La pêche de la carpe au printemps est une pêche singulière avec les jours qui rallongent et les températures qui s’adoucissent. Outre le réchauffement climatique qui nous offre des hivers plutôt cléments, l’arrivée des beaux jours est tout de même appréciable et le regain d’activité aquatique nous le fait remarquer à chaque sortie. Oui, cette superbe période de l’année est l’occasion de ressortir le matériel pour les pêcheurs les plus frileux et de contempler la nature qui offre un spectacle merveilleux : le printemps.
Effectivement, cette saison signe pour Dame Nature, une nouvelle étape. Elle consiste à remodeler le paysage hivernal, triste, froid et pauvre en couleur, en un monde actif, gai, tempéré et riche en tonalité. Le printemps est donc une période de transition. La vie aquatique n’échappe pas à cette règle. Dès lors que la photopériode augmente significativement et que la température de l’eau s’adoucit, les végétaux aquatiques commencent à sortir de leur substrat, la microfaune s’active constituant dès lors, une manne indispensable au développement des poissons juvéniles ayant tout juste résorbés leur vésicule vitelline. Il ne s’agit dans un premier temps que des carnassiers : brochets, perches, etc. Puis les poissons blancs à leur tour se reproduisent. Ce n’est qu’en fin de printemps que nos carpes favorites se livrent à leurs ébats amoureux. Mais avant cela, elles doivent, dans un premier temps, reconstituer leurs réserves énergétiques bien entamées par la période hivernale. Par la suite, il leur faut se préparer à la période de fraie. Dans ces quelques mois, les poissons préfèreront les zones peu profondes qui se réchauffent donc plus rapidement et produisant ainsi le plus de nourriture. La température plus chaude aide également à une meilleure digestion et assimilation des nutriments, mais également contribue à la maturation des œufs.
Le printemps promet donc de belles parties de pêche si l’on se réfère à ce qui est dit plus haut. Certes, il est tout à fait possible d’obtenir d’excellents résultats, tout comme il est possible, malgré une forte concentration de poissons sur la zone pêchée, de ne pas faire un seul « bip ». Nous allons observer cela plus en détail pour comprendre les mécanismes.
La sortie de l’hiver pour les carpes
Dès que la température dépasse les 10/12°C, les carpes se mettent à s’alimenter correctement. Elles doivent choisir une nourriture assez riche pour combler les éventuelles carences qu’elles auraient pu développer pendant leur hibernation, ainsi que « remettre à jour » les réserves caloriques. Que cela vous rassure, ce ne sera pas le cas cette saison car cet hiver fut d’une exceptionnelle douceur et les poissons ont pu s’alimenter normalement. Il y a même fort à parier que nous n’assisteront pas à la courte frénésie qui signe la fin de l’hiver. Effectivement, les faibles gelées n’ont pas été suffisantes pour que les poissons ne cessent de s’alimenter.
Une fois les carences hivernales et les provisions énergétiques reconstituées, la course à la maturation des gonades peut commencer. Une alimentation riche en lipides et protéines et acide aminés fait à présent partie du régime alimentaire, mais ceci de manière plutôt modérée. Suffisamment pour achever la formation des ovocytes, sans pour autant favoriser la présence de graisse dans la cavité abdominale qui devra laisser la place aux œufs justement. Il en est de même pour les mâles qui vont fabriquer leur laitance.
Vous l’avez compris, les poissons, notamment les femelles, ne peuvent pas beaucoup se nourrir, juste ce qu’il faut pour leurs besoins. Cela se traduira ainsi par de courtes périodes d’alimentation à des moments clés. Le lever du jour, une dépression, des heures précises en cours de journée ou de nuit qu’il est à vous de déterminer sont les moments à ne pas rater. Si l’on ajoute à cela une abondante nourriture naturelle, il vous faut opérer de manière chirurgicale avec les bons appâts afin d’obtenir les résultats escomptés.
Le reste du temps, les poissons se cantonnent dans les couches d’eau les plus chaudes afin de favoriser la maturation des gamètes. Il vous est ainsi possible d’observer des carpes en surface, généralement dans des zones peu profondes ou qui reçoivent énormément de soleil ; ce dernier favorisant le réchauffement de l’eau.
La fraie
Arrive ainsi la période des amours. Les poissons se rassemblent en masse sur les zones de fraie. Il s’agit de la partie la moins profonde du secteur. Cette partie doit également posséder des herbiers, arbres immergés ou tout autre support pouvant accueillir les œufs fécondés. Les œufs se gorgent d’eau lorsque la température de l’eau avoisine les 18°C et la reproduction en elle-même peut débuter rapidement. Une fois les œufs hydratés, l’abdomen se trouve tellement gonflé que les poissons ne s’alimentent plus. Les mâles quant à eux, n’ont qu’une obsession, frayer. Vous l’avez compris, dans ces conditions, il devient très difficile d’obtenir des touches. Cela est, à vrai dire, une excellente chose !
Les ébats durent environ 15 jours s’ils ne sont pas interrompus. A la suite de cela, la pression retombe chez nos chères carpes qui doivent à nouveau reconstituer leurs réserves et entamer leur période de croissance. En règle générale, la « sortie » de fraie s’accompagne d’une période de frénésie alimentaire ainsi que d’un déplacement des poissons qui rejoignent leurs quartiers résidentiels estivaux. Une excellente période pour taquiner la carpe, mais ne vous attendez pas à faire des poissons au plus haut de leur forme, ils sont amaigris, parfois couvert de cicatrices et peu combatifs.
