Qui peut prétendre ne jamais s’être trouvé au bord de l’eau attendant désespérément un départ qui tarde trop ? Il arrive parfois que tout semble bloqué, qu’aucun poisson ne se manifeste et que le lac pêché semble sur « off ». Pourtant, il existe de multiples techniques et tactiques à mettre en œuvre pour sauver le pêcheur de la « bredouille » quand il recherche dame carpe.
Quand la carpe semble bouder les appâts…
Même s’il est toujours agréable de se retrouver au bord de l’eau, l’attente dans le biwy paraît plus facilement supportable quand la centrale réveille régulièrement le carpiste et que les captures s’enchaînent à un rythme régulier. Malheureusement, il nous arrive à tous de trouver le temps bien long entre des runs qui tardent à venir, et donc de devoir se creuser les méninges pour trouver un moyen susceptible de conduire les carpes au matelas de réception.
Bien des questions surviennent alors et la nécessaire remise en cause peut concerner de multiples facteurs connus pour influencer la capture des carpes : le placement des cannes, le poste et les profondeurs pêchées, la présentation des esches et les montages, les appâts utilisés, la technique d’amorçage mise en place… On peut toujours espérer que des poissons très discrets depuis le début d’une session mal engagée vont subitement passer à table, mais l’attente peut se révéler veine si aucun changement atmosphérique n’incite nos chers cyprins à se saisir de nos bouillettes. Ce questionnement sur les tactiques et les techniques est essentiel lors de sessions rapides, sans quoi il est probable de passer à côté de sa pêche en attendant des poissons qui ne se manifesteront peut-être pas… Il est trop frustrant de rester bredouille sans être persuadé d’avoir fait le maximum pour déclencher un semblant d’activité. Les pêcheurs ayant les meilleurs résultats ont en commun ce que l’on appelle communément « le sens de l’eau », mais aussi la capacité à ne rien lâcher avant d’avoir capturé quelques poissons.
Partir à la recherche des poissons
Une pêche statique favorisant le camping au bord de l’eau peut s’avérer productive pour des carpistes assez patients pour stationner plusieurs semaines sur un seul et même poste. Si comme moi vous êtes adeptes des pêches rapides sans avoir recours à des amorçages systématiques et préalables faute de temps, la meilleure solution est de partir à la recherche de quelques poissons mordeurs. Encore faut-il pêcher les carpes là où elles se trouvent, ou mieux encore, trouver les spots où elles se nourrissent.
Une pêche opportuniste en fonction des saisons et des eaux pêchées associée à une bonne connaissance des lieux assure aux carpistes investissant une partie de leur temps de pêche à cette recherche des résultats constants et supérieurs à la moyenne. C’est le cas sur les lacs de barrage de moyenne montagne aux berges escarpées sur lesquels le repérage des poissons est primordial. Attendre que les poissons passent en un endroit précis relève d’un pari trop osé pour celui qui a un temps de pêche réduit, à moins qu’il ne connaisse parfaitement les spots… On peut également trouver de grandes concentrations de poissons en certains lieux en fonction des saisons, que ce soit au printemps avec le frai, en été sur des tenues, alors que la frénésie alimentaire automnale amène les carpes à se déplacer fréquemment. Un amorçage de zone conséquent est plus efficace sur de grands réservoirs de plaine, même si benner des quantités conséquentes de bouillettes peut également s’avérer contre productif si l’activité des poissons est réduite.
L’appât ultime n’existe pas…
On peut considérer que les bases de la production d’appâts de qualité sont maintenant clairement établies et connues de tous ; on trouve des bouillettes à la fois équilibrées et attractives dans la plupart des gammes sérieuses, même si les prix dans le commerce sont trop souvent exorbitants. Il est indéniable que l’appât demeure l’atout majeur dont dispose le carpiste pour capturer des poissons. Mais qu’on se le dise, la bouillette « philosophale » n’existe pas, ou sa recette n’a toujours pas été divulguée… Des pêcheurs pour ne pas dire chimistes en herbe (sans allusion avec celles qui se fument !) ont voulu faire croire avoir trouvé l’appât ultime intéressant toutes les carpes sans exception. Cette vaine quête de notre graal carpiste a été l’objet de nombreux articles dans la presse halieutique et il est difficile d’avoir des certitudes sur le sujet. Même si certains appâts ont prouvé leur supériorité dans certaines conditions, une esche mal utilisée ou déposée au mauvais endroit ne permettra jamais de capturer un seul poisson. Pour résumer, une bille de qualité moyenne placée sur un hot spot est préférable à un appât de qualité supérieure mais mal positionné.
L’utilisation qui est faite des appâts doit guider leur choix. Une bouillette utilisée pour une pêche rapide doit être attractive immédiatement, souvent gorgée d’attractants divers envoyant un message olfactif puissant et rapide. Les bouillettes utilisées sur un temps plus long et dans le cadre d’un ALT gagnent à être plus digestes et équilibrées pour que les carpes trouvent en elles une source de nourriture profitable sur le long terme.
