Les leurres de taille XXL appelés bigbaits ont fait couler beaucoup d’encre mais ont pris aussi beaucoup de gros brochets car la taille du leurre est un facteur important, même si la saison, la taille du poisson fourrage, peuvent changer radicalement le régime alimentaire des carnassiers. A cette saison de l’année, l’utilisation d’un shad conséquent ou d’un jerkbait, est un choix judicieux. Si on considère que la taille du leurre employé est en adéquation avec la taille du brochet, rien de surprenant que bon nombre de pêcheurs fassent le choix d’une grosse bouchée.
Mais nous pouvons aller plus loin dans la réflexion et prendre en considération que l’hiver à notre porte, le besoin de faire des réserves amène les carnassiers à une activité plus importante et la recherche de proies conséquentes. En d’autres termes, se taper une proie de 25 cm est plus profitable que l’apéricube de gardonneaux de 8 cm qui nécessite une dépense d’énergie plus importante.
Force est néanmoins de constater qu’un gros leurre destiné principalement à un big fish est beaucoup moins rentable en termes de prises qu’un leurre moyen qui séduira beaucoup plus de carnassiers. Prendre une « poutre » demande un mental à toute épreuve et un physique pour lancer et relancer des leurres de 50 à 120 grammes ! Ceux qui pratiquent couramment le power fishing et utilisent un jerkbait en ont fait l’expérience et se rappellent peut-être aussi cette méchante tendinite au coude. Rechercher les gros brocs se mérite assurément.
Le big bait, l’arme fatale des leurres
Le jerkbait (leurre secoué, une appellation anglicane) a une place de choix, on trouve le Buster Jerk de CWC, le Deviator (Savage Gear) ou encore le Salmo Slider (Salmo) pour ne citer que les plus connus. Ce sont des leurres utilisés depuis fort longtemps dans les pays scandinaves, ils ont fait leur apparition en France depuis une bonne dizaine d’années. C’est un leurre bruiteur ou non d’environ 60 grs sans bavette, animé canne devant soi par des coups de scion à ras de l’eau vers l’arrière, à droite ou à gauche lors de la récupération, d’où l’appellation « leurre secoué » CQFD ! Ainsi mené, il glisse et plane sur son flanc, redescend et remonte, se rééquilibre puis renouvelle sa danse nuptiale à la conquête d’une grosse femelle ! On dit alors que l’on jerk sans pour autant ramener le leurre à toute vitesse, les pauses sont aussi importantes et souvent c’est à la descente qu’il est capté.
A la différence du swimbait, également un bon leurre en fin de saison, généralement articulé en deux ou trois segments (comme le pointer sans bavette de Lucky-Craft, le Dexter d’Illex ou l’incontournable Swimpike de Biwaa), leurs caractéristiques permettent une récupération linéaire, le jerkbait excelle au contraire par son animation. Pour obtenir des résultats probants, vous serez amené à tester différentes animations qui sont variables selon le jerkbait utilisé, chacun ayant ses propres caractéristiques, de poids, de transfert de masse ou simplement de comportement dans l’eau. Certains sont plus planants, plus chaotiques dans leur progression ou répondent plus rapidement à votre action.
L’initiation est beaucoup plus longue qu’au swimbait à bavette qui « pêche » sans exercer une animation particulière ou comme un gros shad qui peut-être ramené en linaire. Vous aurez probablement des déconvenues dans les débuts, des interrogations sur la valeur du jerkbait, une recherche opiniâtre pour trouver la bonne cadence, sentir la progression du leurre pour toucher, après maints essais infructueux, votre premier poisson. Ce ne sera peut-être pas le poisson de votre vie, mais une première porte qui s’ouvre sur une technique qui a fait ses preuves. C’est aussi cela la pêche : de la persévérance avec une bonne dose d’humilité et une grosse volonté de réussir.
Outre-atlantique, le jerkbait est l’arme fatale pour séduire les gros brochets et ce, pour deux raisons intrinsèques : c’est un gros leurre de plus de 20 centimètres qui évolue de 1 à 3 mètres sous la surface et correspond totalement à la morphologie des lacs peu profonds. Dans nos eaux, il fait recette au printemps et à l’automne car le menu est intéressant, un peu piquant certes, mais copieux ! Les gros brochets à cette période recherchent des proies consistantes afin d’engranger le plus possible de protéines pour passer l’hiver. La touche est souvent violente presque auto-ferrante et vous réveille d’une nuit trop courte, du froid naissant ou de vos rêveries. Souvent on me dit que ce leurre dont on ne conteste pas l’efficacité évolue dans une couche d’eau bien supérieure au niveau de prospection de nos lacs plus profonds comme ceux d’Orient par exemple. C’est vrai que même un modèle plongeant a du mal à plonger au-delà de 5 mètres. Nous contournons l’obstacle depuis plusieurs années (dans l’attente que l’on propose sur le marché des jerkbaits vraiment très plongeants) par des ajouts de plombs placés de façon à ne pas trop modifier les caractéristiques du leurre. Cela nous permet de faire évoluer notre jerkbait dans des profondeurs intéressantes.
