Même s’il fait relativement peu parler de lui, Kévin a un palmarès exceptionnel, il est notamment le premier français du concours européen « European Pike Challenge 2020», qui a la particularité de laisser les pêcheurs pêcher où et quand ils le veulent sur plus d’un mois, et qui est largement dominé par les pays nordiques. Il faisait jeu égal avec pas mal de pêcheurs qui devraient être mieux lotis dans les eaux scandinaves.
1/ Peux-tu te présenter stp
Bonjour, je m’appelle Kevin Périllo et j’ai 31 ans. Je suis régleur sur commande numérique dans le secteur de l’horlogerie. Je suis originaire du Haut-Jura et j’ai commencé la pêche dès mon plus jeune âge.
2/Comment en es-tu venu à te concentrer principalement sur la recherche des très grands brochets ?
Ce qui m’a passionné dans la traque de ces grands brochets est la complexité à leurrer et à trouver ces géants. J’aime les émotions, les sensations et l’adrénaline que cela me procure à chaque fois que je prends un tel poisson.
3/ Quel est ton palmarès ?
Je ne compte pas vraiment le nombre de poissons que j’ai déjà pris donc je vais parler des poissons que j’ai pris ces dernières années et qui m’ont particulièrement marqués. A l’heure actuelle, je dois avoir 5 ou 6 brochets de 120+ sans oublier ce majestueux poisson de 130,5cm ! Pour les 110+, je pense en avoir un peu plus de 10.
4/ Quel est ton terrain de jeu favori pour traquer ces poissons ?
Mon terrain de jeu favori reste les lacs de moyenne montagne des Vosges et du Jura car j’habite juste à côté, et parce que l’on y trouve plus de grands brochets. Je dois dire que j’éprouve une plus grande satisfaction à leurrer un géant dans ces lacs qu’en rivière car la recherche est plus intéressante du fait des différents paramètres à prendre en compte. Je pêche aussi quelques rivières près de chez moi et les lacs de barrage comme le Lac de Vouglans.
5/ Combien de temps y consacres-tu par an, quelles saisons ?
La recherche de ces grands brochets demande beaucoup de temps, donc je dirai que j’y passe la plupart de mon temps libre.
6/ Quel est pour toi la meilleure période pour les géants ?
Chaque saison est pour moi propice à faire de beaux poissons, j’essaie de choisir chaque plan d’eau ou biotope en fonction de la saison. Pour ma pêche de prédilection qui est dans les lacs de moyenne montagne je dirais que la meilleure période est de juillet à septembre. Pour les périodes printemps/automne /hiver, je consacre plus de temps à la recherche de brochets en rivière.
7/ Quelles autres pêche pratiques-tu, qu’y as-tu appris qui te sert pour les grands brochets ?
En dehors de la pêche du brochet, je pêche aussi le sandre et la perche en bateau mais aussi du bord. Depuis tout jeune, j’ai beaucoup pêché la truite en rivière et la carpe.
Je pêche aussi le corégone ce qui m’a beaucoup appris sur le mode de vie de ce poisson qui est une source de nourriture principale des grands brochets dans les lacs. Aujourd’hui, je peux dire que toutes les pêches que je pratique ou ai pratiqué me sont utiles que ce soit pour la concentration, l’approche des poissons, leur mode de vie, les montages ou la pratique du sondeur.
8/ Quel type de leurres préfères-tu ?
Pour la recherche de ces grands brochets j’utilise essentiellement des leurres de taille importante, entre 23 et 35 centimètres. J’utilise souvent de gros swimbaits comme le S Pro BBZ ou le Balam 300 que je leste en fonction de la couche d’eau que je souhaite pêcher. J’ai une préférence aussi pour la fameuse Miuras mouse CWC que je leste en fonction de la pêche recherchée et de la vitesse de récupération du leurre qui est très importante pour moi. Le Balam est un leurre avec de faibles vibrations qui déplace peu d’eau, très pratique pour faire bouger les poissons méfiants, très sollicités ou peu mordeurs. La miuras est un leurre hybride qui déplace beaucoup d’eau du fait de sa tête plate et l’on peut adapter des trailers avec des vibrations différentes. J’utilise quelques shads comme le Magdraft 10 pouces de chez Megabass ou le Eastfield Viper 29 cm mais moins que les autres types de leurres, car ils sont très utilisés dans les lacs. Ils vont plus m’être utile pour déranger les gros brochets qui vont alors déclencher une attaque pour chasser cet intrus de leur zone de confort.
