Aujourd’hui la pêche de la carpe rime avec no-kill. Cette opération consiste après la capture du poisson, à le relâcher afin de permettre à celui-ci de pouvoir à nouveau être repris plus tard, mais également d’assurer la reproduction de son espèce. Il s’agit d’un geste qui parait naturel à présent mais qui, toutefois, obéit à certaines règles que nous allons vous rappeler.
« …des règles que nous allons vous rappeler. » ? Cela peut vous paraitre choquant, vous, carpiste habitué à exécuter ces gestes machinalement après chacune de vos prises, nous le concevons parfaitement. Mais pourtant il est fréquent de constater que certains pêcheurs commettent encore quelques erreurs. Celles-ci semblent anodines mais elles peuvent parfois être lourdes de conséquences pour la santé et le bien-être du poisson. Il est impératif d’en être conscient. De plus, des années d’expériences nous ont permis de faire évoluer le matériel mais également les techniques de relâche. Certaines fautes ne sont ainsi plus excusables.
Que ressent le poisson ?
Mais tout d’abord, il n’est peut-être pas nécessaire de vous rappeler que les poissons que nous capturons ne sont pas de simples objets mais bel et bien des êtres vivants. Ceux-ci sont donc dotés d’un système nerveux qui permet de percevoir la douleur. Et qui dit douleur, dit stress. Le stress est une réaction de l’organisme par rapport à des contraintes qu’il pourrait subir (http://fr.wikipedia.org/wiki/Stress). En d’autre terme, il s’agit d’un malaise qui peut fortement influer sur la santé du poisson.
Qui dit douleur peut également dire blessure et donc stress.
Vous l’aurez compris, bien qu’une carpe soit muette elle ne souffre pas moins de nos captures et erreurs de manipulation. Mettez-vous à la place des poissons que vous posez sur le tapis de réception : une écaille arrachée correspondrait à une poignée de poil qui vous serait subitement soutiré de votre épiderme. Une nageoire cassée correspondrait à une main ou un pied cassé, etc. Il n’est pas nécessaire de continuer la liste, vous avez saisi le message. Beaucoup de personnes et de scientifiques se sont penchés sur la question, à savoir si les poissons ressentaient la piqûre d’un hameçon sans vraiment apporter de réponse. Certains vous diront qu’il n’y a pas assez de terminaisons nerveuses sur les lèvres d’un poisson pour qu’ils ressentent la douleur, d’autre diront que les poissons ne perçoivent pas les mêmes sensations que nous. Les pêcheurs essayent ainsi de se donner bonne conscience mais si nos captures pouvaient s’exprimer, il est fort probable qu’elles ne manifesteraient pas un avis favorable sur la question. Faisons abstraction sur ce sujet, même s’il faut ne pas l’oublier.
Le matériel nécessaire pour une manipulation sécuritaire :
De ce fait il est donc important de manipuler et de relâcher chaque capture dans les meilleurs conditions afin de limiter les traumatismes (http://fr.wikipedia.org/wiki/Traumatisme) que nous pourrions leur faire subir.
Pour cela il faut se munir d’un minimum de matériel. Comme nous l’avons évoqué plus haut, aujourd’hui nous disposons d’outils nécessaires au bon déroulement des manipulations que nous allons effectuer.
Pour commencer, et bien entendu le plus important il est indispensable de disposer d’un tapis de réception. C’est certainement le premier accessoire dont vous devez vous munir pour taquiner la carpe. Celui-ci permet, une fois le poisson au « sec », de le protéger du contact du sol ainsi que son mucus. Il sera relativement épais pour amortir, s’adapter au relief et suffisamment grand pour accueillir convenablement vos prises. La présence de rebords sur les cotés s’avère un vrai plus notamment avec des poissons nerveux. Il doit être en permanence présent au côté de vos cannes, que vous soyez en session ou tout simplement en stalking. Il est inutile de préciser qu’il doit se trouver le plus proche possible de l’eau et sur une surface plane.
En seconde position, un contenant permettant d’apporter de l’eau fraîche sur le tapis afin de l’humidifier, tout comme par ailleurs mouiller tous les accessoires qui vont entrer en contact avec le poisson. Un geste indispensable avant de déposer vos prises ou tout simplement pour rafraichir vos captures si celles-ci se dessèchent.
Pour la pesée, préférez un sac de pesée rigide aux versions souples. Outre le fait de peser correctement vos prises, il vous permet de transporter les poissons sans qu’ils ne se tordent dans tous les sens, malmenant les nageoires. Et enfin, pour relâcher vos prises cet outil est vraiment pratique.
