélection on retrouvera le Rapala Ultra Light minnow en taille 6cm, Jackson Artist 80, Zip Baits Orbit 65, Illex Tricoroll 67 HW.
La canne à pêche
Après le choix des leurres, il va tout naturellement en découler le choix de l’ensemble à utiliser. On voit trop souvent les pêcheurs prendre une canne et ensuite choisir les leurres à utiliser, alors qu’il faut faire la démarche inverse. Se poser la question : « Avec quels leurres vais-je pêcher aujourd’hui ? » De là, doit en découler le choix de la canne la mieux adaptée pour faire vivre votre leurre. Ici une puissance L ou ML semble le meilleur compromis même si l’on peut également le jouer en UL. En float tube il est plus judicieux de privilégier les cannes courtes (1.90-2.20m), alors que du bord le choix devra s’orienter vers une canne un peu plus longue pour atteindre les chasses plus lointaines.
Pour le choix des cannes du bord : Shimano Dialuna XR S806ML (2.59) et Dialuna XR S806L-S (2.59 elle est impressionnante de finesse et de réserve de puissance).
Choix des cannes en float tube
La pêche avec une canne spinning en float n’est pas toujours top confort à cause du positionnement du moulinet sur le bas de la canne. Pourtant il est indéniable que le spinning va se révéler plus performant pour lancer des leurres oscillant entre 3 et 6 grammes. On ne peut donc pas s’en passer à mon avis. La petite astuce pour retrouver un confort de pêche optimal consiste à retirer le tablier du float tube, de cette façon le moulinet ne viendra plus buter sur le tablier et vous pourrez pêcher canne basse librement sans être obligé de monter les coudes, une astuce simple qui permet de retrouver sa liberté de mouvements en spinning. Mais revenons au choix des cannes. Pour faire nager un petit leurre une canne douce de la pointe le fera nager sans le brider, pour contrer un Aspe qui va tenter de prendre le courant une réserve de puissance raisonnable est nécessaire. Parmi les cannes qui conviennent bien pour ce petit exercice on retrouve Les Shimano Poison Adrena 264UL (1.93), 266ML (1.98), Expride 266L-2 (1.98), Zodias 264L (1.93).
Les critères de choix du moulinet
-Un excellent bobinage du fil pour limiter les perruques avec une tresse fine lorsque la pêche se fait amont aval avec un leurre léger.
– Une récupération de fil d’au moins 85 cm au tour de manivelle (indicatif), attention ceci est de la théorie car en fonction du remplissage de votre bobine, si celui-ci n’est pas optimal, vous récupérerez moins de fil.
– Un frein progressif, des gros progrès ont été effectués au fil des années. Pour la pêche en finesse, il est primordial que le frein remplisse parfaitement son rôle, il doit rendre la main progressivement pour préserver les hameçons fins et le bas de ligne.
Quelques idées de modèles dans la gamme Shimano : Twinpower C3000XG (93cm), Stradic FK 2500HG & C3000HG (88cm), Stradic CI4+ 2500FA & 3000FA (88cm).
Choix du corps de ligne
En spinning mon choix va inévitablement se porter sur une tresse fine, en casting, on pourra être plus partagé et envisager les deux possibilités soit un nylon ou un hybride en 20 centièmes, soit une tresse et un nœud de raccord pour la tête de ligne. Mais revenons à notre tresse fine pour un moulinet spinning, en fonction des marques on se retrouve avec des grandes différences de résistance qui sont bien souvent totalement erronées et ce n’est pas là-dessus que je vais porter mon choix. Je vais d’abord porter mon choix sur le visuel de la tresse car malgré sa finesse j’ai besoin de la suivre des yeux pour pouvoir guider mon leurre ou gérer le combat avec un poisson. Ensuite je vais regarder le diamètre, une tresse 8 centièmes est un excellent compromis, on peut descendre plus light en 6 centièmes, par contre une tresse en 10 centièmes va trop brider le leurre.
Tête de ligne
Je vous parlais de la résistance des tresses erronée auquelle je n’apportais que peu d’importance et comme vous allez le voir avec la taille des têtes de ligne une tresse de 8 centièmes est passe partout. Au niveau de la tête de ligne dans les zones de calme j’utilise un nylon ou un fluorocarbone en 18 centièmes, il est flottant et ne pénalise pas le moins du monde les mini leurres de surface. Par contre dans les zones plus rapides il est possible d’utiliser une tête de ligne en 20 ou 22 centièmes sans trop brider la nage de votre leurre. Car c’est ça qu’il est important de conserver à l’esprit, plus la tête de ligne est forte, plus votre leurre devra être gros pour nager librement et inversement, pour ne pas brider un petit leurre il faudra une tête de ligne plus fine. Vous l’avez tous constaté faire nager un petit jerkbait à brochet avec un fluoro 80 centièmes, c’est mission impossible, alors qu’avec une tête de ligne acier multibrins ou un fluoro 50 c’est tellement plus facile. Le rapport taille du leurre, rigidité du bas de ligne est un problème réel à toujours avoir à l’esprit, il faut le bon compromis entre discrétion et résistance !