9/ Quels combos utilises-tu ?
J’utilise principalement deux combos en casting uniquement, plus adaptés à la pêche avec de gros leurres, vu que j’utilise des leurres au-dessus de 200 grammes. Mon premier combo se compose de la Tenryu BC85XXH, puissance 120-350gr pour 2,60m, et du moulinet 13 Fishing A3. Je trouve cette canne bigbait très douce pour les lancers et les combats. Son petit plus est sa légèreté. Le moulinet quant à lui est très fluide et a un frein très fort, sa prise en main est parfaite. Je prends un faible ratio pour pêcher avec les gros leurres car c’est une pêche qui reste assez lente et on a moins d’effort à la récupération. Pour le deuxième combo, j’utilise une canne BFT Lizzard X, c’est une 200gr max pour la plage du bas je dirais 80g et 2,60m, et toujours le moulinet 13 fishing A3. J’utilise avec des leurres entre 100 et 200 grammes. Cette canne est très bonne lanceuse et très agréable au combat. Concernant, la tresse j’utilise la Spiderwire entre 28 et 33 centièmes.
10/ Quels accessoires te sont utiles spécifiques à cette pêche ?
Pour la pêche en général je dirais mon bateau et mon sondeur. En ce qui concerne les prises, il est important d’avoir une épuisette, un tapis de réception pour préserver au maximum le poisson, une longue pince à bec pour décrocher le brochet afin de préserver ses doigts. Et enfin une pince coupante si besoin pour couper les triples sur un poisson mal piqué. Voilà pour moi les outils indispensables à ce type de pêche.
11/ Quelle technique, approche, stratégie, penses-tu est la meilleure pour cette pêche ?
Dans les lacs de moyenne montagne, je cherche principalement les poissons pélagiques en pleine eau car c’est souvent où se trouvent les grands brochets. La clé de la réussite pour cette pêche réside dans la prospection au sondeur : il faut savoir lire et se servir au maximum du sondeur. Le but est de trouver sur quelle espèce le brochet se nourrit ce jour : corégones, perches… Ceci est très important. Ensuite, la hauteur où se situent les brochets dans la colonne d’eau. Je marque chaque poisson trouvé afin de placer mon bateau le plus parfaitement possible sur chaque point. C’est pour moi la partie la plus importante de cette pêche. Quand tous ces éléments sont réunis 80% de la pêche est faite. Selon la profondeur dans laquelle se trouvent les brochets, il faut trouver le leurre le plus approprié pour pêcher la bonne couche d’eau. Mon principe est de leur présenter dans un premier temps si c’est possible, un leurre avec de faibles vibrations et un faible déplacement d’eau. Si je ne déclenche pas l’agressivité des poissons, je mettrai au fur et à mesure des leurres avec plus de vibrations, plus bruyants… Pour ces lacs en résumé, la clé reste la prospection. En rivières j’ai une approche différente. J’utilise moins le sondeur et je pêche des biotopes différents : bordures boisées, herbiers, chenal… dans plus ou moins d’eau jusqu’à enregistrer quelques touches pour comprendre dans quel milieu se trouvent les poissons en adaptant le leurre à chaque biotope. Selon moi, en rivière, la clé est le power fishing.
12/ Quels postes ou secteurs sont tes préférés ? Comment les abordes-tu ?