Un peson muni d’une barre de pesée vous permettra à la fois de tenir votre outil de pesée sans que celui-ci ne vous échappe, mais également de lire le bon poids. En effet, trop de pêcheurs tiennent le peson par la base ce qui sur certains modèles empêchent l’aiguille de se mouvoir correctement et de donner ainsi le bon poids.
Un sac de conservation de grande taille avec un cordage de longueur suffisante permet aux poissons qui auraient combattu longuement de pouvoir récupérer un peu avant la relâche. Attention toutefois à la règlementation qui tend à tout simplement le bannir.
Enfin, un outil de base que l’on a tous dans ses affaires, une paire de bottes ou mieux encore de waders, cela vous permet de rentrer dans l’eau si la profondeur n’est pas suffisante afin d’épuiser convenablement vos captives ou de les relâcher sans que celles-ci n’aient à ramper pour atteindre une profondeur de nage acceptable. Il n’est pas admissible d’échouer le moindre poisson sous aucun prétexte. Si vous n’avez pas de bottes, mouillez vos pieds, c’est la moindre des choses !
Les bons gestes
Passons aux choses sérieuses : l’heure du départ a sonné, il est temps de prendre contact avec le poisson. Inutile de ferrer comme un fou furieux, votre montage, s’il est bien conçu, s’en est bien chargé. Cela évitera au poisson des mutilations inutiles dans sa bouche. Une fois le combat mené à terme, il est temps de faire rentrer la belle dans les mailles du filet de votre épuisette. La première chose à vérifier avant de soulever le poisson est la disposition des nageoires : les pectorales bien plaquées au corps et la caudale parfaitement droite et sans appui. Une astuce consiste à défaire les bras de l’épuisette, et à rouler le filet autour des bras jusqu’au poisson. Ceci forme alors un « brancard » qui facilite et sécurise le transport de votre prise.
Si vous avez fait le combat depuis une embarcation, ne remontez pas le poisson sur le bateau, mais justement, pliez l’épuisette et laissez le poisson tremper dans l’eau, tête orientée vers l’avant, le temps de regagner votre poste. Ceci permet d’éviter à votre prise de se débattre à l’air libre et à la fois de pouvoir récupérer en partie de la lutte.
Bien entendu, avant de poser le poisson sur le tapis, vous aurez pris soin d’abondamment le mouiller. A noter que si vous comptez peser votre capture, disposez à l’avance le sac de pesée sur le tapis, déjà en position de réception du poisson. Ceci vous permet de limiter les manipulations et de gagner un temps précieux. Prenez votre temps pour faire tous les préparatifs sur la berge tant que la carpe patiente sans danger dans l’eau, encore emprisonnée dans l’épuisette. En déposant votre prise, veillez à nouveau à ce qu’aucune nageoire ne soit pliée et que la plombée du montage ne se trouve pas sous le poisson. En effet, si celui-ci venait à se débattre, il pourrait se blesser en rentrant en contact violement avec le plomb.
Décrochez au plus vite le piège sans tirer stupidement sur l’hameçon. Limitez un maximum les blessures buccales en décalant l’hameçon à l’opposé de l’ardillon pour que ce dernier lâche prise et procédez à l’extraction.
Si vous suivez ces étapes vous ferez le maximum pour vos carpes
Ne pesez votre trophée que si nécessaire, il n’est pas utile de connaitre le poids exact des petits poissons, épargnez leurs des souffrances inutiles. Le peson doit être taré à l’avance. Pour cela, il suffit de connaitre le poids que fait votre sac correctement mouillé et de faire la tare. Son poids ne variera pas ou très peu avec le temps, inutile de peser systématiquement votre sac, vous perdez à nouveau un temps considérable. La pesée doit se faire systématiquement au-dessus du tapis de réception. En cas de soucis ou de poids trop important, il doit pouvoir toujours être directement posé par le tapis. A noter que pour une lecture plus précise, il existe des manches de pesée voire même des trépieds qui sont des outils très utiles lorsque l’on fait des pêches à haut rendement. Il est également possible de fixer le peson sur une branche d’arbre, veillez simplement à vous assurer de sa solidité.
