Que l’eau soit vive ou dormante, la façon de construire sa partie de pêche est, comme tout autre aspect tactique, d’une importance de tout premier ordre. En lac de montagne, il y a ceux qui pêchent à poste fixe et ceux qui arpentent les rives en quête de salmonidés actifs ! Voyons les critères qui régissent le choix de la meilleure tactique. Parmi tous les éléments qui entrent en jeu, le plus important selon moi est le nombre de poissons actifs au moment où l’on pêche. Pas besoin d’une grande expérience pour comprendre si les salmonidés sont « dehors » : gobages, poissons visibles sur les bordures… autant d’indices qui ne trompent pas ! En cas de situations douteuses (notamment lorsque les truites chassent exclusivement en pleine eau), quelques coups de lignes suffisent à confirmer ces supputations.
Tout dépend de l’activité des truites
Lorsque la partie de pêche s’annonce bien, je choisis une pêche assez confinée aux endroits jugés les plus porteurs, en fonction des facteurs classiques (postes types, profil du lac, vent etc.). Les postes de chasse les plus fréquemment occupés sont les berges en pente douce, les haut-fonds, la berge recevant le vent, les herbiers, les arrivées d’eau… C’est typiquement dans ce genre de situation que la pêche à la mouche sèche, depuis un promontoire rocheux, est un régal. Si les poissons se déplacent, cela vous dispense de grande course, à condition de rester discret pour les laisser venir à vous sans méfiance ! Scrutez les bordures !
Au contraire, si peu d’individus semblent disposés à mordre, j’opte pour une pêche mobile, si possible avec une technique capable de couvrir pas mal de terrain (mouche sèche draguée, vairon manié, bombette…). Exactement comme en eaux vives, le fait d’augmenter le linéaire parcouru permet de sauver la mise quand la pêche est dure. En plus des postes de chasse classiques susceptibles de contenir quelques individus isolés, il est bon de rechercher à ce moment-là les secteurs où les salmonidés viennent s’abriter (éboulis, zones d’ombres, abord de falaises…) pour les tenter à domicile ! Certains jours (les plus fréquents) vous trouverez quelques poissons actifs sans que cela soit la folie. Dans ce cas, je préfère me déplacer avec la technique qui me semble la mieux adaptée, mais aussi celle dont j’ai le plus envie, c’est important pour réussir ! L’activité des poissons est souvent corrélée avec le moment de la journée. De façon générale, l’activité et donc les déplacements des poissons sont au plafond le matin avant 10h et le soir après 18h. Les moments de calme plat surviennent en milieu de journée, surtout si la matinée a été fructueuse (les poissons ont alors fini leur repas). Il est à noter que la pêche de certaines espèces grégaires, telles que le cristivomer ou l’omble chevalier, est un cas à part, dans la mesure où les individus se concentrent souvent sur des zones particulières. Attention donc à ne pas conclure hâtivement d’une inactivité des ombles, car il est possible qu’ils se soient regroupés sur un secteur voisin, la connaissance du lac aide alors beaucoup !
Savoir le nombre de postes
Ceci permet de faire le lien avec le deuxième critère qui entre en jeu dans le choix de prospection : il s’agit de la quantité de postes favorables. C’est un fait, en fonction des conditions du moment, le nombre de secteurs intéressants pour la pêche peut se réduire considérablement. Prenons un cas extrême pour illustrer le propos. Sur un lac peu profond par une après midi aoutienne brûlante, il y a peu de chances pour que le poisson se tienne dans la faible lame d’eau, où le soleil cogne. On a souvent le loisir d’observer de grandes étendues complètement vides (surtout si elles sont sédimenteuses et sans rocher). Par contre, si une rive de ce même lac comporte une falaise, avec quelques blocs créant des zones d’ombre et une fosse, attardez vous sur cet endroit où les probabilités de capture sont bien plus élevées !
A l’inverse, plusieurs postes marqués et rapprochés gagnent à être pêchés les uns à la suite des autres, sans insister exagérément. Mieux vaut chercher du neuf après avoir abordé méthodiquement chacun des coups qui s’offrent à vous. Si vous pêchez l’eau, quel que soit le poste, après une approche pédestre discrète, débutez par des lancers très près du bord, et éloignez les progressivement de façon à ne pas effrayer les poissons collés à la berge si vous piquiez un individu au large au premier coup de ligne… Si de nombreux salmonidés sont postés et bien disposés, cette méthode d’approche vous permet de tirer le meilleur profit de ces conditions favorables !
Mais se faire plaisir aussi
Enfin, le dernier élément que nous pourrions évoquer est tout simplement le gout naturel de chacun. Tout le monde n’a pas les mêmes motivations, surtout en lac de montagne ! Ceci est valable pour la tactique de prospection, mais également pour le choix de la technique. En effet, alors que les uns choisissent sans concession le mode de pêche le plus efficace du moment, d’autres privilégient l’agrément de capture. Allez expliquer à un amoureux de la mouche sèche que ce matin, manier un vairon est souverain, vous verrez sa réponse ! De même, il est aisé d’imaginer un pratiquant assidu des eaux vives, trouvant son bonheur dans une pêche reposante et contemplative en lac d’altitude, notamment au bouchon ! Ces pêcheurs avouent volontiers qu’il serait parfois plus productif de procéder autrement mais qu’importe, ils restent fidèle à leur technique et c’est tout à fait respectable ! Cette notion de plaisir a d’ailleurs toute sa place durant ces randos-pêche où le bonheur se puise parfois autant dans l’environnement que dans le nombre de poissons mis au sec ! Pour le pêcheur occasionnel qui découvre de tels charmes, quelle volupté que de se retrouver à plus de 2000m d’altitude dans une nature encore sauvage et préservée !