Pourquoi discuter avec des associations qui veulent l’arrêt de notre passion ? Pourquoi leur donner des éléments qui pourraient se retourner contre la pêche ? Pourquoi mettre en lumière des personnes dans leur genre ?
La meilleure défense, c’est l’attaque. Et pour faire mouche dans son attaque, il faut connaître son adversaire et jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas mieux que de discuter pour comprendre. Alors plutôt que de rester passif, nous les avons contacté, pour nous faire personnellement une idée sur leurs positions, mais aussi nous l’espérons pour donner l’envie de les attaquer. Ce n’est pas à nous, magazine halieutique, de défendre la pêche, mais c’est de notre rôle que d’inciter les pêcheurs à prendre les choses en main. C’est notre petite contribution, aussi modeste soit-elle, à ce combat qui risque de durer quelques années. Ne soyez pas dupes, ils savent très bien où chercher les informations compromettantes sur la pêche et lisent certains blogs et consultent des vidéos Youtube sur notre passion. Ils connaissent déjà très bien la pêche, depuis 3 années qu’elle est dans le collimateur et qu’ils lisent des études sur le sujet. Ils savent par exemple ce qu’est un circle hook, ce qui n’est pas forcément le cas de tous les pêcheurs…
Les questions posées à PAZ
Zoopolis
Qui êtes-vous ? (00:02)
Comment est né Zoopolis ? (00:22)
Combien de personnes font partie de Zoopolis et quel est leur statut (Salariés, bénévoles, adhérents, etc…) ? (01:50)
Quel est le budget annuel de Zoopolis ? Quelle est la répartition dons/argent public ?(04:04)
Quelles sont les actions de Zoopolis ? Communication au grand public et lobbying ? (04:15)
Quelles sont les prochaines causes que vous allez défendre ? (07:15)
Zoopolis et la pêche à Paris
Pourquoi le sujet de la pêche de loisir vous a semblé prioritaire plus que d’autres causes animales ? (08:00)
Y a-t-il des pêcheurs, ou des personnes ayant déjà pratiqué la pêche au sein de Zoopolis ? (10:40)
Comment avez-vous procédé pour parvenir à faire voter cette possible interdiction de la pêche au vif et de la fin des ardillons sur les hameçons ? (16:10)
Quelles sont les prochaines actions que vous comptez mettre en place ?
Zoopolis et l’impact de la pêche
Avez-vous conscience du rôle important des pêcheurs au bord de l’eau, notamment de sentinelle des pollutions ? (19:50)
Pourquoi demander l’interdiction de la pêche au vif, et pas l’utilisation des esches animales comme le ver de terre ? (26:20)
Quelles autres pratiques de la pêche vous pose problème ? (1:06:09)
Comprenez-vous les réactions des pêcheurs qui sentent leur passion attaquée alors que les pêcheurs professionnels et la pollution semble faire beaucoup plus de dégâts ?
Ce qu’il faut retenir de ces 1h30 d’entretien avec Zoopolis
PAZ est une association qui semble assez petite mais avec des actions bien visibles. Ils ne touchent pas de subventions et leurs actions reposent sur les dons et les cotisations des adhérents. Pas de souhait de communiquer davantage sur le nombre d’adhérents, s’il y a des salariés ou non, ces informations sont réservées aux adhérents lors de l’assemblée générale annuelle. S’ils ne souhaitent pas communiquer, c’est certainement dû au fait que c’est un des points faibles.
Mais même peu nombreux, leurs méthodes sont simples et efficaces : des actions coup de poing qui marquent les esprits devant des caméras et du lobbying ciblé vers des politiques (19:25), qu’ils soient conseillers municipaux, maires, députés, etc. Si les hautes instances ne leurs sont pas encore accessibles, alors que les liens de la FNPF sont plus solides à ce niveau, il n’empêche qu’en agissant au niveau local ils parviennent à de bons résultats avec on l’a vu des changements à Paris, Bordeaux, Grenoble…
Ils ne sont pas complètement réfractaires à la pêche de loisir lorsque le poisson peut être consommé (20:54), mais aussi et surtout à partir du moment où l’opinion publique reste en faveur de cette pratique. On y reviendra plus tard, c’est très important. Par contre, certaines pratiques ciblées, comme la pêche au vif, qui n’ont plus la faveur de l’opinion publique, seront combattus sur le plan local et national par PAZ (ndlr et certainement d’autres associations animalistes).
Ils ont demandé l’arrêt de la pêche à Paris en 2018, puis la fin de la pêche au vif en 2021. La restriction concernant l’utilisation d’ardillons ne vient cependant pas d’eux. S’ils ne demandent plus officiellement l’arrêt de la pêche à Paris, c’est parcequ’ils savent que l’opinion publique est toujours favorable aux pêcheurs… pour le moment. Et ils travaillent pour faire changer les mentalités et ainsi arriver à leurs fins.
