Les placements de ligne à première vue désespérés ou en dépit du bon sens changent parfois le cours d’une session carpe. Autant de coups de bluff ou de coups du sort qui finissent couronnés de succès. Décryptage.
On sait désormais que lorsque l’on aborde une eau fortement pêchée, le réflexe doit être de poser des lignes dans des endroits qui ne sont pas matraqués toute l’année. La carpe d’elle-même se cale dans des endroits moins nourriciers, si elle y gagne en confort et sécurité. Les carpes cherchent à éviter les barrières de bannières et le stress des captures à répétition. Or pêcher hors des zones criantes de danger pour la carpe ne suffit plus toujours. En effet nous sommes très nombreux à pêcher la carpe et chacun s’engouffre trop vite dans la stratégie de l’autre. Dès lors, optez pour l’audace et le grain de folie ! Faites le choix de l’anti stratégie ! Cela consiste à aller plus loin dans la dépose de ligne culottée, à franchir des barrières psychologiques pour enfin « oser ». Celà vous amènera parfois à pêcher volontairement les zones considérées comme « pas stratégiques » ou d’utiliser des stratégies novatrices. Par anti stratégie à la carpe, on doit comprendre : mise en place d’une stratégie quasi anormale, insolite et à la limite de l’invraisemblable. Parce que comme vous allez le voir dans les cas qui suivent, les inexplicables et improbables placements de ligne génèrent des touches ! Chaque poisson a un comportement unique. Chaque pêche a son contexte unique. Standardiser la pêche est donc peu judicieux. Voici justement 3 exemples ultra concrets pour vous prouver le bien-fondé du hors-piste carpiste…
Anticiper l’arrivée de la blanchaille
L’anti stratégie n’est pas le fruit d’une loufoquerie totale mais enfant d’une profonde réflexion. Laissez-moi vous narrer la fois où nous avons -avec un ami- tapissé le fond d’un plan d’eau sur une bande de 5 mètres par 50 mètres avec 100 kilos de maïs. Explications… Nous aimons pêcher des lacs de plaine et autres gravières à grosses carpes. Le hic, c’est souvent la présence d’écrevisses, de silures, de tortues ravageuses, de gardons XXL, de chevesnes affamés, et de hordes de carassins. Mais la palme du poisson blanc le plus pénible revient en général à madame la brème qui a un pouvoir de nuisance particulièrement efficace. Nous ne comprenions pas pourquoi 3 kilos de maïs disparaissaient aussi vite lorsque nous posions une ligne à 150 mètres du bord après d’intenses efforts à la rame, pour lutter contre le vent et les vagues. Des bancs de brèmes inimaginables se dispersaient autour du bateau pneumatique à chaque sortie de dépose ou d’amorçage. Des boules de 20 ou 30 brèmes… voire des rassemblements de 50 brèmes ?! Les pronostics allaient bon train. Et l’amorçage lui… disparaissait invariablement. Augmenter les doses ne servait strictement à rien. Si bien qu’à force de passer pour des affabulateurs, avec nos histoires de brèmes avalant 10 kilos de maïs en 30 minutes, nous avons trouvé un moyen de prouver notre théorie par des clichés aériens. Les résultats étaient stupéfiants. Nous avons compté sur plusieurs photos entre 150 et 200 brèmes regroupées, prêtes à passer à table. Et ce pour chaque banc, car oui… il y en avait plusieurs de cette taille ! Pour cette session, nous avions du maïs gratuitement, fourni par un copain agriculteur. Les carpes s’en goinfraient mais, perdues dans la masse de la blanchaille ; il était difficile de les prendre. Nous avons conclu cette semaine de courses à l’amorçage, après de multiples aller-retour et cuissons à la maison par tapisser le fond de 100 kilos de maïs. Nous sommes allés au bout de la logique de surenchère, en dépit de toute stratégie qui nous disait dans un coin de la tête : « N’amorce plus un seul grain de maïs ou tu ne prendras plus que des brèmes ! ». Et nous avons fini par épuiseter de très belles carpes qui relâchaient une quantité impressionnante de maïs dans les sacs de conservation ! Nous avons accepté une stratégie d’attractivité forte sur toute la blanchaille ; et ainsi opté pour une émulation plutôt qu’une pêche d’attente qu’aurait pu être mise en place avec des appâts XL ultra sélectifs.
Décoller vos appâts et vos résultats !