Les spots
Comme nous l’avons évoqué plus haut, au printemps, les carpes affectionnent les zones peu profondes et exposées aux rayons lumineux. Elles sont en quête d’une température d’eau clémente dans le but de préparer leur reproduction. Les bordures en amont des retenues d’eau, les plateaux et les bancs herbeux sont ainsi des zones où l’on a le plus de chance de croiser ces cyprinidés. L’observation de la surface de l’eau aux heures les plus chaudes vous permettra par ailleurs de trouver des poissons en surface. Cet indice est précieux car il vous permet de localiser la masse d’eau la plus chaude de votre secteur. Généralement, les poissons s’alimentent à proximité immédiate. En revanche, mêmes si les périodes d’alimentation sont multiples sur une période de 24 heures, elles sont de courtes durées. Il est donc impératif de trouver les spots fructueux en sachant qu’il y a fort à parier qu’ils soient de petite taille. En règle générale, il s’agit de zones assez productives en nourriture naturelle permettant aux poissons de dépenser un minimum d’énergie pour s’alimenter. Tâches de limon au milieu de zones dures, trouées dans un herbier, zone d’amorti dans une arrivée d’eau, ainsi que tout ce qui peut piéger ou produire de la nourriture naturelle.
Appâts pour carpe
Il est préférable d’avoir recours à des appâts qui permettent aux poissons de couvrir leurs besoins nutritionnels. De plus, ils doivent être assez faciles et rapides à digérer si l’on souhaite pouvoir stimuler l’appétit des poissons. Il est également indiqué d’utiliser des esches de couleur assez visibles afin que celles-ci puissent être localisées facilement par les poissons. Ceci permet de n’en utiliser que de faibles quantités dans le but de ne pas saturer l’appétit des poissons. En somme, le maïs doux et les bouillettes flottantes de couleur claire voire fluo sont toutes indiquées pour effectuer des pêches rapides en début de printemps. Par la suite, les pellets et frolics permettent de réaliser des amorçages à moindre coût tandis qu’une bouillette carnée nappée de foie sera utilisée en esche.
Bien entendue, les autres esches fonctionnent aussi, notamment lorsque les poissons sont en pleine période d’alimentation. Mais lorsque les détecteurs sont muets, il est préférable de ne pas négliger les appâts cités plus haut.
Les amorçages
Dans l’absolu, nous vous déconseillons d’avoir recours aux amorçages massifs qui ne conviennent pas à la saison. Il est important d’aller vers le poisson plutôt que de faire venir le poisson à vous. De ce fait, ce sont les pêches au spot qui sont les plus productives. Les poissons se trouvant bien souvent cantonnés dans des zones précises, il n’est pas utile d’amorcer largement mais plutôt d’amorcer sur des spots précis. De faibles quantités sont distribuées afin de ne pas saturer l’appétit des poissons. En revanche, au moindre doute, n’hésitez pas à réamorcer une petite quantité, notamment avec des appâts de type solubles. Si vous observez des poissons en maraude sur un secteur précis sans qu’ils ne s’alimentent, une pop-up fluo, nettement décollée et sans amorçage peut également devenir votre sauve bredouille. La curiosité peut l’emporter sur la faim et provoquer quelques captures.
Enfin, si aucun poisson n’est visible sur votre zone de pêche, mais que celle-ci se trouve sur un secteur à la configuration idéale, tentez dans le cas présent un amorçage léger mais couvrant tout le périmètre, à l’aide d’appâts tels que maïs doux, frolic et/ou pellets nappés de foie liquide. Ceux-ci vont véhiculer un message chimique fort pouvant stimuler l’appétit de poissons pouvant circuler à un moment donné sur ce secteur.
Période de fraie, une période délicate pour la pêche de la carpe
Effectivement, il s’agit d’une période à haut risque pour le poisson. Mais c’est surtout à ce moment-là que l’avenir du cheptel est en jeu. Tant en termes de reproduction mais également au niveau de la survie des « géniteurs ». Il faut savoir que les poissons dépensent énormément d’énergie durant cette étape de leur vie et ne s’accordent pas vraiment de repos. C’est pour cela qu’il convient de ne pas les déranger pendant leur période de reproduction. Ceci pour des raisons évidentes. Le No-Kill ne suffit plus, il est impératif de laisser aux poissons, quelles qu’en soit les espèces, une période de repos biologique de manière à ce que la fraye se déroule sans encombre. Enfin, nous sommes convaincus que vous n’apprécierez guère d’être dérangé en plein câlin.
Manipulation des poissons :
Que ce soit au sortir de l’hiver, juste avant la fraye ou en sortie de fraye, ne négligez pas le fait que les poissons sont assez vulnérables. C’est à ces périodes que le taux de mortalité naturelle est le plus important. Il convient donc de limiter le plus possible les manipulations de poissons et d’écourter leur captivité. Concernant les femelles pleines d’œufs, ne les posez jamais sur le ventre, même sur le plus moelleux des tapis de réception, manipulez les si possible dans l’eau en évitant de les soulever hors de l’eau. En sortie de fraye, les poissons sont parfois abimés avec des plaies parfois encore sanguinolentes. Si vous avez à votre disposition des kits de soins pour poissons, faites en usage. Ne gardez pas les mâles encore nerveux en captivité au risque de d’avantage les blesser.