Sans plus tarder, passons à la séance photo. Le moment crucial pour le pêcheur consiste à immortaliser sa capture. Il s’agit probablement de la phase la plus critique pour le poisson, notamment pour le pêcheur débutant qui n’a pas l’habitude de tenir ses prises. Dans tous les cas de figure, ne prenez aucun risque : ne cherchez pas à faire les séances photo loin de la berge ou dans des positions aberrantes. Comme pour la pesée, le tapis de réception doit systématiquement rester en dessous du poisson. Ne faites pas non plus durer, même si il s’agit du poisson de votre vie ! N’oubliez pas qu’il vient de livrer un combat et qu’il s’est rendu à vous totalement épuisé. Quelques clichés suffisent amplement. Les très grosses prises ne doivent pas être présentées bras tendu car elles ont toutes les chances de vous échapper. Plaquez les contre vous en ayant pris soin auparavant de mouiller vos vêtements afin que le poisson conserve son indispensable mucus.
Dans tous les cas de figure, ne prenez aucun risque !
Si le poisson se met à remuer, posez le sur le tapis, masquez lui les yeux. En principe, il se calme immédiatement. Si cela n’est pas le cas, n’hésitez pas à vous plaquer contre lui afin de le maintenir sur le tapis. Attendez que le poisson ne donne plus de signe d’énervement avant de retenter une prise de vue. S’il présente des spasmes, nageoire tendues, contractions permanentes, attendez encore un peu. Dans tous les cas, mouillez abondamment le poisson afin que son corps et ses branchies soient toujours humides.
Enfin, le meilleur endroit pour faire les photos reste sur l’eau. Cela permet pendant les pauses de le laisser respirer en plongeant la belle dans l’eau. Vous craignez peut-être que le poisson ne vous échappe, dans ce cas orientez le simplement la tête en direction de la berge, vous pourrez le rattraper facilement. Si elle venait à chuter, elle tomberait directement dans son élément. Par forte chaleur, vous apprécierez également de vous rafraichir. Enfin, les clichés sont nettement plus jolis ainsi !
Il est temps de libérer votre poisson, il l’a bien mérité. Aidez-vous du sac de pesée pour l’amener vers son élément. Si vos manipulations se sont bien et rapidement déroulées, il doit quasiment repartir immédiatement. Dans le cas contraire, si la règlementation le permet, mettez votre carpe dans un sac de conservation dans une profondeur d’eau suffisante, au moins 1 mètre et surtout dans une zone dégagée de tout ce qui pourrait blesser votre captive. Dans un premier temps le poisson restera en surface, aidez-le à rester en position droite. Une fois que celui-ci commencera à nager et à faire couler le sac, il sera temps de le libérer. Ne sortez pas le sac de l’eau mais ouvrez directement celui-ci dans l’eau ; vous l’aurez compris, cela permet d’éviter du stress inutilement.
Si le sac de conservation est interdit, il va falloir vous armer de patience en procédant à une réanimation qui consiste à ventiler le poisson par des mouvements avant arrière. Une fois que celui-ci aura repris esprit il manifestera par lui-même l’envie de repartir.
Si vous vous êtes correctement organisé, la durée totale de toutes les manipulations aura été de 3 à 7 minutes pour les plus gros sujets. Plus longtemps, cela pourrait mettre en péril la survie de vos prises. A noter que par températures chaudes, il faut impérativement faire au plus vite, les hautes températures étant moins propices à une bonne récupération du poisson de part une moins bonne oxygénation de l’eau.
La période de fraie
La fraie est une période délicate pour le poisson. Elle génère dans un premier temps une situation de stress qui tend à affaiblir le poisson. Mais la présence d’œufs matures chez les femelles les rend encore plus vulnérables. S’il vous arrive de capturer des femelles bien rondes, évitez de les sortir de l’eau et manipulez les le moins possible. Une pression trop importante sur le ventre peut provoquer des lésions et hémorragies mortelles. Afin de limiter tous risques, nous ne pouvons que vous recommander de laisser les poissons frayer tranquillement et de reprendre leur pêche une fois la saison des amours achevée.
Soigner ses prises
Il arrive que nous soyons amenés à capturer des poissons blessés, ou que la piqûre de l’hameçon ait formé une plaie. Sachez qu’il est possible de soigner cela par l’utilisation de produits prévus à cet effet. Leur efficacité n’est pas réellement prouvée, mais une chose est certaine, c’est que cela ne peut en aucun cas leur faire de mal. Une simple application sur les plaies agit comme un antiseptique favorisant ainsi la cicatrisation. Alors pensez à ces dames si vous pêchez des secteurs où les poissons subissent une trop forte pression de pêche.