Parlez-vous le Zalt ?
Si ce leurre suédois avait pris le nom de salt, nous aurions compris qu’il mettait du sel dans notre pêche ! Le Zalt ne se traduit pas, c’est un Zalt, un point c’est tout ! Par contre je peux vous dire qu’il fait partie de la famille des pullbaits, des leurres tractés et plus précisément « appâts à tracter ». C’est un leurre qui a du « nez » pour trouver les carnassiers, entendez par là, cette forme bien particulière de son museau que l’on ne retrouve nulle par ailleurs et qui fait office de bavette pour lui permettre d’atteindre rapidement sa profondeur de nage. Il vous regarde de son œil proéminent, scrutateur semblant dire : « il me veut quoi celui-là ? ». La partie de son corps fusiforme n’a pas véritablement d’emprise à la masse liquide, ce qui le différencie du jerkbait. Sa nage est pour ainsi dire exclusive car aucun leurre ne permet de réaliser l’animation particulière dont est capable ce leurre suédois issu du concept d’Olsson Bo et de Peter Rolen.
Bien équilibré, son centre de gravité a été amélioré par l’apport d’une grosse bille, il oscille ainsi naturellement lors de sa récupération. C’est un peu un Ovni sur la planète des jerkbaits et la difficulté réside à trouver l’animation adéquate. Il se conduit comme tout swimbait, mais avec une récupération beaucoup plus lente, plus ample suivie de quelques coups de scion à ras de l’eau et une pause. Le Zalt, c’est le champion du « stop and go » pour poisson ankylosé, versatile et peu mordeur. Je vous en parle car il m’a valu quelques réussites au grand dam de mes coéquipiers qui ne savaient plus quoi sortir de leurs boîtes pourtant bien garnies. Non ce n’est pas un leurre miracle mais je crois plutôt que dans les secteurs surpêchés où les brocs peuvent pratiquement vous dire le grammage de votre shad et qu’il s’agit du dernier Westin en 25 centimètres, un leurre boudé ou méconnu du public peut faire la différence et le Zalt mérite de venir garnir vos boîtes.
Qu’il s’agisse d’un jerkbait ou d’un Zalt, il importe de toujours garder le contact et c’est peut-être la plus grande difficulté et une longue initiation, mais je vous assure que c’est « ezaltant » de donner vie à ces leurres un peu particulier, capables de modifier en quelques secondes votre flux sanguin et de vous arrimer…à une poutre !
Tout en souplesse : les leurres souples pour les gros brochets
Difficile de faire l’impasse dans cet article sur les leurres souples big bait pour la pêche du brochet dont le marché exponentiel vous donne la migraine : on ne compte plus le nombre de nouveautés chaque année qui viennent remplir les bacs des détaillants. Tous les gros shads se valent-ils ? Certains émettent des vibrations basses fréquences, d’autres de hautes fréquences, les caudales sont soient plus souples ou plus dynamiques, certains oscillent plus que d’autres et montrent davantage leurs flancs. Un bon gros leurre souple c’est celui qui prend du poisson, voilà bien une lapalissade un peu facile non ? Je prends des brocs aussi bien avec des Ripple shad, que des Westin, même avec des Bandit shad ou des Dexter shad ou des Replicants (armés). Je n’ai pas la science infuse, mais je peux ici assurer mon lecteur de deux choses : d’une part, il importe d’avoir le grammage en adéquation à la taille du leurre et là on est dans du XXL, les animations lentes sont souvent les plus prenantes, et d’autre part, il importe aussi de varier les couleurs. C’est une base à mon sens, essentielle pour animer un gros leurre souple.
Si le concept : gros leurres égal gros poisson, n’est pas toujours une réalité, force est de constater que statistiquement, c’est eux qui rentrent le plus de big fishs, l’automne est une saison propice pour prospecter avec un leurre XXL qu’il soit dur ou souple, l’idéal étant de varier l’un et l’autre notamment si les touches sont inférrables sur une animation avec un souple par exemple. Et même s’ils semblent moins opérants qu’un leurre moyen, ils seront à coup sûr capables de vous faire prendre le même poisson dont la photo sur les magazines halieutiques vous pâme d’envie !