Après il est vrai que le choix entre nylon et fluorocarbone reste du gout de chacun mais à titre d’exemple pour les diamètres entre 18 et 20 centièmes, j’aime bien utiliser des nylons qui sont plus élastiques et donc encaissent mieux les attaques violentes, alors que pour les diamètres plus fort le fluorocarbone permet de davantage jouer sur la discrétion et la résistance à l’abrasion. Il n’y a pas de choix parfait mais bien plusieurs possibilités qui s’offrent à vous, choisissez !
Le nœud qui va bien
Après de nombreux essais, voici le nœud que j’utilise pour le raccord dans les petits diamètres tresse et fluorocarbone, c’est le meilleur rapport simplicité/ résistance que j’ai trouvé à ce jour quand je désire réaliser rapidement un nœud.
Description :
Tresse 8 centièmes / Tête de ligne en fluorocarbone 16 centièmes.
-Dans un premier temps, effectuez un nœud en huit sur le fluorocarbone.
-Prenez votre tresse, passez la dans la base du 8 (côté grande longueur de la tête de ligne), alignée là contre la tête de ligne. Mouillez et serrez doucement le nœud en 8, effectuez avec la tresse sur la tête de ligne un nœud similaire à celui qui sert à attacher un hameçon à palette, la hampe de l’hameçon étant le fluorocarbone et le nœud en huit la palette.
Dans la gestuelle, descendez votre tresse le long de la tête de ligne.
Remontez la pointe de la tresse de manière à former une boucle le long du fluorocarbone. Passez sept à huit fois avec l’extrémité de la tresse dans la boucle en englobant la tête de ligne.
-Mouillez le tout, faites coulisser les spires de tresse les unes contre les autres, faites glisser jusqu’au nœud en huit et serrez fortement en tirant sur les deux brins de tresse. Le tour est joué et les deux lignes raccordées solidement.
Coupez l’excédent de fluorocarbone au ras, alors que vous laisserez un peu plus de marge pour le brin de tresse qui ne nuira pas au passage dans les anneaux. Résistance garantie et simplicité de réalisation sont au rendez-vous, à vous d’ajuster votre tête de ligne entre un et deux mètres.
Pêche action
Le plus long a certainement été de passer le matériel en revue pour se lancer à l’attaque des Aspes au fil de l’eau. Le moment est venu d’enfiler le waders pour arpenter les berges à la recherche de nos adversaires. Pour les plus chanceux qui sortent à plusieurs, on pourra même envisager le float tube avec une descente de rivière ou de fleuve. Canne en main, une poignée de leurres, une épuisette et c’est parti. Les deux pics d’activité de la journée sont les premières heures de la matinée et les dernières heures du jour. Si vous n’avez que peu de temps pour pêcher, privilégiez une de ces deux parties de la journée pour votre sortie. Mais rassurez-vous c’est un poisson qui reste actif tout au long de la journée. C’est impressionnant d’arriver au petit matin et d’entendre l’explosion des chasses en surface qui font jaillir des gerbes d’eau impressionnantes et troublent le calme de la surface. Sur les ponts de Metz les passants s’arrêtent pour regarder les chasses, dans le port de Strasbourg j’avais été bluffé par le nombre de poissons en chasse, les ablettes volaient littéralement à la surface de l’eau pour échapper aux prédateurs. C’est un poisson qui vend du rêve !
Le souci est que quand il chasse, il cible une taille de proie et si vous ne rentrez pas dans le critère de taille, c’est inutile d’essayer, il ne se déplacera pas pour votre leurre.
A la belle saison l’Aspe se focalise très souvent sur les bancs d’alevins que l’on retrouve en différents points de la rivière et c’est là qu’il va falloir le rechercher. Les bordures d’herbiers, les arrivées d’eau, les zones de calme après un courant, derrière les obstacles, dans les veines porteuses, les zones oxygénées.
Toujours en déplacement
L’Aspe est un poisson en mouvement perpétuel qui se déplace très vite quand il est en chasse, il ne faut donc pas hésiter à avoir une animation très rapide, pour moi seuls les gros courants échappent à cette règle, car dans ces derniers, le plus important est de passer au bon endroit pour solliciter le poisson embusqué derrière la pile de pont ou le bloc rocheux.
