Lorsque l’on me pose la question : « Avec quelle technique vas tu faire ton ouverture truite ? », je répond invariablement depuis plus de 15 ans : « Au vairon manié bien évidemment ! ». Je ne connais aucune autre technique aussi efficace, ludique, subtile que le vairon manié et chaque année j’en fait la démonstration à mes collègues de pêche. Il n’existe pas une technique du vairon manié mais plusieurs et celles ci s’accompagnent d’autant de montures adaptées à chacune.
De mémoire, il n’y a que deux fois, par eaux basses, claires et très froides que ma monture à vairon s’est faite surpasser par la cuiller. Désormais, j’ai toujours deux cuillers dans ma boite à montures à vairon, j’ai compris la leçon. Pour autant je ne connais aucune technique de pêche qui soit si efficace et régulière envers la truite, pourquoi ? Je m’interroge à ce sujet depuis de longues années et si j’ai bien une petite idée, je n’en ai aucune certitude donc j’en reste aux faits et aux constations.
J’apprécie particulièrement la monture « Ariel », celle qui comporte un disque de plexiglas qui sert de déflecteur et permet au vairon de vibrer et ainsi d’avoir un semblant de nage très naturelle. C’est elle qui m’accompagne le plus souvent mais vous verrez au fil de cet article que je n’utilise pas que celle là. Le biotope dans lequel je pêche la plupart du temps sont des rivières du piémont du Morvan, rivières aux eaux acides, fraîches, allant de 3m de large à plus de 15m et presque toujours avec des fonds caillouteux donnant de multiples veines de courant.
Il est utile de préciser que les truites du Morvan ne sont jamais très grosses, ma plus belle ne mesurait que 42 cm et ne saurait être comparée aux géantes des rivières du jura ou alpines. Mes montures ne sont donc jamais très grosses et mes vairons ne dépassent pas 8 cm. La majorité de mes prises mesurent de 25 à 35 centimètres et me permettent de pêcher assez fin. Si vos truites sont en moyenne plus grosses il vous faudra adapter mon propos en augmentant les tailles de nylons et d’hameçons.
Matériel pour pêcher au vairon manié
Je risque de contrarier les puristes mais pour pêcheur au vairon manié j’ai laissé de coté la canne de 2,7 m ou plus pour une plus fine et confortable de 2,2m. J’ai trouvé mon bonheur chez Smith avec une superbe Dragonbait Trout dont la finition est à la hauteur de l’action.
Bien évidemment avec cette canne je ne peux pas déposer ma monture dans un chaudron pour l’animer sous la canne, je suis obligé de lancer mais en rivière plus large cette taille me permet de me glisser partout sans trop être gêné par les branches.
Cette longueur est quand même quelquefois limite du bord lorsque l’on ne peut pas rentrer dans l’eau mais ce coté négatif n’obère pas tous les autres avantages d’avoir une telle canne.
Les animations seront plus précises, les lancers aussi et le poids de la canne ne vous donnera pas des douleurs à l’épaule au bout de deux heures de pêche.
Il n’y a selon moi qu’en pêche à rouler, lorsqu’on laisse sa monture se faire emporter par le courant et le dévaler qu’une longue canne assure un meilleur contrôle, sinon une canne dont la longueur avoisine les 2m est un compromis idéal.
Pour la puissance de cette dernière j’ai choisi un grammage de 4/10 g, les montures pèsent généralement 2 à 4g et le poids du vairon fait monter le tout à 6/7g. Pour le vairon manié il faut de préférence rester dans la plage optimale d’utilisation car on doit garder ce petit plus de raideur dans le scion pour bien manœuvrer son ensemble monture vairon mort.
Concernant le moulinet je suis un adepte des tailles standard et après avoir pêché avec une taille 1000 pour gagner en poids je suis revenu à un 2500. La bobine est un peu plus large, le frein un peu plus puissant et l’équilibre de la canne s’en trouve amélioré. J’ai testé nombre de marques et de modèles et aucun moulinet ne m’a déçu du moment qu’on en utilise un de qualité. Pour cela j’achète désormais mes moulinets dans la gamme des 150/200 euros, ça peut paraître onéreux mais pour un pêcheur régulier c’est ce qu’il convient d’avoir pour ne pas subir d’avaries lors d’un combat avec un joli poisson.
