Porté au pinacle par certains qui ne jurent que par lui ou mis au ban par d’autres qui l’accusent de n’être qu’un vulgaire grappin, le plomb palette est une de ces techniques ancestrales qui années après années continue d’être utilisée avec bonheur sans se soucier le moins du monde des modes.
Si le plomb palette est d’une efficacité redoutable pour un prix défiant toute concurrence, cet assemblage hétéroclite d’une simple lame de plomb et d’un morceau de gaine armé d’un hameçon est désormais tombé dans les mains des pêcheurs inventeurs qui innovent chaque jour en variant les matériaux pour l’agrémenter. Il devient alors, comme le moucheur et la mouche qu’il a montée, la création, l’œuvre, le leurre universel d’un pêcheur de carnassier.
Retour vers le passé
Aux origines, le plomb palette était une dandine que l’on pratiquait sous la canne. Cette espèce de plomb trapézoïdal à facettes lestait un appât naturel qui l’agrémentait. On l’utilisait alors sous une grande canne de 6m lorsque la balle nickelée ne fonctionnait pas. Destiné avant tout aux perches il était d’usage de le gratter à la pointe de son couteau afin qu’il brille de mille éclats lors de l’animation. Puis, pour simplifier diront les uns ou rendre le montage nageant diront les autres, le plomb palette à peu à peu acquis sa forme pyramidale et certaines régions se le sont approprié en développant une animation ou une forme spécifique. C’est ainsi que la « régule », la « bouine » et d’autres noms encore ont réalisé de belles pêches dans un petit coin de France sans trop en sortir. Jusqu’au jour où le guide de pêche corrézien Christian Cochard a mis au point ou démocratisé la technique du plomb palette en le commercialisant sous une grande marque Française. Du jour au lendemain, les pêcheurs en bateau pour commencer ont redécouvert une technique très efficace jusqu’à ce qu’elle fasse même des émules en compétition et serve souvent à acquérir les derniers points pour la victoire. Parallèlement, les pêcheurs du bord sous l’impulsion des landais ont redécouvert cette technique qui permet de prospecter plus loin que tous les autres leurres et qui ne coûte pas bien cher.
Plomb palette, comment ça marche ?
Mais qu’est ce qui peut bien rendre le plomb palette si efficace surtout sur les perches ? S’agit-t’il de ce bout de gaine plastique qui les fait mordre, cette perle qui les attire, ce mouvement saccadé ? Personne ne peut répondre précisément à cette question, on peut juste supposer que les mouvements désordonnés et rapides engendrés par l’animation de ce montage vont exciter les sens des carnassiers. Cette action si spécifique, si imprévisible ne semble pas pouvoir être imitée par un autre leurre et tout comme l’imitation du moucheur, le plomb palette est un leurre que l’on monte soit même ce qui implique qu’on a tendance à y croire bien plus. Peu importe ce que ça imite ou ce que ça induit, c’est très efficace et cela suffit au pêcheur. Pourtant on en trouve d’autres qui tirent à boulets rouges sur le plomb palette sous prétexte qu’il prendrait autant par les nageoires que par la gueule. Un leurre dandiné et de plus animé sèchement grappera toujours un poisson croisant sa route par hasard mais en général dans 95 % des cas, le poisson est pris par la gueule.
Des animations diverses et variées
Voilà un secret jalousement gardé par certains spécialistes de la technique : l’animation. On en voit ferrer dans le vide comme des bûcherons et animer sur plus d’un mètre alors que d’autres ne font que faire des soubresauts à leur montage en le faisant progresser par petits bonds. Certains jours les poissons seront sensibles à une animation rapide, quelquefois il faudra juste gratter le fond, il suffit d’essayer et de trouver l’animation du jour. Contrairement à ceux qui ne changent jamais de technique mais prennent quand même un poisson, vous en prendrez plus en variant l’amplitude et la fréquence de vos animations. Plus que la couleur, c’est l’animation qui semble primer et les exemples sont nombreux de duos de pêcheurs officiant avec le même montage mais dont un seul pique les poissons.
Le montage
A l’origine le plomb palette tel qu’il a été démocratisé par C. Cochard se composait d’un plomb dit « palette » dans lequel coulissait un morceau de nylon de fort diamètre, ceci terminé par un ensemble composé d’un triple emmanché sur deux centimètres de gaine rouge surmonté d’une perle blanche et d’un plomb pincé pour amortir la frappe du plomb palette. La gaine avait cette faculté de rigidifier le montage final et d’éloigner le triple du plomb ceci afin d’éviter les emmêlages, il fallait par contre l’enfiler en force sur l’œillet de l’hameçon. L’ajout d’un petit octopus a l’avantage de sélectionner la taille des poissons visés, un modèle de 8 cm sera bien moins attractif pour une perchette qu’un de 4 cm. Le montage actuel se compose d’un triple de 6 à 4 monté sur un octopus puis une perle, voire une perle caoutchouc qu’utilisent les carpistes tout simplement. Ce montage plane à la descente et l’octopus semble flotter derrière le plomb avant d’accélérer à la vitesse de l’éclair sur une traction du pêcheur. Le montage coulissant trouve là son utilité qui est de donner une double impulsion au montage, animation qui devient très agressive, et très appréciée des percidés. Le plomb palette est tout autant efficace avec deux mètres de fond qu’avec quinze, il suffit d’adapter le grammage du plomb qui doit cependant toujours rester assez important pour que l’ensemble coule assez vite. Certains remplacent l’octopus par un leurre souple, ensuite tout n’est affaire que de goûts personnels. On découvre dans certaines boites quelques montages secrets qui sont de petites œuvres d’art à base de perles achetées en mercerie, de plumes de marabout ou de bandelettes de lapin qui s’inspirent des streamers.
Le matériel à utiliser
Si en bateau n’importe quelle bonne canne progressive d’au moins deux mètres conviendra, du bord c’est une canne puissante et très bonne lanceuse qu’il faudra utiliser. Les spécialistes utilisent des cannes destinées à la pêche du bar de plus de 3 mètres pour propulser leurs montages au loin. L’usage de la tresse est impératif, soit pour lancer loin, soit pour bien conduire son plomb palette sans mou dans l’animation c’est pourquoi il convient de régler assez finement son frein pour qu’il se déclenche à la touche en préservant les chairs délicates des gueules de percidés.
Vous n’avez pas encore essayé le plomb palette ? Cette technique peut paraître plutôt « bourrine » aux yeux du profane, mais elle se révèle quelquefois la seule apte à faire réagir des carnassiers en période estivale ou automnale. Et entre nous, quel plaisir de prendre du poisson sur un leurre que l’on a assemblé soi-même !
Quel moulinet et quelle canne pour la pêche au plomb palette ?
Le moulinet est l’équipement qui souffrira le plus, la multiplicité des ferrages avec des lests quelquefois important va mettre à mal son axe, un usage incompatible avec les modèles bas de gamme. Une taille 2500 pour le bateau et 3000 pour le bord sont un bon choix. Concernant la canne, l’idéal est une canne nerveuse assez souple de scion pour éviter de déchirer la gueule des perches. Une puissance ML est parfaite pour cet usage en bateau alors que du bord, le MH permettra de lancer plus loin.