La surface et sub surface sont la pêche qui rend le plus accroc à ce poisson, c’est un régal de sensations de voir nager son leurre sous la surface alors qu’un « V » nait derrière lui sous la surface et remonte rapidement dessus. Parfois la dorsale crève l’eau juste avant l’assaut final, ne pas ralentir au contraire accélérer, une gerbe d’eau explose alors autour de votre leurre, pas la peine de ferrer, les hameçons fins se figent sans difficulté dans la gueule de votre adversaire vu la violence de l’attaque. Le frein chante sous le premier rush et le combat s’engage, c’est du bonheur à l’état pur avec du matériel léger.
En surface
En surface, la pêche est un jeu d’émotion, mais les attaques ne se concrétisent pas toujours par une capture, car le poisson va tellement vite, que dans la violence de son attaque il lui arrive d’éjecter le leurre à plus d’un mètre au-dessus de l’eau ! Cela fait partie du jeu et des sensations.
Par contre cette technique est très efficace dans les zones de calme, de courant lent et surtout le long des herbiers ou dans les trouées d’herbiers où les alevins aiment se positionner. Les Aspes viennent s’y mettre à table surtout le matin et le soir, mais il est également possible de les y retrouver toute la journée si les températures ne sont pas trop élevées.
Technique de journée
Dès que la température va monter au fil de la journée, il sera plus productif de pêcher les zones bien oxygénées et là, qui dit oxygène, dit courant et accélérations. Un petit leurre de surface peut encore être efficace, mais si le courant est trop puissant il aura du mal à s’exprimer. Il sera alors plus productif de passer sur des leurres de type minnow avec bavette courte ou bavette plus longue. La technique de pêche se révèle quant à elle moins « fun » et moins explosive visuellement, mais au combien plus productive en termes de ratio touche / poisson capturé. Les Aspes se ratent rarement en profondeur, l’attaque est hyper violente et le poisson utilise immédiatement le courant pour s’échapper, le premier réflexe du pêcheur sera d’analyser les points de danger. On joue avec du matériel light, une tête de ligne en 20 centièmes, un corps de ligne en tresse 8 centièmes, alors le moindre contact avec un bloc rocheux peut se révéler fatal. L’abrasion est une chose à ne pas oublier, car c’est la casse assurée avec la tresse mise en tension. Il faut impérativement monter les bras au-dessus de la tête pour guider et combattre son adversaire, tout en évitant les structures multiples. Ce n’est que du bonheur de voir la canne plier et sortir victorieux du combat. On fait réellement travailler son blank au max et c’est un régal. Après chaque poisson il est important de vérifier le bon état de son bas de ligne et en cas de gros combat changer la tête de ligne en refaisant les nœuds, cela évitera de perdre un poisson bêtement sur casse.
En float tube, circuler sur la rivière est une chance inespérée, on profite de vues privilégiées, de postes inaccessibles du bord, alors au-delà d’une pêche uniquement à descendre la rivière, il ne faut pas hésiter à s’arrêter au niveau des rétrécissements de la rivière qui provoquent forcément des accélérations. Ces zones passent trop vite en float, il sera plus simple de les exploiter pleinement à pieds. Il n’est pas rare d’y voir plusieurs poissons en poste dans le courant et il serait dommage de passer à côté de ces multiples adversaires.
Dans la pêche des Aspes en finesse, je n’ai abordé que la pêche aux leurres durs, cependant il a été constaté par de nombreux pêcheurs de l’Est de la France qu’un changement de comportement des Aspes s’effectuait peu à peu. Pourquoi et comment, une nouvelle espèce invasive arrive, le gobie, la Moselle et bien d’autres rivières en sont envahies. Ce poisson étend son aire d’implantation en se fixant sous les péniches et il explose littéralement dans les nouvelles régions où il s’implante. Devant cette nouvelle nourriture abondante, les aspes ont modifié leur comportement alimentaire et au lieu de rechercher les proies à mi-hauteur d’eau ou en surface ils se sont mis à prospecter les fonds à la recherche des gobies. Il n’est désormais pas rare dans l’Est de la France de capturer des Aspes avec le bout de la gueule abimée à force de taper les roches en chassant les gobies. Une nouvelle stratégie de pêche aux leurres souples verra peut-être le jour ? Mais la pêche finesse reste pour moi une solution incontournable et primordiale pour la réussite de vos futures parties de pêche sur les Aspes en été, sensations fortes garanties au rendez-vous, alors faites-vous plaisir !