Je suis aussi un adepte inconditionnel de la tresse pour les sensations qu’elle procure. La pêche au vairon manié étant une pêche tactile où la touche peut se produire sur un simple ramener comme sur un instant où l’on rend la main, j’ai besoin de bien la sentir et pour cela la tresse est idéale. La huit brins est toute indiquée pour sa finesse et sa capacité à ne pas gêner l’animation de la monture comme pourrait le faire une quatre brins gorgée d’eau. Bien entendu pour des raisons de discrétion et pour éviter le contact de la tresse avec les cailloux je monte une petite tête de ligne d’environ 1,50 m en fluorocarbone de 20 centièmes que je termine par une agrafe n° 0.
Voilà pour l’équipement de base du pêcheur qui ne demande en plus qu’un bon gilet multi poches, des cuissardes et de bonnes paires de lunettes polarisantes. L’épuisette aussi est importante et j’utilise un modèle pliant très pratique fabriqué en France, l’Ayu de Pafex me permet d’emmailloter les truites sans les abîmer. J’ai arrêté de saisir les truites à la main depuis quelques années car je considère qu’une épuisette leur fera toujours moins de mal si on veut les relâcher qu’une main.
Terminons avec le petit seau à vairon qu’on transporte en bandoulière et qui grâce à un panier amovible permet de choisir son vairon.
Le reste tient dans une boite pour mes montures et une autre qui contient trois bas de lignes déjà prêt enroulés sur un plioir en mousse et accompagné de l’aiguille à locher que je stocke dans un corps de stylo bic.
Avec tout cela, si peu diront certains, on est paré pour affronter les plus petits ruisseaux et les plus belles rivières sans se fatiguer à trimballer dix boites de leurres.
Quid des montures à vairon manié ?
Voilà certainement l’élément clé pour la réussite de cette pêche : la monture ! Sans plusieurs types de montures pas de partie de pêche réussie. Si je précise les montures c’est qu’il y a une bonne raison que je vais tenter de vous démontrer au travers de la présentation des différents modèles du marché.
Ma préférée est l’ Ariel ou la monture clou équipée d’un disque de plexiglas, rhodoïd ou autre matière plastique transparente.
On trouve désormais cette monture sous différentes marques et elle est plus communément appelée « nageuse ». La caractéristique principale est de contenir la majorité du lest dans le poisson, le bas de ligne sera inséré dans le vif par l’anus, passera à travers la monture et ressortira par la gueule, le disque de plastique jouera le rôle d’une bavette de poisson nageur et fera frétiller la queue du vairon en imitant un de ses congénères vivant.
C’est une monture à l’origine faite pour pêcher les lisses et exploiter un maximum de terrain. Assez fastidieuse à mettre en place surtout en mars avec les doigts gelés, elle nécessite l’usage d’une aiguille à locher afin de passer le bas de ligne à l’intérieur du vairon. Afin que ce dernier ne se tasse pas contre l’hameçon en prenant une courbure peu attirante, je glisse un petit morceau de scoubidou préalablement coupé à la bonne taille entre le triple et la monture afin de rigidifier la partie dans l’intérieur du vairon. Pour ce faire c’est simple, je présente le vairon mort à coté de mon ensemble hameçon triple, monture et j’en déduis les quelques millimètres à couper.
Lorsque l’on a pris l’habitude, changer son vairon sur une telle monture ne prends guère plus d’une minute et la présentation est au top.
La seconde monture que j’utilise est le modèle de Vario Pêche, j’en fais toujours le plein lors du salon de Clermont-Ferrand car ce génial inventeur y tient un stand où il vend ses créations.
La particularité de sa monture est d’être en forme de clou mais avec une tête décentrée qui servira de quille. Moins nageuse que la précédente, c’est une monture qui permet de pêcher plus classiquement en la maniant sur le fond ou devant la cache supposée d’une belle fario. Là pas besoin d’aiguille à locher puisque le triple se trouve attaché à un avançon en tresse qui se fixe classiquement sur le flanc du vairon.
Je terminerai ce choix avec une autre monture simple mais efficace, la monture Armor Vif qui se fixe par épingle dans la gueule du vairon, on l’arme par un triple tenu lui aussi par un avançon.
Cette monture très mobile permet en outre de pêcher au vif devant une cache supposée car l’épingle ne blesse que peu la gueule du vairon qui pourra énerver la truite par ses mouvements naturels.