Une remise en cause nécessaire
Une fois ces données rappelées, on peut se questionner sur son approche et ses pratiques de pêche, quand tout semble bloqué au bord de l’eau et que les résultats obtenus sont faibles au regard du potentiel du lieu. Il devient urgent de changer de tactique pour parvenir à capturer coûte que coûte quelques carpes.
Différentes voies peuvent être explorées et sont susceptibles de faire bouger les choses et les poissons… Se démarquer des autres pêcheurs est un bon point de départ ; il suffit pour cela d’observer ce que font les collègues, sans pour autant jouer au crabe de service. L’observation de l’activité est également un atout à privilégier dans son jeu quand on affronte des carpes habituées à se déplacer fréquemment. On peut également chercher la différence en jouant avec les appâts. La tactique consistant à utiliser des esches identiques à son amorçage est la plus usitée et reste productive dans la plupart des situations, mais la différentiation entre les deux peut également favoriser les résultats.
Parmi les méthodes les plus fréquemment mises en œuvre, on peut citer :
– les montages tricheurs associant bouillettes et graines ou éléments en plastique ;
– des esches de couleurs différentes ou fluo jouant sur l’attraction visuelle, ou encore des billes boostées pour travailler le côté olfactif ;
– des appâts totalement différents de l’amorçage : une graine au milieu de billes parfumées et de pellets, une unique boilie sur un tapis de graines, une bouillette fruitée parmi d’autres à tendance carnée, un gros pellet sur un lit de chènevis…
– une esche animale parmi des bouillettes, un ver de terre, une grappe d’asticots ou encore une écrevisse difficile toutefois à escher;
– une mousse boostée présentée entre deux eaux avec un zig aligneur…
Autant de tactiques qui, mises en œuvre à bon escient, peuvent s’avérer dévastatrices …
Changer de montage : oui mais…
Les changements de postes ou d’esches ne suffisent malheureusement pas toujours. Il est alors temps de se pencher sur la présentation et sur ses montages. Les bouillettes flottantes, les appâts équilibrés et autres bonhommes de neige n’ont plus de secret pour les carpistes et sont employés pour déjouer la méfiance des carpes. Pourtant, il peut également s’avérer utile de tester différentes longueurs pour le cheveu reliant l’esche à l’hameçon. Piquer régulièrement des brèmes sur un spot suffit à détourner les carpes des esches, alors que le simple fait d’allonger d’un ou deux centimètres le cheveu permet souvent de limiter les captures de blanchailles tout en laissant le montage à la disposition de nos cyprins favoris. Certaines conditions imposent l’utilisation d’un cheveu rigide, notamment quant les bêtes à pinces ou les matous jouent avec les nerfs du carpiste et avec ses appâts, alors que la tendance actuelle préconise plutôt l’utilisation d’un cheveu souple pour donner un maximum de liberté de mouvement à l’esche, quand ce n’est pas un hameçon inséré dans une boucle pour lui permettre des mieux s’ancrer dans la bouche des poissons.
Dans le même ordre d’idée, il est possible de jouer sur la longueur des bas de lignes en les rendant plus ou moins agressifs en fonction des saisons et des circonstances : les montages standards mesurent en moyenne entre 12 et 25 cm alors qu’un bon fluorocarbone de 50 cm peut être terriblement prenant en eau claire, peut être à cause d’une plombée décentrée et donc camouflée. Là encore, se démarquer des habitudes et prendre le contre-pied des carpistes fréquentant un plan d’eau est gage de réussite, que ce soit en l’allongeant ou en raccourcissant les bas de ligne, tout comme il est possible de trouver la solution en changeant de matériaux pour la conception. Les solutions ne manquent pas pour confectionner des montages articulés ou à charnière, des montages combinés semi-rigides type combi-link, d’autres complètement souples ou des stiff-rigs…
Pourtant, je connais des collègues qui ont de bons résultats session après session en ne pêchant qu’avec un seul montage tout au long de l’année. Je reste par contre persuadé qu’ils doivent passer à côté des avantages que procurent indéniablement certains produits comme les tresses gainées ou non, les nylons invisibles, les différents types d’hameçons. Il ne s’agit pas de multiplier les achats au grand plaisir des magasins, mais d’avoir dans sa boîte de pêche de quoi répondre à la plupart des situations et de confectionner quelques montages différents. Expérimenter oui, mais pas n’importe quoi et de façon réfléchie.
Voilà donc bien des pistes de réflexion pour le pêcheur au bord de l’eau. Une remise en cause de ses techniques et la volonté de sortir d’une pratique stéréotypée sont primordiales dans les eaux actuelles, quel que soit le poisson que l’on traque. Pour illustrer ce fait, on peut citer la pêche au vif de moins en moins utilisée chez les pêcheurs de carnassiers au profit de la pêche aux leurres divers. Certaines innovations matérielles et évolutions techniques donnent d’indéniables avantages à ceux qui les maîtrisent, alors pourquoi s’en priverait-on…