Je ne pars jamais à la pêche avec des a priori en me disant que le poisson sera sur telle zone ou dans telle profondeur. Je commence toujours une partie de pêche avec une prospection au sondeur. En fait, pour ne pas perdre de temps, je pars du principe qu’il ne faut pas pêcher tant que je ne suis pas sûr qu’il y ait des poissons sur la zone.
13 / Quelle est la conséquence de ces stratégies sur ton nombre de touches et d’éventuelles bredouilles, et comment gères-tu cela ?
Pour moi, le capot sur une journée de pêche complète fait mal au mental mais c’est une bonne leçon pour la suite. C’est la meilleure chose pour se remettre en question et se demander ce que l’on a pas ou mal fait. Quand je vais sur des zones où habituellement je trouve de plus gros poissons et qu’ils ne sont pas au rendez-vous, je me rabat sur d’autres zones propices à trouver toutes les tailles où les touches seront surement plus nombreuses et parfois on peut avoir de bonnes surprises et tomber sur de beaux brochets. Il y a des jours où l’on voit peu de poissons, j’ai remarqué que c’est souvent là que l’on trouve les plus jolis : très peu de touches mais de grosses prises. Je dirai que pour persévérer dans cette pêche, il ne faut pas se contenter des brochets que l’on a déjà fait, mais plutôt de réfléchir à ceux que l’on n’a pas fait afin d’adapter sa technique.
14/ Raconte-nous la prise de 2 poissons record qui t’ont marqué.
Alors pour commencer mon plus beau brochet de 130,5 cm : je l’avais repéré quelques jours avant au sondeur et je l’ai traqué plusieurs jours jusqu’à le retrouver 5 jours plus tard posté à une centaine de mètres de là où je l’avais repéré précédemment. C’était cet été, par une journée ensoleillée. Je l’ai vu suspendu 12 mètres sous la surface. J’ai pêché méthodiquement. J’ai commencé par présenter mon leurre 3 ou 4 mètres sous la surface dans la zone où il se trouvait pour ne pas l’effrayer. Au 4ème lancer, je passe à 7 mètres sous la surface environ et là ce fut blocage instantané. C’est parti pour des rushs en pleine eau, jusqu’à le voir en surface avant de l’épuiser. Mes jambes se sont mises à trembler… J’ai senti que c’était le poisson rêvé du pêcheur de brochet et que la barre des 130 n’était pas loin. Sur la mesure il accusait 130,5cm. L’émotion et l’adrénaline étaient au maximum à ce moment-là. C’est pour ces sensations là que je traque ces géants. Mon deuxième plus gros brochet est un poisson de 125cm qui restera gravé pour moi car je l’ai pris en cherchant la perche en verticale. Il était caché dans un banc de perches. J’ai eu de la chance car j’étais monté en 22 centièmes en bas de ligne avec un leurre de 3 pouces et une tête plombée de 7 grammes : autant vous dire que je n’étais pas équipé pour pêcher un géant ! Il m’a fallu beaucoup de sang-froid pour combattre ce poisson avec un montage si léger. Je peux vous dire que j’ai croisé les doigts pour ne pas le perdre. Il était piqué juste au bord de la gueule. Cette action fut pour moi chargée en émotion.
15/ Comment vois-tu cette traque à l’avenir en général ? Quelles eaux te semblent avoir du potentiel, quel matériels, techniques ? Toi, quel est ton projet à l’avenir pour cette pêche ?
Je reste sceptique quant à l’avenir de cette pêche. Si la qualité des eaux ne s’améliore pas et que le prélèvement de ces gros géniteurs n’est pas mieux géré, je pense qu’il sera de plus en plus difficile de faire ces géants. Pour les eaux qui me semblent avoir le plus de potentiel, je pense que les lacs de moyenne montagne fournis en corégones restent le milieu le plus propice à produire de grands brochets. Concernant le matériel et la technique, je dirai que seul l’avenir nous le dira, il faudra s’adapter aux comportements des poissons. Pour la suite de la traque de ces gros poissons, mon projet est d’essayer d’en pêcher toujours plus et de plus gros et de continuer à prendre un maximum de plaisir.