On pourrait aussi citer la monture Drachkovitch, Plasseraud…..qui sont utilisées par nombre de pêcheurs.
La technique à mettre en œuvre pour pêcher la truite au vairon manié
En préambule je me permettrai de revenir brièvement sur le point important qu’est la discrétion. La truite est un poisson peureux qui n’apprécie pas les mouvements brusques et une fois dérangée elle ne mordra plus, il est donc indispensable de se déplacer lentement sans taper du pied. Les lancers eux aussi se feront le plus discrètement possible en amont du poste visé de façon à ce que le vairon passe sur le poste avec le plus de naturel. J’ai constaté après de nombreuses années de pratique que les touches se faisait toujours au ras du fond et que quelquefois une truite pouvait suivre votre monture jusque dans vos bottes avant de se décider à mordre, soyez donc attentif et concentré.
Si la discrétion prévaut pour le pêcheur, elle prévaut aussi pour le reste. Oubliez la canne fluo ou d’un rouge pétant pour un modèle discret car quelquefois vous devrez littéralement poser votre monture devant le nez d’une truite postée contre une souche.
J’emploie une tête de ligne en fluorocarbone comme précisé plus haut pour la discrétion mais aussi pour faire tampon entre ma tresse et les cailloux râpeux. La tresse sera de couleur neutre, pour ma part la mienne est verdâtre.
Et pour terminer, je m’habille en guerrier, ce n’est pas à la mode je sais mais une veste camouflée et une casquette de même nature cassent la silhouette humaine et permettent de réussir des approches à vue.
Où lancer votre vairon à la recherche des truites?
Une rivière, pour simplifier à l’extrême comporte une zone centrale de courant, et deux zones latérales plus calmes. Généralement à l’ouverture et peu après, les truites se postent en plein centre et au plus profond de la partie de rivière si celle ci n’est pas en crue. J’attaque en pêchant plein amont ou ¾ amont selon la disposition des lieux. Je lance au centre de la rivière et laisse dériver mon vairon canne haute en le soutenant puis je mouline lorsqu’il me revient dessus. Une fois la veine principale explorée je passe au coté le plus proche de moi par la même méthode puis celle la plus loin de moi par des lancers en éventails en cherchant à envoyer mon vairon au ras de la berge opposée.
Bien entendu on s’accroche souvent et on laisse quelques montures au fond de la rivière mais quel plaisir de passer juste derrière un copain qui vient de ratisser le coin à la cuiller en ne faisant que des lancers perpendiculaires sans aucune touche !
Je suis un pêcheur matinal et plutôt solitaire à la truite, j’aime bien arriver un peu avant l’aube pour voir le jour se lever doucement et surprendre les truites en maraude. Au fur et à mesure que le jour se lève, mes truites morvandelles vont aller se caler sous une pierre ou une souche et il sera difficile de les y déloger. Le coup du soir est aussi un moment magique, celui où les bruits de la nature s’estompent doucement comme étouffés par de la ouate. On entendra alors les chasses ou les gobages des poissons qui n’auront plus entendu les pas lourds des pêcheurs de journées depuis un bon moment, et bien entendu leur activité sera décuplée.
Mettez de côté toutes ces vérités avec les truites surdensitaires, celles-ci au contraire aiment le bruit, signe de distribution de granulés… Elles sont actives toute la journée et plus vraiment le soir.
On les retrouve en fin de courant, dans les zones improbables et leurs touches au vairon sont plus timides. Mais qu’une de ces truites survive deux mois sans être piquée et elle deviendra aussi farouche et combative que ses congénères de souches.
La pêche au vairon manié vous obligera à pêcher différemment, plus calmement, en analysant les courants, les postes. Cette lenteur sera mise à profit pour admirer la nature vous entourant, pour réfléchir à la tactique mise en œuvre ce jour là. Cette pêche est l’une des plus intéressante parce que justement elle oblige à s’adapter, à réfléchir, changer de type de monture en fonction des postes, de grammage en fonction de la profondeur ou du courant. Et fatalement, vous deviendrez meilleur pêcheur et le nombre de prises s’en ressentira !
Vous aimez pratiquer la pêche à la truite? Alors découvrez comment pêcher la truite en utilisant différentes techniques de pêche efficaces.