A la faveur d’un capot mémorable il y a quelques années, le monsieur « je sais tout » du coin vient me coller les bottes jusqu’à minuit. Une plaie quand on cherche le calme au bord de l’eau ! Je vous raccourci la rencontre… grosso modo… ça a été l’un des moments les plus pénibles que j’ai pu vivre à la pêche. Du flot de paroles ininterrompu qui est sorti de sa bouche durant 3 heures, il y a eu un « Décolle ton appât de 50 », suivi d’un « Et tu m’en diras des nouvelles ». J’étais au bout du rouleau, je me sentais capot, en mode clochard au bord de l’eau, je n’attendais plus rien de cette session. Quand le gars fut parti, je suis allé poser une canne à raz d’un énorme massif de potamots, en décollant mon montage comme jamais je ne l’avais fait avant. Deux heures plus tard, j’enregistrais mon unique touche de la session, sous la forme d’une carpe miroir bien épaisse. La session était finalement une franche réussite. Je rentrais comblé 24 heures plus tard, sans néanmoins avoir enregistré de seconde touche. Mais l’essentiel était là : un déblocage mental. Alors depuis, bien des pêches se sont passées ainsi. Et je peux vous affirmer que de décoller ça rapporte des carpes c’est certain ! On peut aller plus loin… Poussons un peu le vice ; je vous propose de fouetter ce montage n’importe où. Vous êtes sceptiques et mettrez peut être des années avant de tenter une pareille imbécilité ? Pourtant vous seriez bluffé par les possibilités d’attraper des poissons bonus grâce à cette présentation hors norme. Encore une fois, tout s’explique. Parce que ce qui semble déraisonnable à première vue, peut séduire exactement au bon endroit une carpe curieuse s’alimentant d’escargots dans les herbiers ou simplement entre deux eaux. La pêche reste un loisir très empirique. Tant qu’on n’a pas essayé et qu’on a pas pris… on n’a pas appris ! Ça se joue dans la tête ce genre de pêche. A force de vouloir tout assurer parce que l’on n’aura « pas le temps de revenir pêcher de sitôt », on reproduit des schémas de pêche qui conduisent à des demi-succès. Si vous êtes vraiment en manque de confiance, utilisez donc un protège hameçon en mousse soluble afin de protéger la pointe ! Le flocon de PVA fondra en général en une minute dans une eau fraiche. A vous de fouettez dans l’inconnu !
« Tout se passera sur la 8 ème canne ! »
La 8ème canne pourrait à elle seule faire couler beaucoup d’encre. Elle est souvent celle que l’on n’a pas pu poser avant la nuit… parce qu’en pêchant à deux, on économise souvent en logistique en prenant un bateau pour deux. Et on sait qu’il est quasiment impossible d’arriver en fin d’après-midi sur un plan d’eau et de finir les déposes de 8 cannes avant la nuit… La 8ème canne, c’est aussi un peu une hérésie en soit car pêcher à 8 cannes, c’est tisser une toile d’araignée contreproductive. Mais admettons… comme nous l’avons tant fait… de pêcher en binôme à 8 gaules. Et portons un regard sur ce que « produit » la 8ème canne en termes de départs de carpes. A la lumière de mon carnet de pêche, je me suis rendu compte que les sessions avec Pierrick témoignaient d’un certain succès de la 8ème canne. Et après réflexion, il semble que cela ait du sens… Pour comprendre, il faut replacer l’explication dans le contexte. Nous avons abordé plusieurs fois un lac arborant de grands haut fonds vraiment magnifiques. Or ces derniers se révélaient de plus en plus stériles en touches d’années en années. Devant cet état de fait, nous avons commencé par pêcher de manière « un peu space » avec une 8ème canne en tête chercheuse. Ou plus exactement, la 8ème canne était toujours celle qui étaient posée en pleine nuit… on ne savait pas toujours où. Parfois l’un de nous grattait le fond pendant 30 minutes et revenait dépité en expliquant qu’il avait posé en pleine dérive dans le vent sur un micro haut fond, peut être une petite tache de 25 cm par 25 cm… (Il serait impossible de le retrouver). Et souvent le retour du poseur de ligne s’accompagnait du fameux : « Et bien tant pis, elle fera rien mais, elle est à l’eau… », cette fameuse phrase qui déculpabilise d’avance son auteur pour le capot qui va frapper cet odieux placement de ligne. Et bien laissez-moi vous dire que ces placements de ligne sur des micros spots et sur des spots que nous n’aurions jamais choisis en pleine journée ont produit parmi les plus grosses carpes en 2014 et 2015 sur ce lac. Il y a fort à parier que les carpes fouillent et labourent tous les minis hauts fonds et toutes les petites zones, aussi minimes et insignifiantes soient elles. Inutile de dérouler plus l’argumentaire sur l’anti stratégie ? Changez de logiciel de pêche, vous renouerez avec les départs !
Les vertus de l’anti stratégie !
- Aucun risque ! Quand ça ne mord pas, vous ne prenez aucun risque à part celui de renouer avec les touches !
- Tout tenter ! Vous aurez la sensation d’avoir tout tenté et peut être du coup, d’avoir assez bien pêché et retrouverez le gout de la traque et de l’expérimentation.
- Carpes bonus. Vous avez l’opportunité de prendre des carpes bonus que personne ne prendra en pêche classique parce que précisément vous avez un mode opératoire ultra particulier.