L’arrivée des techniques modernes de la pêche de la truite au poisson nageur a quelque peu ringardisé en peu d’années un leurre génial et très prenant. La bonne vieille cuiller a pourtant encore beaucoup d’avenir devant elle, efficace, peu onéreuse, elle fait quelquefois la différence lorsque rien ne semble susceptible de faire bouger une truite. Découvrons ensemble l’un des premiers leurres technique à avoir été inventé pour la pêche sportive de la truite.
Un peu d’histoire
Il est impossible de dater précisément l’apparition de la première cuiller tournante. C’est dans la première moitié du 20ème siècle que la cuiller s’est peu à peu démocratisée.
C’est en 1938 qu’un ingénieur de chez Peugeot, M. André MEULNART, créa la société Manufacture d’ Engins de Précisions pour la Pêche Sportive (MEPPS) et mit au point la fameuse cuiller Aglia (papillon en latin). Cette cuiller remarquée par un américain eut ensuite un succès mondial et sert de référence ou de mètre étalon pour toutes les autres cuillers à truite.
Si c’est la cuiller ondulante qui fut la première inventée, c’est bien la tournante qui fut et qui reste la plus utilisée dans les rivières pour sa faculté à pêcher un peu partout.
Les modèles de cuillers
Il existe un grand nombre de modèles de cuillers tournantes, je ne parle même pas des ondulantes car le nombre de galbes possibles est impressionnant. Chez les tournantes on retiendra 3 grandes familles : celles équipées de palettes rondes ou Colorado comme l’Aglia qui sont les plus communes, celles équipées d’une palette feuille de saule ou Willow qui vont pêcher plus creux, et pour terminer l’inclassable palette In Line Blade ou IL équipant par exemple les Panther Martin.
Le principe est donc de faire tourner une palette autour d’un axe. Les palettes feuilles de saule vont tourner au plus près de l’axe et donc moins offrir de surface au courant, de cette façon elles pêcheront plus creux que les palettes rondes qui papillonnent plus loin de l’axe. La palette IL va tourner très vite tout en gardant une position intermédiaire aux deux autres.
Cette faculté de prendre ou non appui sur l’eau va déterminer la profondeur d’évolution de la cuiller en fonction du courant. Il est bien évident qu’il faudra choisir votre modèle en fonction du poste à explorer sinon vous risquez des déconvenues.
Des fabricants se sont essayés à des formes de palettes intermédiaires ou fantaisies mais le classique efficace a vite repris ses droits et ces palettes sont quelques peu passées de mode.
Il existait un ancien leurre, capable de passer en vrombissant dans les plus forts courants mais presque totalement oublié : le devon. Un leurre très efficace qui, comme beaucoup d’autres, aura une seconde vie lorsque les fabricants s’empareront du sujet.
Les cuillers sont classées par taille croissante, une 1 étant plus petite qu’une 2. Pour les rivières et ruisseaux on s’arrête généralement à la taille 2 sauf dans quelques régions comme l’Alsace ou le Jura où les grosses truites vous invitent à pêcher avec des numéros 4. La plupart du temps je n’utilise que du 1 et du 0 car les truites que j’attrape ne sont jamais très grosses, ce qui est dû aux eaux acides de mon Morvan natal. En plein été il convient de descendre en taille et le numéro 00 trouve son utilité mais sur un matériel spécifique que je vous détaillerai plus loin dans cet article.
Les accessoires
Garder ses cuillers exige un rangement correct, on ne peut les jeter en vrac dans la poche sans risquer de les voir s’accrocher au tissu. Pour les stocker une boite plastique compartimentée convient parfaitement mais j’ai un faible pour la trousse classique à cuiller qui permet de pouvoir avoir une meilleure vue sur son stock.
La cuiller est l’un des rares leurres à requérir l’usage systématique d’un émerillon sinon gare au vrillage de la ligne et au foisonnement du moulinet lorsque l’on s’y attend le moins. Le bon vieil émerillon JB, ultra classique, a encore de beaux jours devant lui car lui seul sait mêler légèreté, praticité et système anti vrillage.
Une bonne paire de lunettes polarisantes est devenue maintenant indispensable lors de mes pêches, il m’arrive de voir les truites en poste et ainsi je peux mieux prévoir mes lancers. Ne lésinez pas sur la qualité de cet équipement qui sera votre grand allié.
Dernier petit accessoire indispensable, la pince agrémentée d’un coupe fil qui servira autant à finaliser vos montages qu’à décrocher en sécurité un triple pris dans la mâchoire de la fario.
On pourrait aussi citer une épuisette mais beaucoup arrivent à s’en passer et le plaisir de faire glisser dans sa main une belle mouchetée reste encore l’un des plus beaux gestes de la pêche.
Le lancer léger
Par lancer léger on désigne communément les cannes pouvant propulser des cuillers de taille 1 à 4, soit une puissance allant du L au M. C’est le lancer de l’ouverture pour la plupart des pêcheurs, la canne avec laquelle on pêchera jusqu’aux beaux jours. Généralement elle mesure 1,80m ou plus selon la taille de la rivière et on l’équipe d’un moulinet en taille 2500. Dorénavant le nylon marque le pas sur d’autres fils plus techniques tels que le Nanofil, le nylon coated et la tresse.
La truite étant une fière bagarreuse il convient de la pêcher avec une canne assez souple afin d’encaisser ses coups de tête sinon elle aura tôt fait de se décrocher. Peu importe qu’elle soit résonnante car la prise se fait lors de la phase de moulinage, donc la touche se ressent bien quel que soit la distance ou la profondeur et le poisson se pique généralement au bout de la gueule.
