Un pêcheur répond aux accusations de torture des écologistes

Réponse d'un pêcheur aux écologistes au sujet du no-kill
Cela illustre bien l’ignorance de certaines personnes apparentant la pêche à de la torture, cette vision est trop simple et ne tient pas compte de la multitude de façon de pêcher avec plus ou moins de respect envers les poissons.

En France je nous croyais à l’abri des pensées et comportements extrémistes qui sévissent par exemple en Suisse, où tout poisson pêché doit obligatoirement être tué. Loi écologiste paradoxale et incohérente pour toute personne qui pratique la pêche, mais d’un point de vue d’un non pêcheur qui peut être logique. Une page Facebook française a récemment comparé la pêche à la torture, à la chasse aux espèces protégées en Afrique et autre activité plutôt horribles et cruelles. Mais que répondre ?

Etant moi-même très concerné par la cause animale et à deux doigt de devenir vegan, ce parti pris de quelqu’un voulant protéger les animaux à l’encontre de la pêche m’a interpellé. Non pas interrogé car cela fait des années que je me suis moi-même questionné sur mon impact et mon activité halieutique, mais interpellé.

J’en suis venu tout naturellement à la conclusion qu’une personne qui prend la pêche pour de la torture animale est tout simplement quelqu’un qui n’a jamais pêché de sa vie, ou alors qui a été initié par quelqu’un qui ne respecte pas du tout les poissons, il y en a. Mais la pêche regroupe tellement de pratiques différentes qu’un pêcheur confirmé sait qu’il est possible de pratiquer cette activité en respectant un maximum les poissons. Et bien sûr il est tout aussi possible de pratiquer la pêche en faisant souffrir un maximum les poissons.

Alors oui on peut exclure de cette notion de respect les pêcheurs qui ne remettent pas à l’eau leurs poissons, qui les laissent agoniser et étouffer des heures à l’air. Oui on peut être choqué par la pêche aux appâts vivants qui s’apparente effectivement à de la torture animale d’espèces qui ne peuvent exprimer leur souffrance.

Oui on peut trouver horrible les méthodes de pêche qui piquent les poissons loin dans la gorge en leur administrant des blessures fatales.

Ce que peut penser une personne ne connaissant pas les techniques de pêche respectueuses du poisson. Quel dommage, car pêcher dans le respect des êtres vivant est pourtant une expérience extraordinaire à vivre avec des enfants

Pas une pêche mais des pêches

Mais comme toute activité humaine sur cette terre, la pêche présente au moins deux facettes, et il est possible de pratiquer la pêche en faisant le moins de dégâts possibles. Par exemple avec un montage au cheveu pour piquer les carpes sur des parties charnues de la bouche en ne faisant qu’une blessure invisible, et en remettant à l’eau systématiquement les prises en prenant un soin extrême : séjour à l’air libre ultra court, aucun contact avec le sol mais utilisation d’un tapis de réception, désinfection des éventuelles blessures, remise à l’eau du poisson en parfaite santé. Il existait une carpe en Angleterre qui a vécu + de 40 ans en ayant été prise des dizaines de fois et qui est morte à cet âge canonique après avoir vécu en parfaite santé malgré les quelques minutes de dérangement qu’elle subissait chaque année.

En technique de pêche respectueuses je peux citer la truite aux leurres, à la mouche, le carnassier aux gros leurres (les petits ayant tendance à prendre des poissons petits et fragiles), la pêche au coup sans ardillon, le thon en no kill sans le monter sur le bateau, le respect des périodes d’affaiblissement du poisson par exemple avec la pêche interdite en période de reproduction etc.

Une petite égratignure est la seule preuve de capture, qui sera bien vite cicatrisée et oubliée
Une carpe anglaise qui est morte à environ 45 ans, âge anormalement élevé pour un poisson, ses nombreuses captures n’ont donc aucunement empêché son développement et sa vie en bonne santé

Quid de la souffrance

Bien entendu l’argument principal de la souffrance infligée aux poissons se pose quand même pour les pêches respectueuses qui aboutissent à la remise à l’eau du poisson en parfaite santé. Des études scientifiques auraient démontrées que la bouche du poisson n’a pas de terminaisons nerveuses, d’autres l’inverse. Dur de conclure, je préfère me baser sur mon expérience de milliers de jours passés au bord de l’eau et presqu’autant de prises.

L’absence de terminaisons nerveuses au niveau de la bouche semble logique : cette bouche sert au poisson à broyer des crustacés, des coquillages, des autres poissons pourvus d’arrêtes et d’épines, c’est certain que cette partie ne doit pas être trop sensible pour sa survie. Un autre argument vient aussi de la pratique de la pêche, un poisson bien piqué en bord de gueule tire beaucoup sur la ligne, il tire tellement que cela parait impossible qu’il puisse ressentir de la douleur. A ce propos avec une méthode non respectueuse, par exemple en laissant avaler l’hameçon qui se retrouve dans la gorge ou l’estomac, le poisson ne tire presque plus sur la ligne, cela me semble indiquer qu’à ce moment là il ressent de la douleur qui l’empêche de tirer.

Mais même si l’on excepte la douleur relative, oui il faut l’avouer : nous gênons le poisson, nous le dérangeons dans sa vie habituelle en en faisant notre partenaire de loisir, un peu à son dépend il faut l’admettre. Cependant j’ai pu vérifier des dizaines de fois de mes propres yeux qu’un poisson pris et relâché en bonne santé continue sa vie parfaitement tranquillement, car j’ai pu les prendre à nouveau plus tard avec des blessures cicatrisées, un gain de poids, des couleurs éclatantes et en pleine forme.

Carpe prise au printemps toute pâle, à 23kg …
… puis reprise 6 mois plus tard en excellente forme, avec des couleurs vives et quelques kilos de plus

Pourquoi pêcher alors ?

Si capturer et relâcher un poisson n’impacte pas sa santé, on le dérange quand même, alors pourquoi continuer à pêcher ? Tout simplement car c’est ma passion, car une semaine passée sans être au bord de l’eau à m’interroger sur ce qu’elle cache comme habitant est une mauvaise semaine, et je veux essayer de percer ce mystère en pêchant et prenant des poissons. Car je suis éberlué par la vue d’un poisson énorme dans mon épuisette jusqu’à en faire battre mon cœur très vite et à trembler…

Sans ça ma vie paraitrait un peu moins remplie, un peu plus fade. Alors oui c’est égoïste mais je continue de pêcher. La vie humaine sans aucune activité serait bien triste, et je me dis que quelque soit mon loisir j’ai de toute façon un impact sur la vie animale. Si j’aimais la randonnée ? Et bien je tuerais des centaines d’insectes et oiseaux sur la route pour aller au pied de la montagne, et à nouveau des centaines d’insectes en marchant dessus en randonnant, puis je dérangerais les bouquetins qui me sentiraient de loin et qui changeront leur parcours quotidien pour m’éviter. Moto ? Vélo ? Tourisme ? Jardinage ? Toutes ces activités dérangeront des animaux, voire en tueront pas mal aussi… Il faut l’accepter pour ne pas se morfondre dans son canapé 24h/24 je pense, et cela n’exclut pas d’essayer de pratiquer son activité favorite en minimisant son impact, et en maximisant son respect, que ce soit envers mammifères, insectes, ou poissons…

Découvrir un si beau poisson dans l’épuisette est une raison pour continuer à pêcher. Ce brochet s’est piqué en bord de gueule et a été remis à l’eau en parfaite santé après un instant à l’air libre ultra court sur le bateau
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