Ils se sont portés partie civile pour un procès de pollution des eaux… Ni l’AAPPMA locale, ni la FDAAPPMA, ni la FNPF n’était partie civile. (22:40)
Ils ont été reçus par la FNPF en 2019 pour exposer leur point de vue et ont fait des demandes, notamment d’un permis de pêche (36:20), avec une formation théorique, visant à sensibiliser sur l’utilisation du matériel, des hameçons triples, des ardillons, de la façon de manipuler un poisson, des dangers pour lui, ainsi que de la meilleure façon de tuer un poisson pour abréger ses souffrances, s’il devait être consommé ou si la relâche semble bien compromise.
Ils souhaitent la fin des lâchers de poissons à des fins récréatives, notamment ceux à quelques jours d’une ouverture. Les lâchers de truite arc en ciel sont pointés du doigts par PAZ.
Les politiques et l’opinion publique, voilà les 2 chevaux de bataille de PAZ, les 2 points sur lesquels ils faut concentrer notre énergie. Si nous perdons l’opinion publique, nous perdrons la pêche, ils ne nous feront pas de cadeau, et ils sont conscients qu’actuellement ce n’est pas possible et ciblent donc des petites particularités de la pêche.
Ce que nous avons exposé et objecté
Leur position se base sur des études scientifiques prouvant que les animaux souffrent et certains agonisent. Cette position scientifique n’est pas partagée unanimement par la communauté scientifique (28:53), et sur le terrain, nous avons de nombreux exemples de captures/recaptures quelques heures après, qui montre bien que les animaux sont dérangés, mais ne souffrent pas non plus le martyr (43:45).
Nous avons voulu leur montrer que les pêcheurs sont de plus en plus conscients de leurs actes (33:00) et de leur pratique de pêche (40:00), qu’ils évoluent, lentement certes, mais vont dans le bon sens, notamment sur la plus jeune génération qui pratique majoritairement le no-kill et qui se soucis de plus en plus des conditions de relâche.
Nous n’avons pas besoin d’une interdiction pour changer nos pratiques (41:25 et 55:50). La pêche au vif ne doit pas être interdite, mais elle doit être effectuée en connaissance de cause et utilisée avec parcimonie autant que possible. Il y a davantage à faire dans la formation et l’information que dans l’interdiction.
Nous avons exposé le fait que la pêche est un tout, et que nous aimons profondément les poissons (1:22:00). La plongée, la pêche sans hameçons, ce sont des alternatives, mais qui ne sont en rien comparables à la magie de la pêche. Car après la touche, il y a le combat, où le poisson a une chance de gagner. La nature, la touche, le combat, voilà le tout qui fait le bonheur du pêcheur et qui le rende accroc à cette passion.
Nous avons également exposé que la pratique de la pêche est une question de balance : aujourd’hui, une grande partie des pêcheurs font plus de bien (vigie, nettoyage, sauvetage) que de mal (souffrance des poissons et quelques victimes collatérales).
Un avis strictement personnel
J’ai une sensibilité écologique et des plaisirs coupables : j’ai pratiqué pendant des années la randonnée motorisée, dans un 4×4 qui consommait plus que de raison, pour me retrouver perdu dans la nature en essayant de voir le moins de bitume possible. J’adore également voyager à découvrir le monde, la faune, la flore… sur les 5 continents. Et je pêche, car j’aime ce contact avec la nature, tout en ayant conscience du mal que je peux faire aux poissons que je vénère pourtant. Schyzophrène ?
Il y a d’excellents textes qui sont parus à ce sujet sur 1max2peche, avec des réflexions sur le no-kill de Jocelyn Mouchène, un autre sur le sujet par Morgan Calu, et un bel exposé d’Anthony Villière visant à expliquer aux animalistes comment on peut être très sensible à la cause animale tout en continuant de pratiquer la pêche.
A titre personnel, je pense que c’est une question de balance. Tant que l’on fait plus de bien que de mal, on peut continuer. Lorsque nous ferons plus de mal que de bien, il faudrait alors arrêter… ou plutôt changer ses pratiques car nous devons progresser à ce niveau.
Comment j’ai changé ma pêche lors des 15 dernières années ?
Premier exemple concernant la carpe, je ne fais pratiquement plus de photos des poissons. Ils sont décrochés en priorité dans l’épuisette, s’ils méritent une photo, la photo se fait dans l’eau. Les sortir de l’eau est problématique pour leurs organes, ils se blessent facilement en se débattant, etc. Je limite donc au maximum en simplifiant les choses : le poisson reste pratiquement toujours dans l’eau : décroche, photo et relâche !