Les cannes truites aux leurres ont fait de très gros progrès en peu d’années et dorénavant on peut mater la plus belle des truites sur une canne fine et légère qui va démultiplier les sensations pour le plus grand plaisir du pêcheur.
L’ultra léger
J’ai connu l’ultra léger qui se pratiquait naguère avec une toute petite canne en fibre de verre d’1,2 m et un micro moulinet. Cet ensemble idéal dans les petits ruisseaux est désormais introuvable et les cannes offertes au choix du pêcheur mesurent en moyenne 1,6m et sont de puissance UL soit en moyenne 0-5g.
L’ultra léger consiste à pêcher avec des leurres minuscules, en l’occurrence des cuillers 0 et 00 qui pèseront quelquefois moins de 2 g. Lancer de telles miniatures demande un matériel adapté, une canne souple, un moulinet en taille 500 et un nylon de 12 centièmes voire même moins pour les ruisseaux.
Le matériel tendra vers la finesse extrême afin d’être le plus discret possible dans des rivières à l’étiage où l’eau est très claire et où la truite a tout le temps d’admirer votre montage avant de l’engamer. C’est une pêche exaltante que l’on pratique le plus souvent en plein été, je ne peux que la conseiller à ceux qui recherchent l’aventure. Elle a pourtant un coté négatif, en été les truites souffrent de la chaleur et j’en ai vu qui succombaient après un combat sur un ensemble ultra léger.
La technique de la cuiller
Les anciens spécialistes de la cuiller disparaissent peu à peu au profit d’utilisateurs débutants ou occasionnels. Certaines pratiques se perdent au fil des souvenirs pourtant la cuiller ce n’est pas qu’un simple lancer ramener. On voit trop souvent le pêcheur arriver peu discrètement, lancer face à lui et mouliner au plus vite afin d’éviter de s’accrocher. A ce comportement on peut reprocher plusieurs fautes : il faut être discret, le plus discret possible. Il faut d’abord lancer dans ses « bottes » avant de battre la berge d’en face et pour terminer il faut savoir où pêcher et garder une vitesse correcte de son leurre.
On peut pratiquer à la cuiller en lançant court à l’amont et en récupérant vite, en ce cas on vise les postes ou bien encore vers l’aval en lançant plus loin et en ramenant assez doucement, là on pêchera l’eau et les postes invisibles situés dans le lit de la rivière. Mais la plupart du temps on pêche en éventail en privilégiant toutefois le lancer ¾ amont et en soutenant la cuiller le temps que le courant mette en action sa palette. Pour cela les cuillers à palette IL sont parfaites et tournent avec moins de prise au courant.
Il convient de changer régulièrement de cuillers de façon à s’adapter au poste pêché. Un profond avec peu de courant vous invitera à mettre une cuiller lourde, une veine puissante et c’est une palette feuille de saule qu’il faudra installer au bout de votre ligne.
La stratégie commune voit le pêcheur remonter le courant et lancer un peu au delà des postes marqués (rochers, trous, etc.). Par exemple en ruisseau on pêchera en remontant à l’amont afin de ne pas effrayer les truites en poste et en ne lançant que trois fois par rapport à la largeur du ruisseau : 1 fois à gauche, une fois au centre, une fois à droite. Si le ruisseau devient rivière on passera plusieurs fois en ratissant tous les mètres car il est fréquent qu’une truite ne fasse pas plus d’1m pour attaquer.
Quelle couleur pour votre cuiller ?
La couleur des palettes de cuillers a fait et fera toujours couler beaucoup d’encre. L’usage voudrait que l’on pêche avec du clair par temps gris et foncé par temps clair, ou argent le matin et doré le soir mais aucune de ces pseudos vérités ne peut vraiment s’appliquer à la truite qui un jour acceptera une couleur pour la refuser le lendemain alors que les conditions sont identiques. On pariera plutôt sur le fait que le décor sera discret par eaux basses et claires et très voyant par eaux teintées.
Seule constatation que j’ai pu faire depuis des années, les cuillers fluo fonctionnent très bien en début de saison sur les truites surdensitaires.
La cuiller à palette noire, légende de mon enfance, fonctionne étonnamment bien en pleine lumière en été, pourquoi ? C’est un mystère, peut être figure t’elle un coléoptère vrombissant se noyant ?
Les cuillers ondulantes, surtout les petits modèles japonais aux coloris nacrés sont de beaux outils qui n’aiment pas trop les courants. Je préfère les utiliser en eaux closes sur les arcs en ciel mais elles fonctionnent bien sur les zones les plus calmes de nos rivières.
Les tailles des cuillers sont différentes de rivière en rivière et si sur l’Ain on pêche à la numéro 4, dans la source de l’Yonne c’est plutôt en numéro 0 que l’on cherchera la petite truite noire du Morvan. La plus communément utilisée est la numéro 2, assez grosse elle prend pourtant nombre de farios et d’arcs portions les jours d’ouverture. Si je ne devais posséder que deux cuillers, ce serait une Aglia Mepps en 1 et jaune fluo et une Panther Martin en 1 et dorée car elles fonctionnent très bien sur les cours d’eau que j’affectionne.
Un truc de vieux pêcheur
Une vieille astuce plus guère utilisée est le soutien de la cuiller dans les courants les plus forts. On pêchera alors presque en statique devant un beau rocher ou une souche. J’ai vu quelque truites d’ouverture se faire piéger avec ce stratagème, elles ont mordu certainement agacées par la présence insistante de ce bout de ferraille cliquetant.
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