Pour le carnassier au leurre, je n’utilise plus que 4 branches maximum : 1 simple et un triple. Et lorsque j’emploie un triple et qu’il y a des brochets dans les environs, je mets du titane. Cela évite de se faire couper par un petit brochet qui potentiellement se retrouve avec le bec cloué par un triple. J’envisage d’évoluer et de passer soit avec des triples sans ardillon, soit de passer sur 2 assist-hook pour éviter le titane qui n’est pas très discret. Je ne change en revanche rien dans ma pêche au big bait avec 2 triples (qui ciblent les gros poissons). Mais vu mes résultats avec cette technique que je pratique occasionnellement, je ne fais pas de mal à grand monde…
Le circle hook ?
Lors d’un voyage de pêche au Costa Rica, j’ai utilisé pour la première fois des circle hook pour pêcher au vif. J’ai été étonné de voir à quel point les prédateurs, comme les sardines qui servent d’appât, pouvaient repartir à l’eau en bonne santé avec ce procédé ! On est sur le principe de la pêche de la carpe, à savoir que l’hameçon va venir se piquer pratiquement à chaque fois sur le coin de la bouche du poisson, sur des parties peu sensibles. Concernant le vif, c’est un joli piercing et beaucoup de stress comme peut l’être un vif sur un fireball. Une pêche qui reste compatible avec ma considération animale, même si elle est loin d’être parfaite… je m’efforce de prendre du plaisir en limitant raisonnablement mon impact. Préservons le terrain et nos partenaires de jeu le plus possible !
Côté silure, je reste avec mes vers de terre autant que possible, et j’assume la cruauté de cette pêche, car eux ils font vraiment la tête lorsqu’ils sont sur un hameçon. Je m’accorderai certainement une petite entorse à cibler quelques gros spécimens au fireball. Les vifs ne sont pas trop abimés et il m’est régulièrement arrivé de les relâcher après une pêche infructueuse avec un bon espoir de survie. J’ai conscience de mes actes, je pourrais m’éviter cette pêche mais je l’assume en me disant que la balance de mon impact reste largement positive.
Côté truite, je la pratique pratiquement uniquement au toc. Le week end de l’ouverture, je prélève les arc en ciel pour les offrir à mes parents, car je me dis que celles qui mordent sont les plus idiotes et que ce n’est que la sélection naturelle qui s’applique avec mon rôle de prédateur. En revanche, toutes les farios repartent à l’eau avec l’espoir d’une belle reproduction. Après le premier week end d’ouverture, les arc en ciel également retournent à l’eau, même si elles ne se reproduisent pas. Car j’ai toujours le secret espoir qu’elles grossissent et que je puisse les reprendre les années suivantes. Et bien entendu, si un poisson devait engamer trop profond ou que la décroche est compliquée, il est tué pour être mangé. Entre l’agonie d’une mort certaine et le no-kill intégral, j’ai choisi mon camp.
La bataille de l’opinion publique et rien d’autre !
Gardons cette bonne considération de l’opinion publique et rien n’arrivera au monde de la pêche. Aujourd’hui on nous observe, on scrute nos pratiques pour les exposer à l’opinion publique et nous décrédibiliser. A nous de montrer que l’on pratique notre passion en connaissance de cause et de manière assumée, en montrant de bonnes actions, à l’échelle locale*, régionale et nationale, issues du monde de la pêche de loisir, comme le nettoyage des berges, l’initiation des bonnes pratiques auprès des enfants, et bien entendu l’image renvoyée lorsque nous pêchons à la vue de promeneurs. Soyons exemplaires au bord de l’eau et allons combattre les animalistes sur leur terrain, celui de l’image, c’est à mon sens le meilleur moyen de remporter cette bataille face aux animalistes, bien plus efficace que d’essayer de démonter leurs arguments et leurs contradictions.
* La fédération de pêche du Rhône fait un remarquable travail sur les réseaux sociaux depuis plusieurs mois. En plus de faire bouger les lignes sur la réglementation (fenêtre de capture), ils communiquent beaucoup à l’intention des pêcheurs, et ils communiqueront certainement davantage auprès du grand public à l’avenir.
Dans les prochains jours, nous souhaitons donner la parole et nous entretenir avec l’Union des Pêcheurs de France, groupe Facebook créé à la suite de l’interdiction de la pêche à Paris, à l’Union des Pêcheurs de Paris, directement concernés par les attaques de PAZ depuis 2018, ainsi que la FNPF. To be continued…